"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

mardi 25 mars 2014

Le vrai visage du pouvoir ukrainien





Mon précédent billet sur le sujet démontrait qu'une partie des membres de ce gouvernement ukrainien était composé d'individus pas particulièrement recommandables auxquels pourtant les occidentaux et la France en particulier apportent un soutien sans faille. Cela pourrait être risible, mais dans les faits ça ne l'est pas du tout, quand on considère les réactions de la gauche de gouvernement à la montée du FN lors du premier tour des municipales tandis que ce parti semble bien inoffensif  si on le compare au parti socialiste-national (l'inversion est de leur fait, sans doute dans le vain espoir de paraitre respectables) Svoboda, mot signifiant, on n'en est plus à une démonstration de cynisme près, "liberté".

Donc il y a eux qui disposent de 5 ministres dans ce gouvernement, et il y a les autres, et en particulier ceux du parti "pro-occidental" de Ioulia Timochenko, nommée aussi "la princesse du gaz" en référence à l'origine de sa fortune acquise selon des méthodes qui lui ont valu de se retrouver par deux fois derrière les barreaux. Elle n'est certes pas dans ce gouvernement, des problèmes de santé l'éloignant provisoirement, hélas, des lieux du pouvoir, mais ses fidèles serviteurs occupent quelques-uns des postes-clé dont ceux de président et premier ministre, par intérim.
Actuellement en Allemagne pour se faire soigner, la charmante Ioulia ne délaisse pas les affaires et use de son influence. Ses prises de paroles publiques n'ont rien d'apaisant, mais celles qu'elle tient en privé donnent des frissons dans le dos.
Ainsi, il y a peu une conversation téléphonique entre elle et un député, Nestor Shufrych du parti des régions (le parti de Ianoukovitch) a été interceptée par on ne sait qui (!), comme fut interceptée une conversation téléphonique entre la brillante Catherine Ashton et le premier ministre estonien au cours de laquelle on apprenait que l'origine des massacres de la place de l'Indépendance était pour le moins douteuse. Tiens, au fait! Où en est l'enquête sur ce sujet? Les accusations étaient graves et de nature à remettre complètement en cause les thèses défendues par les occidentaux quant à l'explication (la justification) de ce coup d'Etat réussi. Je n'ose pas croire que nos démocraties, qui se posent invariablement du côté du bien, du juste et de  la morale, se parant au passage du titre de "communauté internationale", excusez du peu, aient fait l'impasse sur une enquête rigoureuse permettant d'innocenter leurs protégés. On, non, ça va venir, n'en doutons pas. Obama, Hollande, Cameron, Merkel et les autres sont des gens bien trop honnêtes pour évacuer l'affaire, la glisser sous le tapis en attendant que tout le monde l'ait oubliée. Comment? Vous doutez?
Mais revenons à la sulfureuse Ioulia et à cette conversation dont j'espère nos médias se feront le relais, soucieux qu'ils sont de nous fournir une information objective. La conversation a bien eu lieu, authentifiée par Timochenko, sauf une phrase, soi-disant ayant fait l'objet d'un montage.
La voici :
(Nota : les passages en gras et soulignés l'ont été de mon fait)

Nestor Shufrych : "Concernant tout ce dossier criméen, je te le dis, je suis juste sous le choc. Je parlais à une de nos connaissances aujourd'hui, et il était en larmes. J'ai demandé, qu'est ce que nous allons faire maintenant ?
Ioulia Timochenko : Je suis prête à m'emparer d'une mitrailleuse et tirer une balle dans la tête de ses fils de p****
N. S. : Je lui ait parlé hier, si un conflit armé éclatait moi et mon frère ainé, en tant qu'officiers de réserve, nous prendrons nos armes et irons défendre notre pays.
I.T : Cela dépasse vraiment toutes les limites. Il est temps de prendre nos armes et d'aller tuer ces maudits russes ainsi que leur leader. (N.S. manifeste son accord). Je regrette de ne pas être la actuellement et de n'avoir pas été en charge du processus. Il n'y aurait eu aucune putain de manière pour qu'ils obtiennent la Crimée.
N.S : J'y pensais également en réalité. Si tu avais été là cela ne serait pas arrivé. Mais de toute manière, nous n'avions aucune force potentielle. Tu sais, la chose la plus offensante c'était ça.
I.T : J'aurais trouvé un moyen de tuer ces connards. J'espère que je serai capable de d'impliquer toutes mes relations. Et j'utiliserai tous mes moyens pour faire se soulever le monde entier afin qu'il n'y ait même plus un champ brulé en Russie.
N.S : Bon, je suis plus que ton simple allié ici. Aujourd'hui, nous avons eu une rencontre entre leaders des factions (parlementaires) dans la matinée, après laquelle j'ai parlé à Viktor (probablement Tourchinov). Il a demandé : "Que devrions nous faire maintenant avec les 8 millions de russes qui sont restés en Ukraine ? Ce sont des parias !"
I.T : Ils doivent être détruits avec des armes nucléaires (c'est la seule phrase contestée par Timochenko)
N.S : Je ne vais pas te contredire ici, parce que ce qui s'est passé est  absolument inacceptable. Mais il y a une autre option, certaines de leurs actions violent clairement le droit et nous avons à prendre des mesures à un niveau international.
I.T : Nous allons porter cela devant la Cour Pénale Internationale de La Haye."

