"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

vendredi 23 juillet 2010

Indépendance du Kosovo hier. A qui le tour demain ?


La cour internationale de justice a rendu un jugement hier selon lequel l'indépendance autoproclamée du Kosovo en 2008 est conforme au droit international. Certes, ce jugement ne constitue qu'un avis. Mais à voir la ferveur dont a été accueilli par certains cet avis, notamment de la part des Etats-Unis, on peut redouter qu'il constitue une jurisprudence particulièrement dangereuse.
 
Il ne s'agit pas ici d'émettre un avis sur la pertinence de cette indépendance. D'autres solutions dont les arguments auraient été tout aussi recevables étaient effectivement possibles. La Serbie pouvait se réclamer de l'histoire pour maintenir le statu quo ante. Dans une configuration ethnico-religieuse, le Kosovo aurait pu également subir une partition avec un rattachement de sa partie à majorité serbe à la Serbie, et de l'autre à l'Albanie… Il est particulièrement regrettable que pendant les 9 années pendant lesquelles elle a exercé sa tutelle sur ce territoire, l'ONU ait été incapable de trouver un statut convenable à cette région et se soit trouvée ainsi que la communauté internationale face à un fait accompli.
On peut tout de même noter que c'est sans doute un fait unique dans l'histoire du monde depuis la fin de la guerre, de voir un territoire proclamer lui-même son indépendance, celle-ci étant fondée essentiellement sur des critères ethnico-religieux. Pour mémoire, les Albanais musulmans sont environ 2 millions, et les Serbes 120 000. Et l'indépendance est loin d'avoir régler le cas de ces derniers qui bien que faisant partie du Kosovo vivent de fait sous administration serbe.
On peut d'ailleurs se demander comment on a pu accepter l'indépendance d'un pays économiquement non viable. Un taux de chômage officiel de 50%, un PIB par habitant inférieur à 1000 $, tout cela favorisant une économie mafieuse, faisant de la région une plaque tournante de tous les trafics et une zone de forte criminalité, telles sont les principales caractéristiques de l'économie kosovare. Donc bien qu'indépendants, les kosovars sont condamnés à vivre sous perfusion. Leur premier employeur est d'ailleurs les Etats-Unis avec la base de Camp Bondsteel, point de contrôle de la région.
 
Tout ceci mis bout à bout, l'empressement avec lequel beaucoup d'Etats ont reconnu cette indépendance ainsi que ce jugement de la part de la CIJ peut paraitre au moins exagéré. D'autant plus que cette affaire va faire, a déjà fait d'ailleurs jurisprudence, et risque de malmener certains Etats, dont des Etats de l'Union Européenne.

Car cette indépendance, du moins la manière dont elle a été obtenue et proclamée et l'enthousiasme qu'elle a suscité ici ou là, risque bien de légitimer certains mouvements indépendantistes à travers le monde. Il est d'ailleurs significatif qu'en Europe les Etats n'ayant pas (encore) reconnu le Kosovo sont Chypre, l'Espagne, la Grèce, la Roumanie, et la Slovaquie, autant de pays qui ont a faire face à des mouvements indépendantistes ou qui sont confrontés à des problèmes de minorités. La facilité avec laquelle le Kosovo a obtenu sa reconnaissance de la part de nombreux pays ainsi qu'aujourd'hui ce jugement favorable rendu par la CIJ, ne risquent-elles pas de morceler l'Europe ? Et pourquoi pas demain aussi la Corse, la Bretagne et bientôt la Seine-Saint-Denis, cette dernière pouvant bientôt revendiquer une majorité africo-religieuse différente de celle de la France. Si c'est effectivement si facile, s'il n'est pas nécessaire que cette indépendance politique soit subordonnée à une possible indépendance économique, pourquoi pas ?
 
On peut d'ailleurs se demander pourquoi la communauté internationale se montre beaucoup plus réticente à reconnaitre les indépendances de l'Ossétie et de l'Abkhazie. Y aurait-il deux poids, deux mesures en fonction des intérêts de certains, de la nature des interlocuteurs ?
Quoiqu'il en soit on marche sur la corde raide.

3 commentaires:

  1. bonjour Expat
    Peut être continuer à barrer la Grande Serbie?
    Le Monténégro ayant ouvert le bal et les serbes ont paumé l'accés à la mer
    La France de tout temps est attachée à la Serbie et quand il a fallu abriter un temps les kosovars ça coinçait un peu intellectuellement

    Mais, oui, extraordinaire de se trier en Europe par ethnies religieuses de planter un drapeau et barka pour les minoritaires
    La où on a pas bien vu c'est cette transversalité albanaise délinquante qui semble remplacer Tito comme lien "économique" bizarre
    La charrue avant les boeufs parce qu'en UE on croit qu'en disant: bien venu quand vous serez saufs du crime et des alliances underground, avec un projet économique vaillant..elle a donc tout dit
    Je me demande jusqu'à quand les serbes vont rester benoîts

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  2. Bonjour Cimabue,
    c'est vrai que la Serbie a un inconvénient majeur. Celui d'avoir pour allié la Russie. Très vieille alliance d'ailleurs. C'est une chose qui ne pardonne pas. D'où l'intérêt de l'affaiblir. Mais le peut-on davantage désormais ?
    Toute cette période et ces événement dans les Balkans me laissent dubitatif. C'est clair qu'on nous a bourré le mou une fois de plus. Et facilement. Dans la mesure où les Serbes avaient la force (armée) pour eux, ils ne pouvaient être que les méchants. Et toc ! Alors que tout bien considéré, dans cette triste histoire, il n'y a personne, ni Croate, ni Bosniaque, ni Serbe, ni Kosovar qui pouvait se réclamer de la vertu et de la justice.

    Bientôt le Kosovo dans l'UE ? Sans doute. Obama y veillera. On ne peut pas systématiquement refuser les musulmans quand même. L'immigration collective de masse des jeunes kosovars (65% ont moins de 30 ans) sera ainsi légalisée. Qu'ont-ils à apporter ? Leur mafia, leur banditisme. Le banditisme grenoblois va encore changer de mains ? Peut-être.

    Nous avons un don particulier pour nous enfoncer nous-mêmes.

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  3. L'effondrement de la Russie et celui de la Yougoslavie ont un prix exorbitant que cette UE née sur un tas de charbon ne pourra exonérer tant politique et économique lui paraisse inconcevables de concert
    Ca tirera vers les émergents probablement pas plus doués politiquement mais sur une fraiche balançoire d'eldorado financier

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