"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

mercredi 7 juillet 2010

Variations sur l’affaire Bettencourt


Je n'avais pas envie de parler de l'affaire Bettencourt, mais comme l'actualité délaisse le reste pour se concentrer sur elle je vais y aller de mon petit couplet.
 
Tout d'abord en propos liminaires, je souhaite souligner que ceux qui ne cessent de dire que la presse est aux ordres auront trouvé avec cette affaire un démenti flagrant. Puisque toute cette affaire et ses rebondissements sont bien le fait de révélations journalistiques. Du moins certains organes de presse, en particulier le Point et Médiapart surtout, se sont-ils faits les relais complaisants de dénonciations et peut-être de rumeurs. Nous pouvons donc rendre grâce au gouvernement actuel de ne pas avoir entravé la liberté de la presse, ni d'avoir, par ailleurs, exercé des pressions sur des témoins éventuels. C'est tout de même rassurant de voir que les méthodes mitterrandiennes, dont les écoutes illégales, n'ont plus de place dans ce pays qui doit finalement louer la droite d'avoir restauré des libertés bafouées pendant la gouvernance socialiste.
 
Ce qui est assez étonnant dans cette affaire, ce sont les révélations successives, vraies ou fausses, faites par la presse. Comme si brutalement tous les gens ayant « servi » les Bettencourt avec fidélité pendant tant d'années, puis remerciés, mais avec quand même des indemnités confortables puisqu'il s'agirait juste de 400000 euros (soit une vie de travail d'un smicard) pour l'ex-comptable devenue bavarde, avaient décidé de se mettre à table. Tout cela à la suite d'enregistrements pirates destinées soi-disant à protéger son auteur des foudres d'un dénommé Banier heureux débiteur de Liliane Bettencourt.
Bon, pas de bol, sur les enregistrements il y avait certains propos susceptibles de remettre en cause la probité d'un de nos ministres comme par hasard chargé d'un des dossiers, sinon le dossier, les plus importants du moment et qui a fait sortir de leur torpeur estivale les forces de progrès, appelons-les ainsi. Ah comme le hasard peut être cruel. Et libérer la parole. Ce qui fait que de fil en aiguille, ce n'est pas seulement un ministre qui est attaqué, mais le Président de la République lui-même qui aurait bénéficié d'enveloppes de la part de la famille Bettencourt dont le chef, André, est décédé en novembre 2007. Nous voilà donc plongés dans une affaire d'Etat et accessoirement sur le serpent de mer du financement des partis politiques, cet aspect du problème ne calmant pas, comme on pourrait le croire, une opposition déchainée qui, en l'absence d'idées crédibles, ne peut guère compter que sur un discrédit de la majorité en place pour accéder au pouvoir.
Ces réactions outragées de l'opposition sont d'autant plus étonnantes que pour l'instant il n't a pas l'ombre d'une preuve tangible des accusations portées contre le ministre en question et son président. Certes la justice enquête, dans des conditions assez singulières puisque le fondement de l'enquête réside dans des enregistrements pirates qui doivent sans doute être aussi recevables que des écoutes illégales ou l'extorsion d'aveux sous la torture. Du moins faut-il l'espérer, sinon il faudra à l'avenir songer à faire sonder quotidiennement les pièces de vos logements pour y retrouver des micros suspects. La transparence a certes des vertus, mais il ne fait peut-être pas pousser trop loin. Donc tous ces cris et vociférations auraient pu attendre décemment qu'au moins une mise en examen, la présomption d'innocence étant copieusement bafouée dans ces cas-là, soit prononcée. D'autant plus que cette affaire pourrait avoir rapidement un profil de boomerang. Quand par exemple, on entend les propos hystériques de Ségolène Royal on ne peut s'empêcher de penser aux liens qu'elle entretient avec un autre milliardaire, fut-il de gauche. Et puis quand on a été ministre ou sous-ministre de Mitterrand, on pourrait avoir la décence de faire profil bas, car certains ont encore de la mémoire et pourraient évoquer cette fabuleuse époque qui ferait passer Sarkozy et ses sbires pour les enfants de chœur même si ce dont on les soupçonne s'avère être une réalité.
 
Puisqu'on évoque le sinistre fantôme de Mitterrand, je ne peux m'empêcher d'évoquer, juste pour éclairer celles et ceux trop distraits pour aller se renseigner par eux-mêmes, les liens qui unissaient ce dernier à la famille Bettencourt. On pourra même légitimement après cette évocation se poser la question de savoir si notre cher, couteux pour lever l'ambiguïté, et peu regretté président n'a pas de son côté effectivement touché quelques enveloppes. Car questions fermeté dans les convictions, André Bettencourt n'a rien à envier à son vieil ami François. Les deux seront liés par une amitié indéfectible marquée du sceau de la fourberie. Ils se connaissent de longue date ayant fréquenté tous deux la Cagoule dans la seconde moitié des années 30. C'est d'ailleurs dans ce mouvement qu'ils feront connaissance d'Eugène Schueller, fondateur de l'Oréal et principal financier du mouvement. Et c'est naturellement que ce petit monde rejoindra Vichy. Bettencourt sera un huat responsable de la propagande et fera preuve d'un antisémitisme zélé. Comme son ami François, sentant le vent tourner, il passera à la résistance en 1943. Tous deux en sortiront avec les honneurs, légion d'honneur, médaille de la Résistance… Leur statut leur sera d'ailleurs très utile pour sortir Eugène Schueller d'un très mauvais pas. Car ce dernier a eu moins de nez et a collaboré à fond. Menacé par les comités d'épuration il sera sauvé grâce au témoignage de nos deux compères. Schueller, pas ingrat pour deux sous, fera entrer Bettencourt au comité de direction de l'Oréal et donnera la direction des Editions du Rond-Point à Mitterrand avant que ce dernier n'abandonne ce poste pour entrer en politique. Bettencourt épousera la fille de Schueller, la fameuse Liliane dont on parle tant aujourd'hui. Entré également en politique il sera secrétaire d'Etat sous Mendes-France et ministre sous de Gaulle, mais restera toujours un grand ami de Mitterrand au point qu'en 1986, à l'occasion de la première cohabitation il est pressenti un moment pour être premier ministre de l'infâme.
C'était juste pour montrer que chez ces gens-là, monsieur, les amitiés sont variées.

1 commentaire:

  1. C'est pourtant Mitterrand qui écrira: rien ne vaut la mort d'un homme
    Marquer et rester grand dans ceux qui vous suivirent tient à peu de chose et la République dans les célébrations et symboles ne retient que le meilleur, le peuple doit y croire
    On y croit quand ça va bien, on devient haineux quand la traîtrise ,les desseins obscurs moralisent et pontifient des raclures de torchons journalistiques
    Mediapart aurait le droit de faire son job sans jeter en pâture dans un net qui ne demande qu'à flamber
    Mais est ce possible désormais, le sens critique la conscience politique sont des valeurs archéologiques
    Ainsi sait on le coût réel d'un appel à démission du gouvernement que l'on confond à loisir avec remaniement et que l'on traduit par le voeu de départ du Président aussi
    Coût en crédibilité européenne et internationale serait à considérer
    On remarque par ailleurs que Monsieur Mélanchon en son blog a un drôle de discours
    La Gauche traditionnelle serait elle ensuquée à ce point de ne pas voir ce qui se trame réellement à savoir les alliances forcées, rouges et vertes, orange peut être

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