Chacun pourra apprécier le langage fleuri et de paix de la blonde Timochenko, et sa volonté de contribuer à un règlement pacifique de la crise. La double crise en fait. Celle de la Crimée, dorénavant ayant rejoint la Russie, et celle de l'avenir de l'Ukraine, de la capacité de faire cohabiter dans un même pays des populations revendiquant des identités différentes.
La solution, et c'est vrai qu'elle est pratique, efficace et durable, même si elle apparait quand même un peu irréaliste, du moins peu réalisable, pour être davantage précis, pour la gentille Ioulia, du moins considérée comme telle par ceux qui nous gouvernent, quelle sagacité!, consiste en l'élimination physique de tout ce qui gêne.
En ben dis donc! On n'est pas sorti du merdier avec des gens comme ça, hein!

Afin toutefois d'être juste, je reviens sur cette phrase contestée pat Timochenko : Ils (les 8 millions de Russes vivant en Ukraine, des parias selon le président Ukrainien Tourchinov, accessoirement un des fidèles de Timochenko) doivent être détruits avec des armes nucléaires.
Elle affirme avoir dit : " les Russes en Ukraine, ce sont des Ukrainiens."
D'une part ça sonne assez mal avec la tonalité général de la conversation, et ça concorde peu avec "Il est temps de prendre nos armes et d'aller tuer ces maudits russes ainsi que leur leader.", propos tenu juste avant. La réponse du député s'accorde également mieux avec la phrase qu'elle réfute.
D'autre part, les Russes d'Ukraine demandent justement à conserver leurs particularités, notamment leur langue. Et donc si la phrase alléguée par Timochenko est exacte, ce dont je doute, elle n'irait pas non plus dans le sens d'une résolution du problème.

Voilà donc où on en est. Entre une Timochenko, pas encore aux affaires, mais tirant encore beaucoup de ficelles, qui veut tuer tout le monde, et un président considérant les Russes d'Ukraine comme des parias, nous voilà persuadés que les occidentaux, l'UE, la France, ont choisi le bon cheval, celui capable d'instaurer une ère de paix durable dans la région. Et évidemment ne parlons pas de ceux évoqués dans le précédent billet sur le sujet et qui doivent sans doute applaudir aux propos de Timochenko. Si on voulait déclencher un conflit, on ne ferait sans doute pas mieux.


samedi 22 mars 2014

De Vichy à Berlin-Est






La France voyage dans le temps et l'espace, juste par la volonté des politiques et des journalistes.
Il y a deux ans nous étions à Vichy en 1941, aujourd'hui nous sommes à Berlin-Est en 1980. Nous sommes passés de la gouvernance de Sarkotain à celle de Hollandecker. Tout ça grâce à la magie du verbe.
Et ça me rappelle quelques souvenirs. Car si je n'ai jamais mis les pieds à Vichy, je suis allé deux fois à Berlin-Est (et Ouest). C'était il y a longtemps évidemment, avant même la première alternance, à une époque où on n'imaginait pas qu'un jour ce mur pourrait tomber, seulement une dizaine d'années plus tard. Berlin-Est c'était vraiment un autre monde. Berlin-Ouest aussi d'ailleurs qui paraissait un monde artificiel où une vie nocturne débridée semblait devoir faire oublier que cette ville était encerclée et serait la première à tomber au cas où…  Ça n'a pas eu lieu  et je ne suis jamais retourné à Berlin pour vérifier si on n'y faisait toujours autant la fête et si ça c'était propagé à l'est. J'en doute un peu, du fait de la normalisation de la situation. A l'est c'était austère. L'atmosphère était glauque et pesante. D'autant plus pesante qu'on se savait et sentait suivi. Parce qu'à l'époque on n'y allait pas en touriste. On passait le mur à check-Point-Charlie en uniforme, le statut de la ville qui était considérée comme occupée permettant de passer  du secteur occidental  au secteur oriental uniquement de cette façon.

