"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

lundi 29 mars 2010

Un homme, ça s'empêche !

Ça se passe au Maroc au début du siècle dernier. Une nuit deux soldats français vont relever une sentinelle. Ils trouvent à la place un cadavre, égorgé, émasculé, les sexe dans la bouche. L'un des deux hommes, éduqué, instruit, essaie de comprendre, de trouver les motifs qui peuvent expliquer cet acte barbare. Le second, lui, ne veut rien entendre des rasions évoquées par le premier. Ceux qui ont fait ça quelles que soient les raisons profondes qui les ont poussé à cet acte, ont tort. Alors il juge, tout simplement, en déclarant : "un homme, ça s'empêche". C'est le premier, directeur d'école à Alger, qui rapportera cette histoire à Albert Camus. Car le deuxième homme n'est autre que le père de Camus, et qui mourra lors de la première guerre mondiale alors que le futur écrivain n'avait pas un an.

Cette simple phrase, prononcée par un homme disposant d'une éducation pourtant rudimentaire, dévoile une haute conception de l'humanité. Un homme n'est pas seulement ce qu'il fait, il est aussi ce qu'il s'empêche de faire. Ainsi tout n'est pas permis aux hommes dignes de ce nom, même aux plus malheureux, même aux plus opprimés. Et même pas à ceux qui persuadés de détenir l'unique vérité, veulent la faire partager aux autres, même à ceux qui n'en veulent pas.

Aujourd'hui, c'était un lundi. Après le week-end, comme ailleurs, à Moscou des milliers de personnes comme vous, comme moi, comme nos enfants, prenaient la métro pour se rendre à leur travail. Parmi eux il n'y avait pas de présidents, pas de ministres, pas de députés , pas de généraux, pas de riches hommes d'affaires. Non simplement des gens qui entamaient une semaine de travail souvent pour un salaire de misère. 38 d'entre eux, au moins, ne rentreront plus jamais chez eux. Leurs proches, leurs parents, leurs enfants ne les verront plus jamais. Ils ne pourront même pas certainement se recueillir devant leurs corps déchiquetés.
Cela parce que l'humanité avait quitté l'âme de deux femmes avant même que la vie ne les quitte.
Cela au nom du Très Haut.

C'était à Moscou, aujourd'hui. Hier, c'était à New-York, à Londres, à Madrid. Où demain ?
Quel est ce dieu qui priverait sa création, l'homme, de son humanité ?

2 commentaires:

  1. exactement mon état d'esprit en ce moment , Expat, RIEN ne permet en cette humanité d'accepter ça
    Les kilomètres de mauvaises bonnes raisons vont défiler, sur la toile, en surface, on émet même l'idée du complot , RIEN ne pourra jamais me faire admettre ces crimes aveugles
    In mémoriam

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  2. Oui, j'ai déjà lu quelques commentaires honteux sur cet attentat. Pour certains, c'est quasiment mérité.
    Outre la connerie profonde de leurs auteurs, ils montrent une méconnaissance totale du problème de Caucase qui date presque de deux siècles. Mais la connerie (et la méchanceté) est souvent sœur de l'ignorance.
    Pour bien sentir le problème dans son essence, je conseillerais avec insistance un roman de Tolstoï qui s'appelle "Hadji Mourat". Je pense d'ailleurs qu'un de ces jours je me fendrai d'un post sur ce bouquin. Mais il faut que je le relise.

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