"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

lundi 26 mars 2012

Equations


L'épopée minable de Mohamed Merah ne semble pas vouloir quitter la campagne présidentielle. Comme évoquée dans un précédent billet, elle a donné lieu à un certain nombre de polémiques, essentiellement sur l'efficacité du renseignement intérieur en France, et de la manière de travailler d'une unité d'élite de la police nationale. Tout ceci ayant permis relativement efficacement de s'attaquer au problème de fond, à savoir comment produit-on un Merah en France?
 
Et bien évidemment, comme d'habitude, c'est le front national qui s'y colle, les autres partis, soit par un angélisme parfois suspect, soit par peur d'aborder un sujet devenu tabou, soit pour des raisons électoralistes, ces différentes raisons pouvant à l'occasion se compléter, évitant soigneusement la question au cri de "ne faisons pas d'amalgames, évitons de stigmatiser une communauté!".
C'est donc du côté de Marine Le Pen que les Français inquiets de l'attitude de certains musulmans en France doivent se retourner puisque c'est la seule à oser aborder publiquement le problème. Du côté de l'UMP, on est loin en effet du discours de Grenoble qui avait ému nos bonnes âmes plus promptes à critiquer une société xénophobe ou raciste ne laissant guère de choix à de pauvres jeunes n'étant pas en mesure de s'intégrer parce qu'on les en empêche, et une police au service des penchants les plus inavouables de cette société. Le spectre des "heures les plus sombres de notre histoire" planait de nouveau sur la France. Ce discours de Grenoble avait suggéré un lien fort entre immigration et délinquance. Lien repris ici ou là avec parfois des conséquences judiciaires pour les malheureux lucides comme Eric Zemmour condamné pour avoir fait un simple constat sur la population carcérale pourtant ignoré par personne. Et puis silence radio. La pression des bonnes âmes avait finit par triompher.
 
Et c'est donc Marine Le Pen qui rouvre le débat en rajoutant un nouveau terme à l'équation, en faisant le lien entre l'immigration, l'islam, la délinquance et le terrorisme. D'un certain côté, on peut admettre qu'elle a de quoi alimenter sa thèse. Un tour d'horizon des attentats terroristes commis en France depuis une trentaine d'années et plus, ou encore en Europe, nous éloigne du spectre de l'extrême-droite pour nous rapprocher de celui de l'islamisme. Et aussi, quand on observe le cas Merah, on réunit avec ce garçon tous les termes de l'équation. Dès lors, on peut, si on veut, critiquer les propos de Marine Le Pen, mais on ne peut pas nier la légitimité de la problématique qu'elle soulève.
Si nous reprenons les propos qu'elle tient à Nantes à savoir : "Ce qui s'est passé n'est pas l'affaire de la folie d'un homme, ce qui s'est passé est le début de l'avancée du fascisme vert dans notre pays" et "Combien de Mohamed Merah dans les bateaux, les avions, qui chaque jour arrivent en France remplis d'immigrés combien de Mohamed Merah parmi les enfants de ces immigrés non assimilés ?", on se trouve là face à de très légitimes questions.
Car, contrairement à ce que pensent les indignés de service, mais surtout indigents de la pensée, ou rongés par une idéologie, poser des questions n'est pas y répondre. Après évidemment on pourra si on veut dénoncer les arrière-pensées de la candidate du front national. Reste que ce sont les questions qu'il faudrait un fois pour toute prendre en compte et pas celle qui les pose. Cette stratégie qui empêche maintenant depuis 30 ans de s'exprimer sur l'immigration, sur la place de l'islam en France, sur le problème de l'intégration, sur la fin de l'assimilation, sur le communautarisme, autrement que par des discours laudatifs nous vantant selon le cas les mérites indépassables de la diversité ou du métissage, ne résiste plus à l'épreuve des faits. Les Français, ou du moins beaucoup de Français, et notamment ceux qui vivent les plus modestement et qui ne peuvent à cause de leurs moyens échapper à ces réalités qu'on nous somme de nier, ne supportent plus ces discours. Ils veulent qu'on dise la vérité, qu'on décrive leur quotidien, et qu'on prenne les mesures nécessaires pour sortir d'une situation devenue insoutenable pour eux. Les équations posées par le discours de Grenoble de Sarkozy et le discours de Nantes de Le Pen ne les effraient pas. Car souvent ils s'y retrouvent. Ils ont enfin franchi ce palier où, à la limite, ils avaient réussi à incorporer une certaine honte de leurs opinions concernant l'immigration et certaines populations issues de cultures ou civilisations différentes de la leur. Et désormais il faudra bien qu'on les entende. Il vaudra d'ailleurs mieux qu'on les entende, car ainsi que le prophétisait Michel Poniatowski dans la conclusion de son livre-testament il y a plus de 20 ans : "Nous allons vers des Saint-Barthélemy si l'immigration africaine n'est pas strictement contrôlée, limitée, réduite et expurgée de ses éléments négatifs et dangereux, si un effort d'intégration ne vient pas aussi compléter cette nécessaire répression."
 
Or des éléments négatifs et dangereux, il n'en manque pas. Quand on considère par exemple les succès des pages facebook ouvertes pour honorer la mémoire de Merah, on peut s'inquiéter. On peut supposer que des dizaines, des centaines d'individus, peut-être pas très dangereux pris individuellement, parce que non armés peut-être, parce que pas entrainés, parce que pleutres, mais en tout cas n'aimant pas la France dont pourtant ils n'hésitent pas à profiter de la prodigalité, sauraient dans certaines circonstances qui les sortiraient de leur isolement, se mettre au service de causes hostiles à la France. Les dernières émeutes de banlieues où on commence enfin à sortir de ses inhibitions pour tirer sur du "flic" en sont sans doute une illustration.
Quant aux autres, les non dangereux, les non négatifs, ils sont souvent la preuve de l'échec de politiques d'intégration qui de toutes façons ne peuvent plus aboutir, à cause du nombre, d'une part, à cause du refus de s'intégrer, d'autre part, ce dernier élément étant largement favorisé par ceux qui davantage même que relativistes prônent le respect de l'identité de ceux qui viennent d'autre civilisations ou cultures tout en interdisant aux Français de s'interroger sur leur propre identité. Le large vote des Tunisiens (plus de la moitié), parfois également français, aux élections législatives portant au pouvoir les islamistes dans un pays, certes dirigé auparavant par un dictateur, mais laïc, indique clairement qu'une large partie des populations musulmanes étrangères ou d'origine étrangère mais bénéficiant d'une double nationalité généreuse, pose tout de même la question de la possibilité d'intégrer ces populations dans leur totalité dans un pays européen, quel qu'il soit.
 
A moins que peut-être ce qui nous attend à terme ce soit ça :

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