Du coup j'en viendrais presque à comprendre ceux qui se sont émus de la comparaison faite par Nicolas Sarkozy dans sa lettre aux Français. Enfin je comprendrais si ceux qui geignent aujourd'hui n'avaient pas été ceux qui comparaient l'ancien président à un dictateur, tantôt à Hitler (jeunesses socialistes, nos komsomols à nous), tantôt à Pétain et voyaient la France de retour aux heures les plus sombres de notre histoire, selon l'expression aussi usée que consacrée. Ben oui, aux excès de langage des uns répondent forcément les excès de langage des autres. Vichy à la droite, la RDA et sa fameuse Stasi à la gauche! Pas de jaloux! Mais néanmoins émotion asymétrique. Car je ne me souviens pas qu'on se soit autant formalisé quand Sarkozy était comparé à Pétain et la France à Vichy. Cette asymétrie est inquiétante, car elle tendrait à aller dans le sens de l'ancien président. Dans la France de Hollande on ne pourrait donc pas manier l'outrance comme dans la France de Sarkozy sans être cloué au pilori. N'est-ce pas là le signe d'un durcissement du régime? D'autant plus que le président lui-même, renonçant à des principes, il faut dire déjà violés auparavant, comme tant d'autres, intervient depuis l'étranger pour s'indigner en direct des propos de son prédécesseur. Et peut-être successeur.

C'est sans doute à cette potentialité, celle de successeur, qu'il faut s'attacher pour comprendre les réactions outragées de nos élites, non, ne riez pas, de gauche et de leurs alliés qu'on trouvera en nombre dans les salles de presse ou les tribunaux. Car si Sarkozy n'était pas le successeur potentiel de notre gros, il y a fort à parier que ses propos seraient simplement ignorés, traités avec le mépris qui accompagne souvent ceux qui ont leur avenir derrière eux. Et sans doute aussi, ne ferait-il pas l'objet d'une telle campagne de dénigrement allant au-delà de l'inouï alors que jusqu'à présent aucun juge n'a pu l'épingler, qu'il n'est mis en examen dans aucune affaire et que son casier judiciaire est d'une virginité mariale. On comparera avec Chirac qui rattrapé par les affaires, condamné, a bénéficié d'un traitement politico-médiatique bien sympathique. Mais on savait qu'on ne le reverrait pas.
Comment donc dans ces conditions qualifier un régime traitant de cette manière un adversaire potentiel en mobilisant des moyens qu'on voudrait voir mis en place dans des affaires de grand banditisme? Comment qualifier un système où un opposant est mis sur écoutes, non pas sur la base d'indices, mais pour trouver justement des indices? Comment qualifier un régime dont les ministres nient l'évidence, se permettant même pour l'une d'entre-elle d'exhiber pour prouver sa bonne foi des pièces qui prouvent exactement l'inverse de ce qu'elle dit, quand on leur demande leur place dans ce système d'écoutes? Comment qualifier un régime dont les membres du gouvernement condamnent un opposant avant qu'il ne soit jugé, sans même savoir s'il le sera, en se basant sur des comptes rendus d'écoute parus illégalement dans la presse sans que cela leur pose problème tandis qu'ils ne cessent de parler de justice indépendante? Comment qualifier un régime dont un ministre dans un lapsus révélateur dit "on va s'occuper de lui" avant de se reprendre et dire "enfin la justice…"? Comment qualifier un régime où le chef de l'Etat déclare à des députés de sa majorité "ne vous inquiétez pas, je le surveille, je sais exactement ce qu'il fait" parlant de celui qu'il considère comme son ennemi le plus dangereux, après le cholestérol?  On n'en est peut-être pas à pouvoir parler de gestapo, de Stasi ou de KGB. Mais on ne peut pas vraiment parler de régime exemplaire en termes de démocratie.
Je serai rassuré quand les auteurs des fuites vers Médiapart seront identifiés. Cela devrait être facile car comme il n'y a pas eu de mise en examen et qu'il n'y a pas de partie civile, et surtout comme personne, ils l'ont juré, n'est au courant du contenu de ces écoutes, l'enquête devrait se focaliser sur très peu de gens, en fait juste les policiers chargés des écoutes et les juges qui ont requis ces écoutes. Pour les policiers il suffit de reprendre les PV d'écoute où figure ce qui a fuité. Si ça concerne plusieurs policiers, on sera peut-être tenté d'aller voir du côté des juges. A moins que… Cela dit je ne me fais aucune illusion. Et mes doutes quant à l'honnêteté de ce régime seront une nouvelle fois confirmés.

