"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

jeudi 1 novembre 2012

Indignations sélectives


Quand je lis certaines choses, dans la presse, dans les blogs, j'ai souvent l'impression de voir un troupeau d'autruches disposant pour diminuer le handicap de leur perception d'un périscope qui, hélas, ne serait orienté que d'un côté, côté droit je précise. Chez ces gens soit il n'y a rien à voir, donc rien à dire, sauf du bien, par principe, soit ce que leur périscope leur permet de voir est sujet d'indignation. Le bien d'un côté, le mal de l'autre, pas tant d'ailleurs en réalité en fonction de leur perception mais en fonction de qui est à l'origine de ce qu'ils voient. Histoire de camp, je suppose. D'ailleurs, il y a peu j'écoutais Badiou, l'ex-stalinien, l'ex-maoïste, l'ex-polpotiste, mais toujours communiste, expliquer clairement que ceux qui ne pensaient pas comme lui étaient ses ennemis. Pas adversaires politiques, mais ennemis. Ça a au moins le mérite d'être clair et tout compte fait on aimerait que tous aient cette franchise tant leurs comportements, tant leurs propos accréditent cette vision du combat politique. J'écoutais aussi très récemment une député socialiste invitée sur une émission sur France Culture et à qui on disait que la gauche au pouvoir était trop ancrée dans le présent, ignorant le passé et l'avenir, déclarer que c'était faux puisque cette gauche avait pour première priorité de détruire tout ce qu'avait fait la précédente majorité et donc était en prise directe avec le passé. La destruction comme programme en fait, ce qui nous ramène à une autre violence où l'autre, celui qui n'est pas un allié politique est un adversaire dont il convient d'effacer la trace. Une mise à mort symbolique donc.
De fait cet esprit-là est très présent dans ce qu'on peut voir dans les échanges, notamment sur la toile. Le bien contre le mal. Notions bien implantées à gauche puisque les mouvances qui s'en réclament prétendent jouer sur le terrain de la moralité, ce qui, ma foi, porte souvent à rire quand on refuse de faire l'autruche. Au moins la droite a-t-elle cet avantage de ne pas renier un certain cynisme.

Evidemment, je comprends que les autruches de gauche, eu égard aux atermoiements de l'actuel exécutif aient tendance à vouloir plonger leur tête encore plus profondément dans le sol tout en ayant un œil rivé sur leur périscope orienté à droite dans l'espoir d'y déceler le moindre petit événement qui pourrait conforter leur légende, à laquelle plus personne ne croit guère, de gardiens de la moralité politique. Et donc, de temps en temps, ils trouvent quelque chose qui leur permet enfin de s'exprimer pour montrer que eux c'est évidemment bien mieux que les autres. Sinon, en ce moment particulièrement où les choses vont quand même mal pour eux et remet sérieusement en cause une crédibilité à laquelle, si on se rappelle les avis que donnaient les électeurs sur la capacité du candidat Hollande de nous sortir de la mouise, peu de monde croyait sérieusement. D'ailleurs le principal intéressé semble lui-même ne pas y croire si on se réfère à ses dernières déclarations au Monde, où outre le fait de constater que c'est très dur (fallait y penser avant pépère), il demande se patienter sagement jusqu'à ce que s'inverse le cycle économique en cours. Il y a des cycles, c'est comme ça, on ne peut rien y faire. Rien y faire. Et donc il convient de patienter. Voilà à quoi notre mollesse suprême réduit la politique. Il n'a peut-être pas tort, mais s'il pensait ainsi il fallait le dire avant.

J'en reviens donc à nos indignations sélectives.
Une des dernières en date est ce fameux bras d'honneur adressé par Gérard Longuet aux autorités algériennes qui sans doute rassérénées par les récentes déclarations du gros mou qui nous gouverne peuvent se croire permises, et sans doute n'ont-elles pas tort, d'espérer un acte de repentance de la part de la France pour "les crimes commis pendant la colonisation de l'Algérie". Ce que voulait exprimer ce bras d'honneur, je le partage entièrement et, je crois, je l'espère, une majorité des Français.
Evidemment ça ne se fait pas. Pas davantage qu'un majeur pointé rageusement à l'Assemblée nationale par un certain Emmanuelli que ceux qui s'indignent aujourd'hui n'ont évidemment pas vu. Encore faudrait-il signaler, et nos indignés de service ne le feront évidemment pas, que l'émission à laquelle participait Longuet était terminée et qu'il ignorait qu'il était filmé, et que donc on a vu ce qu'on n'aurait pas du voir. Si, par contre, certains s'indignent du sens de ce bras d'honneur, c'est une autre discussion qui doit s'engager et qui mérite davantage que quelques lignes dans un billet ainsi que l'ont montré les polémiques parfois vives qui se sont exprimées au moment de l'acte de contrition présidentiel à l'occasion de l'anniversaire du 17 octobre 1961. Mais ceux qui ont l'habitude de me lire connaissent très bien mes opinions sur le sujet et en quelle piètre estime je tiens les maniaques de la repentance, sur tous les sujets, qui s'agitent dans notre pays.
Pour en revenir à Longuet on lit des choses qui amusent franchement. D'aucuns n'hésitent pas évidemment à remonter dans le passé politique de cet homme qui fut l'un des fondateurs d'Occident, membre du GUD et d'ordre nouveau, choses qui devraient le discréditer à tout jamais. Car on sait que quand on vient de l'extrême-droite on est foncièrement mauvais et qu'on le reste jusqu'à la tombe. Dans une perspective de réciprocité, on pourrait aussi penser que le PS est noyauté par de nombreux anciens trotskystes que le combat de rue contre les troupes à Longuet n'effrayait pas. Je me permets de rappeler que dans cette mouvance gauchiste on n'était pas des enfants de cœur, qu'il existait par exemple un truc nommé "action directe" célèbre pour ses crimes et dont l'un des protagonistes, un assassin donc, à mise en semi-liberté fut accueilli les bras ouverts par le leader du NPA qui sans doute, lui, est une personne fréquentable. Ce que je veux signifier c'est que quand on se lance sur ce terrain de façon ridicule, il faut s'attendre à un retour du boomerang. Les partis dits républicains ont évidemment accueilli et accueillent toujours des personnes venues des mouvances extrêmes. Mais évidemment Longuet étant de droite…