Mais éloignons nous de l'affaire des écoutes de l'ancien président pour voir si nous pouvons trouver d'autres traces allant dans le sens des accusations proférée dans sa lettre aux Français.
Tiens au hasard, le traitement de la manif pour tous. Combien de gens embarqués, mis en garde à vue lors des différentes manifestations et événements ponctuant ce mouvement de contestation? Et pour combien au final de mises en examen et de condamnations? On a vu des gens embarqués uniquement pour port de T-shirt, tandis que des jeunes qui écoutaient tranquillement des textes étaient embarqués sans ménagement pour une garde à vue excédant souvent 24 heures. Police politique? On a vu la police moins "hardie" lors des émeutes du Trocadéro et au préfet de police, aussi inefficace qu'il est aux ordres, on pourrait rappeler cette devise : "à vaincre sans péril on triomphe sans gloire."
On se souviendra aussi de cette jeune fille en quête de la nationalité française et soumise au chantage de policiers. Elle devait faire la taupe contre une carte d'identité. Combien comme elle ont-ils fait l'objet de pressions de ce type et n'ont pas eu le courage de cette fille qui a révélé ces procédés immondes? Une enquête a été ouverte. Tout le monde a déjà oublié.
Encore au hasard. Lors de la manifestation assez hétéroclite du moins de janvier qui rassemblait des mécontents de toute sorte de ce gouvernement, dont certains effectivement peu fréquentables, il y a eu 250 interpellations. Pour aucune vitrine brisée, pour aucune voiture brulée. En fait on ne sait guère pourquoi. A Nantes, alors que le centre-ville a été mis à sac, juste 6 interpellations. Curieux, non?
Plus près de nous. Numéricable choisi par SFR pour être racheté. Ce n'est pas le choix du gouvernement. Mais après tout on s'en fout, non? On n'est pas en économie dirigée comme en RDA, après tout. Oui, mais bon… quand même… Allez hop, un contrôle fiscal pour le racheteur.

Cherchez bien et vous verrez que le quotidien est ponctué de ce genre de "petites" affaires, du moins de celles qui parviennent à émerger et à être portées à la connaissance du public. Leur cumul donne une certaine idée de la manière dont fonctionne notre régime si moral, si irréprochable.
Ce n'est peut-être pas la RDA et les méthodes de la Stasi, du moins pas toutes les méthodes. Mais au final ce n'est pas très joli.


mardi 18 mars 2014

La Crimée redevient russe. Informations et désinformations











Le référendum organisé dimanche en Crimée et portant sur le rattachement de la péninsule à la Russie vient de trouver sa traduction dans la signature par le président Poutine d'un décret confirmant ce rattachement. Il ne reste plus à la Douma qu'à entériner ce décret, ce qui se fera très prochainement.

Le traitement de ces affaires par les chancelleries, par les médias, est assez stupéfiant  L'invocation douteuse du droit international de la part des occidentaux accompagné d'informations tendancieuses ou parfois très incomplètes des médias ont jalonné les péripéties d'une affaire commencée il y a plusieurs mois déjà lorsque le président Ukrainien Ianoukovitch revenant sur ses intentions repoussait la signature du traité d'association entre l'union Européenne et son pays.

On ne va pas reprendre l'affaire dans ses détails, 3 précédents billets ayant, je l'espère, suffisamment dégrossi cette situation. On s'arrêtera donc à quelques éléments portant sur la qualité et la pertinence des arguments mis en avant pour expliquer que ce dénouement était illégal, et sur la qualité de l'information proposé par les médias pour éclairer sur la situation ukrainienne.

Commençons par ce dernier point. S'i c'était agi de l'instruction d'un procès on pourrait déclarer sans se tromper que cette dernière a été menée essentiellement à charge, voire exclusivement s'agissant de certains médias français.
Prenons un exemple, sans grande conséquence. Il y a deux week-ends de cela nos médias parlaient d'une manifestation se déroulant à Moscou d'opposants à la présence russe en Crimée. Certes elle a eu lieu. Mais dans le même temps se déroulait une manifestation de soutien de soutien à la politique russe mobilisant énormément plus de monde. Celle-ci a été purement passée sous silence ou presque. Le week-end dernier, une manifestation d'opposants au rattachement de la Crimée à la Russie avait lieu dans cette même ville. Et là nos médias, relayant l'AFP, réussissent le tour de force à trouver davantage de manifestants que les organisateurs eux-mêmes. Et pas seulement quelques centaines, la différence étant de 20000. On connaissait les divergences entre la policier et les organisateurs concernant les comptages, les écarts ressemblant étrangement en  termes d'ordre de grandeur à ceux qu'on observe en France, mais on n'avait jamais encore vu des journalistes trouvant davantage de manifestants que les organisateurs. J'en déduis qu'ils ont compté les pieds et ont oublié de diviser par deux ensuite. Nous savons désormais que chaque mensonge quand il vient d'un bord n'en est plus un et que des apparences défavorables peuvent s'expliquer aisément.
Mais de cela à la limite on pourrait se contenter de rigoler, les conséquences n'étant pas dramatiques.
Ce qui est plus grave, beaucoup plus grave, c'est la manière dont a été traité la fameuse, mais peut-être pas tant que cela puisqu'il il fallait saisir l'information, donc la fameuse conversation téléphonique piratée entre l'admirable lady Ashton et le premier ministre estonien qui faisait part de doutes sérieux sur l'origine des tirs ayant couté la vie à de nombreux manifestants sur la place de l'Indépendance à Kiev. Quelques journaux allemands et britanniques ont développé le sujet. La presse française, et pas toute, loin de là, s'est contenté de l'évoquer dans quelques entrefilets. Pourtant ça, ça mérite une vraie enquête. Une enquête sur les faits et une enquête pour comprendre pourquoi une enquête officielle n'a pas été ouverte, et par les nouvelles autorités locales, et par la fameuse communauté internationale. Des esprits malveillants pourraient y voir la volonté de masquer certains faits qui pourraient remettre en cause une politique américano-européenne reposant sur la reconnaissance d'un gouvernement dont la seule légitimité aurait été d'avoir renversé un dictateur sanguinaire et corrompu.
Tiens, au fait puisqu'on parle de dictateur sanguinaire et corrompu, comment se fait-il que nos journalistes ne se soient pas posé cette question pourtant simple : pourquoi jusqu'à la veille de la signature avortée du traité d'association Ianoukovitch était-il encore un interlocuteur respectable, tandis que le lendemain il était justifié de demander son départ parce qu'il ne l'était pas? Remarquez cette question pourrait être posée régulièrement. Ben Ali, Kadhafi, Moubarak, El Assad, Saddam Hussein, et bien d'autres encore pourraient être l'objet de cette question. Cette question à laquelle on nous répond sans cesse avec des arguments "moraux" qui ne montrent que mieux l'amoralité de ceux qui les utilisent. C'est à peine un reproche, si on se réfère à la seule règle qui vaille en politique étrangère et qui est que les Etats ont le devoir d'agir selon leurs intérêts. C'est juste le constat d'une hypocrisie s'expliquant par certaines évolutions qui veulent que désormais, on justifie ses actions au nom du bien et du mal. Tu parles! Le grand problème de ce type de démarche est qu'il induit forcément de la désinformation ou de la mal-information. On transforme certaines données ou on les exagère et on en oublie d'autres volontairement. Et l'Ukraine est dans ce domaine un cas d'école. Le citoyen de base s'il veut se faire une idée honnête de la situation doit aller voir ce que dit l'autre côté (ne parlons pas d'adversaire), tout en étant conscient que l'information qu'il recueillera ne sera sans doute pas davantage objective, doit replonger dans ses livres d'histoire, dans des traités de géopolitique, car souvent les situations présentes sont la conséquence d'épisodes parfois anciens, dans les événements récents,… Parfois, c'est une aubaine, certains de nos journaux, mais pas tous, ouvrent leurs colonnes à des paroles "dissidentes", du moins contraires ou nuancées par rapport à la parole officielle que ne font guère autre chose que colporter les médias. En fait c'est quasiment un vrai boulot qui consiste à faire ce que ne font pas ceux qui devraient le faire. On comprendra alors que le temps, l'envie, les compétences sont des variables qui jouent en faveur de la version officielle. Quoique dans l'affaire ukrainienne, il semble que ce soit moins le cas, bien moins en tout cas que lors de la guerre dans les Balkans où peu de voix s'élevaient pour défendre les Serbes. La raison en est peut-être une défiance accrue vis-à-vis de l'Union Européenne et le refus d'une part de voir l'Europe encore s'élargir à des pays qui ne remplissent pas les conditions, et d'autre part, de devoir payer, à fonds perdus, pour un pays bien éloigné. C'est du moins ce que révèle un sondage récent sur les opinions publiques allemande et française sur ces sujets de l'élargissement et de l'aide financière à l'Ukraine. Peut-être qu'en période de crise, quand on nous invite à nous serrer la ceinture parce que les caisses sont vides, les justifications de la politique étrangère par le bien et le mal ne rencontrent plus guère d'écho dès lors que la conduite de cette-ci induit un coût financier supplémentaire et donc de nouvelles restrictions.
Mais de cela j'imagine que les gouvernements et encore plus la commission de Bruxelles n'en ont cure. Surtout quand c'est Obama qui dicte les conduites. Tout cela ne peut qu'encourager à forcer le trait pour justifier ces sacrifices. Le méchant doit être encore plus méchant et heureusement que les gentils, la communauté internationale autoproclamée, en fait la communauté fidèle aux Etats-Unis, sont là pour l'empêcher de nuire. Sauf que cette fois c'est loupé.