J'en viens maintenant à un micro-événement dont j'ai entendu parler hier en écoutant une émission sur une radio nationale, et qui m'a fait également sourire.
Figurez-vous que le Point, hebdomadaire de droite, parait-il, même si parfois j'ai des doutes, sort cette semaine en couverture de son magazine une photo montrant une femme dont on ne voit que les yeux, bleus d'ailleurs, avec comme titre "Cet islam sans gêne" avec en titre secondaire "hôpitaux, cantines, piscines, jupe, programmes scolaires…".
Evidemment les professionnels de l'indignation ont immédiatement, ceux qui refusent qu'on puisse évoquer l'islam en France et ses manifestations, diverses sans doute, apaisées souvent sans doute aussi, mais parfois tumultueuses ou revendicatrices aussi. On ne doit pas parler de l'islam sauf pour entonner l'hymne officiel chanté régulièrement par nos politiques, de droite comme de gauche, notamment quand ils se sentent le devoir d'aller inaugurer une mosquée, et qui voudrait que cette religion soit une religion de paix, d'amour et de tolérance. Amen. D'ailleurs on pourrait se demander pourquoi cette insistance à affirmer cela tandis que je n'ai jamais entendu les mêmes chanter les vertus du catholicisme, du protestantisme ou du judaïsme. A trop répéter les mêmes choses, on sème parfois le trouble.
Donc les indignés se sont signalés, plaçant d'emblée Le Point au même niveau que Minute ou Rivarol, et peut-être Causeur. Sans doute Dély le rajoutera-t-il à sa liste, nécessairement incomplète, des publications véhiculant les pensées nauséabondes de la "droite brune", en référence à son dernier bouquin qui nous alerte des dangers qui nous guettent et qui ne sont pas dans l'économie, dans les intégrismes (islamiques du moins) mais dans cette droite qui a rompu les digues qui l'isolaient des idées nauséabondes du front national. J'en pète de rire.
La couverture du Point est donc scandaleuse. Par contre le sondage dont j'ai parlé très récemment et qui portait sur la perception par les Français de l'islam en France, on n'en parle surtout pas. Difficile d'attaquer un sondage d'opinion sauf sur la méthodologie employée. Les résultats, j'en ai parlé, devraient, et doivent faire frémir d'horreur nos indignés défenseurs de toujours les mêmes opprimés. Mais là silence. Silence complet. On continuera à ignorer les perceptions des Français et ce postulat connu des sociologues sérieux et qui veut que la perception d'un fait devient réelle dans ses conséquences. On continuera donc à fustiger tous ceux qui sous une forme ou une autre voudront discuter de certains sujets. Et à les inviter à faire l'autruche et à se gaver des images d'Epinal véhiculées par la bienpensance qui ne tarit pas d'éloges devant la diversité, et invite l'autre à exprimer son identité culturelle tandis qu'on demandera à l'autochtone, au nom de la tolérance, de renoncer à exprimer la sienne, voir à y renoncer tout simplement.

Enfin, pour terminer sur une note d'optimisme, il me semble, et le sondage auquel je viens de faire référence, surtout d'ailleurs les évolutions qu'il indique dans le temps le confirment, que cette tyrannie de l'indignation sélective, de la bienpensance, soit en perte de vitesse et que, enfin, les gens commencent à exprimer publiquement ce qu'avant ils gardaient pour eux, à cause d'un sentiment de honte qu'on leur avait inculqué. Reste maintenant aux politiques de saisir les craintes et les aspirations de ces gens, ceux qui vivent dans le réel, et d'y apporter des réponses. Sans quoi le front national continuera à s'en charger et à progresser.

1 commentaire:

  1. je lisais le persan chez Pyro et me disais qu'on touche le fond du comique troupier, il lui aura fallu peut être revisionner le film "la question" pour nous pondre ça

    et maintenant tous aux abris, MLP suit Copé dans la rue sur son combat contre les lois hollandaises

    il ne l'aura pas volé! sais pas si je vais pas lui envoyer le réquiem de Mozart, mieux, le sabbat mater de Rossini pour fêter ce fameux 7eme jour, presque bad bluddy sunday, dommage on est jeudi
    préparez vous, vont encore attaquer en bas les hypocrites qui jubilent aux dividendes FN qu'ils engrangent

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