Ça n'aura pas été faute d'essayer. Les arguments se parant du droit international, je vais y revenir, n'auront eu aucun effet. Pas plus que des sanctions dont le caractère dérisoire, la prééminence des intérêts sur le "bien" défendu ne pouvant guère être laissée de côté, constituerait presque un encouragement à aller plus loin, en tout cas à ne pas céder sur l'essentiel de la part du prétendu camp du mal. C'est pathétique!
A ces gens-là il ne reste que la parole, plutôt la parlote, que même les moulinets de bras ne rendent pas crédible. Et en plus leurs arguments sont d'une telle faiblesse qu'on se demande pourquoi ils tiennent autant à se ridiculiser.
On leur dit droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, ils répondent intangibilité des frontières. Alors on leur réplique Kosovo. Et là ils ne savent que dire "mais c'est pas pareil!". Effectivement c'est pas pareil, c'est pire. Regardez une carte du Kosovo dans l'Europe, sa taille, ses accès maritimes qu'il n'a pas, sa population, ses infrastructures, ses richesses naturelles, le niveau de développement des services, corrélez-à ça à l'envie qu'on pourrait avoir d'investir dans ce pays, et tout de suite on voit que cet Etat n'est pas viable. Pourtant ils l'ont reconnu au nom du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Les Russes, Poutine déjà, étaient contre. Et de déclarer avec la rudesse du ton qui peut être la sienne, mais au moins on comprend ce qu'il dit, que "ça vous reviendra dans la gueule". Et c'est aujourd'hui que ça se passe. Boum!
On pourrait continuer ainsi. Mais là je préfère vous mettre en référence un papier de Jacques Sapir dans le Figaro qui expliquera ça mieux que moi. Néanmoins pour tous ceux à qui ça donnerait des boutons d'aller jeter un œil sur le site de ce journal, je résume:
1. La Crimée était russe depuis près de 3 siècles quand elle a été "offerte" par Khrouchtchev à l'Ukraine (soviétique) sans demander l'avis aux populations.
2. Le gouvernement ukrainien étant le produit d'une révolution et celui-ci ayant dissous la cour constitutionnelle, il n'est pas justifié de se référer à une constitution n'existant plus de fait et de juger des actes inconstitutionnels dans la mesure où le seul organe qui pourrait le faire n'existe plus.
3. Le gouvernement reconnu par les occidentaux ne représente pas la nation ukrainienne mais simplement une partie de cette nation. En conséquence l'Assemblée de Crimée était fondée à ne pas reconnaitre ce gouvernement autoproclamé et à faire valoir le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes aux dépens de l'intangibilité des frontières, argument qui aurait été recevable dans une situation normalisée. De fait la reconnaissance de ce gouvernement par les occidentaux ouvrait la porte à la séparation.
4. Les doutes sur le bon déroulement du référendum auraient pu être levés ou confirmés par la présence d'observateurs. Or l'OSCE a refusé d'en envoyer. Si doute il y a il doit donc profiter aux autorités de Crimée, les occidentaux s'étant abstenus. Quelques parlementaires européens ont assisté aux opérations de vote, de façon volontaire, et n'ont rien trouvé de scandaleux.
5. Des pays comme la France qui a ignoré le résultat du référendum de 2005 ou qui a accepté par le passé un référendum sur Mayotte rattachant cette île à la France, contre une résolution de l'ONU, sont mal placés pour se référer au droit quand il s'agit de la Crimée.
6. Il faut désormais accepter le fait que la Crimée est redevenue russe. La sortie de crise, surtout l'évitement d'une guerre civile dans l'est de l'Ukraine, ne peut passer que par une pression conjointe des occidentaux et des Russes sur les autorités en place à Kiev pour qu'elles constituent un gouvernement d'union nationale avec donc toutes les parties et désarment les groupes extrémistes avant d'engager l'élection d'une assemblée constituante. La signature d'un accord international avec le gouvernement actuel irait contre le droit.

Je ne crois pas en la sagesse des européens qui veulent signer vendredi prochain ce fameux traité qui a mis le feu aux poudre avec ce gouvernement illégitime et qui s'est constitué en enfreignant les accords signés la veille entre les représentants de l'UE, le gouvernement élu de l'Ukraine et les représentants de l'opposition armée. Cet accord qui comporte un volet sécuritaire (intégrant de fait l'Ukraine dans l'OTAN) n'est pas davantage acceptable par les Russes aujourd'hui qu'il y a 4 moins. Soit ils n'ont rien appris, soit ils veulent poursuivre une confrontation qui ne leur rapportera rien, bien au contraire. Ils mènent un combat qui n'est pas le leur.

Bonus : une histoire simplifiée mais néanmoins éclairante de l'Ukraine.

 


mercredi 12 mars 2014

Pas d'inquiétude chers Français !






"Ne vous inquiétez pas, je le surveille. Je sais exactement ce qu'il fait."

Ces paroles tenues par notre mal-aimé mais néanmoins glorieux président que les menaces djihadistes n'ont même pas incité à renoncer à ses escapades nocturnes et amoureuses en scooter, mais sans doute celui-ci comme le casque sont-ils blindés, donc ces paroles furent tenues il y a quelques jours devant un parterre de jeunes députés du parti majoritaire. Au passage on avait cru comprendre lors de ce pénible exercice de l'anaphore de l'entre-deux tours que ces pratiques étaient désormais révolues. Ce ne semble pas être le cas. Mais il doit bien y avoir une bonne raison à cela. Un tel homme ne saurait se parjurer. Personne à gauche ne le pourrait d'ailleurs, sinon où irions-nous dès lorsque le camp de la morale commencerait à renoncer à ses principes.
Les douces paroles présidentielles si agréables aux oreilles de nos jeunes parlementaires de gauche, la pépinière d'où sortira dans 10 ou 20 ans la relève des Ayrault (fatigués), des Ségo (indispensable mais dont personne ne veut), des Taubira (sans T à la fin du nom bien qu'elle le méritât), etc., étaient faites pour rassurer. Et sans doute pour être répétées, propagées à l'envi, pour que le peuple français sache au moins qu'à la tête de l'Etat, se trouvait un individu, placé par leurs soins, enfin pas de tous, qui s'occupait d'eux, qui savait quelles étaient leurs préoccupations majeures et qui donc œuvrait pour leur bien, pour le bien commun, pour la France.

Car oui avoir un président qui surveille le taux de chômage et comprend son évolution, ça rassure. A moins que ce ne soit le taux de délinquance. Ou bien encore le taux d'endettement. Ou le pouvoir d'achat des retraités par exemple puisque c'est d'actualité. Mais ça aurait pu être le réchauffement climatique, pour faire plaisir aux alliés verts, ou le taux d'immigration, ou le classement PISA. Que sais-je? Mais peut-être que plus prosaïquement c'était le niveau d'essence dans le réservoir du scooter ou encore le lait sur le feu désormais que bobonne n'est plus là pour surveiller.

Eh bien non! Rien de tout cela! C'est LE Sarkozy qu'il surveille avec autant d'attention. Dans un sens ça s'explique. Car notre président malgré son air naturellement niais est suffisamment intelligent pour avoir compris que ce n'était pas pour lui qu'on avait voté mais contre Sarkozy. Et donc, en conséquence, il a dû comprendre ou plutôt imaginer que la grande, la très grande préoccupation des Français, était que celui-ci ne revienne pas. Il agit donc en conséquence. En surveillant les paroles et les actes de celui dont les Français, du moins le pense-t-il, ne veulent plus.
Certes des gens exigeants diront que s'il surveillait davantage, à l'exception du niveau d'essence dans le scooter et du lait sur le feu, tous les points qui viennent d'être évoqués, que s'il parvenait à faire diminuer sensiblement le taux de chômage, le taux de délinquance, le taux d'endettement, le taux d'ozone, que s'il parvenait à faire progresser le pouvoir d'achat des Français et pas seulement celui de ses camarades de la promotion Voltaire (ce dont Villepin est de dernier bénéficiaire en date – qui donc après cela osera parler de clivage gauche/droite?), que s'il parvenait à maitriser l'immigration, etc., personne ne penserait une seconde que Sarkozy pourrait revenir. Mais il faut convenir que pour des gens de gauche, ça relève d'un niveau d'exigence trop élevé, bien trop élevé, et que donc il vaut mieux, d'autant plus qu'on dispose non seulement de moyens pour cela, mais aussi d'alliés déterminés en la personne de certains juges, notamment ceux qui pendant leurs loisirs aiment à bâtir des murs disons inattendus dans le cadre de la déontologie qui va avec leur charge, s'attacher à mettre hors d'état de nuire, façon de parler, celui dont on craint le retour.

Certains en me lisant diront que j'exagère, que ma propension à la médisance et à la critique irraisonnée de ce gouvernement me poussent à déformer les faits. Les mêmes diront que les paroles présidentielles adressées aux jeunes pousses socialistes étaient tout à fait anodines et que la surveillance évoquée se concrétisait uniquement en fait dans la lecture quotidienne du Monde, du Nouvel Obs et de Libé, journaux toujours à l'affut de ce qui se passe à droite pour le dénoncer parce que forcément c'est mal ce qui se passe à droite. Le bien et la morale ne se partagent pas. Non mais!
Oui ce ne peut être que ça. D'ailleurs notre fringant ministre de l'intérieur, vous savez ce poste dont on dit que le titulaire est l'homme le mieux informé de France, nous le démontre en affirmant que les écoutes touchant un ancien et récent président de la République et son avocat, eh bien il en a été informé comme tous les Français, en même temps qu'eux, en feuilletant le Monde, à l'Assemblée Nationale sans doute. Car ils sont ainsi à gauche. Même quand ils pourraient savoir, et bien ils ne veulent pas. Que leurs services montent des écoutes contre un ancien président, ça ne les concerne pas. Ils ne veulent pas en entendre parler et les différents chefs de services, petits ou grands, conscients de cette immense probité qui caractérise leur ministre de tutelle, se gardent bien de l'en informer. Sans doute cela leur vaudrait-il d'ailleurs un renvoi immédiat. On ne badine pas avec l'honnêteté et avec la morale quand on est de gauche.
Le pire, et c'est un comble, c'est que ces grands principes peuvent leur attirer des ennuis. Regardez cette pauvre Christiane Taubira! Pendant des mois on la laisse dans l'ignorance, ce qui est parfaitement normal parait-il, jusqu'à ce qu'un procureur malveillant, sans doute de droite, lui donne une information, une information anodine puisqu'il ne s'agit que de lui faire savoir que l'ancien président de la République est sous écoute depuis 11 mois avec la bénédiction du Parquet placé sous sa dépendance hiérarchique. Et bien cette information parfaitement anodine, mais qu'elle ne devrait pas connaitre la jette dans des transes qui la conduisent à un déni de réalité. Ce qu'elle a entendu, elle ne l'a pas entendu. Et c'est en toute sincérité que s'adressant à des millions de Français par le biais de la lucarne magique, elle déclare qu'elle n'était pas davantage au courant que le pékin de base qui se trouve de l'autre côté de la vitre. Freud, au secours! En fait ce ne fut pas Freud, mais Ayrault qui arriva à la rescousse pour donner une version plus crédible, enfin un peu moins farfelue. On fait ce qu'on peut en socialie, et on peut peu. Du coup Christiane a retrouvé partiellement au moins la mémoire, toutefois assez pour affirmer qu'elle aura mis à peu près une semaine pour avertir le président de la République, ce que confirme Ayrault qui bien qu'ayant rencontré plusieurs fois le grand homme pendant cette période et même déjeuné avec lui, avait complètement oublié de lui parler de ça. A moins qu'il ait jugé que le principe de séparation des pouvoirs ne lui permettait pas de le faire. Voilà c'est ça, c'était pour protéger le président. Quelle chance il a d'être si bien entouré. Et quelle chance nous avons d'avoir un tel président entouré d'une telle équipe!

Voilà chers Français, vous pouvez être rassurés. On s'occupe bien de vous en haut lieu. Et même si les apparences semblent indiquer le contraire, dites-vous bien que ce ne sont que des maladresses dues à un excès de probité, exploitées misérablement par une droite machiavélique, qui vous le font croire. Car jamais on n'aura vu équipe si performante à la tête de l'Etat. Vous ne vous y trompez d'ailleurs pas quand vous vous exprimez par voie de sondage. Et vous ne vous y tromperez pas dans quelques jours quand vous déposerez votre bulletin dans les urnes.