"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

samedi 24 novembre 2012

Fiction et optimisme, et compléments



Mon récent billet "FICTION" m'a valu sur un autre blog quelques commentaires et aussi des mails privés qui notaient un certain pessimisme de ma part quant à notre avenir.
La question suivante me fut aussi directement posée "une fiction peut-elle être optimiste?" avec dans la foulée une réponse négative de la part d'une personne n'ayant pas du tout les mêmes conceptions que moi de la vie politique mais qui pourtant me rejoint dans mes constats et réciproquement.
J'en viens donc dans ce billet à préciser les fondements de ma pensée qui m'ont amené à écrire le billet en question.

Cette question de savoir si une fiction peut être optimiste est finalement plus difficile que j'aurais pu le penser au premier abord. Car répondre NON n'est certes pas suffisant et pourrait être considéré comme le simple reflet d'une humeur passagère.

De fait le genre de fiction en cause peut-être considérée comme une vision de la fin de l'Histoire. Or on sait au moins depuis Hegel qui s'est trompé à ce sujet et depuis, plus près de nous, Fukuyama qui n'a pas tardé à être démenti que l'Histoire n'est jamais terminée. Ce qui devrait finalement inciter à un certain optimisme car si même nous envisageons en fonction de nos connaissances et de nos humeurs le pire, il est toujours possible de se dire qu'un après sera sans doute meilleur. Un jour.
Mais nous sommes ainsi faits que cet après ne peut se situer dans nos esprits trop loin sans devenir complètement incompréhensible, inaccessible à nos schémas cognitifs finalement très datés. Nous sommes donc condamnés à envisager uniquement le court terme, quelques petites décennies ce qui n'est rien au regard de l'histoire de l'humanité. Même si en tellement peu de temps cette dernière s'est accélérée à tellement de niveaux que le contenu de chacune de nos années s'est démultiplié par rapport à celui des années des siècles passés.
Par ailleurs chose fondamentale le champ de nos connaissances s'est tellement élargi que la cohérence de l'ensemble a fini par nous échapper.

Quand il y a encore peu de siècles, nous étions dans des sociétés d'ordres avec de tellement fragiles passerelles entre eux, l'optimisme ou le pessimisme n'avaient pas véritablement de place. Les choses étaient ainsi établies par un ordre supérieur qui nous échappait et, au moins pour les catholiques, très majoritaires en occident, les malheurs sur cette terre ne manqueraient pas d'être compensés au ciel. Les derniers seront les premiers, ça c'était une formule puissante qui tant qu'on y a cru a pu finalement donner une cohérence à la vie de la majorité des gens, cohérence d'autant plus renforcée que leur horizon était souvent très limité.
Et il a donc fallu que les protestants avec leur recherche des signes de l'élection sur terre et les "Lumières" commencent à saper ce "bel" édifice pour que les perspectives changent.

Et puis nous avons eu ce siècle de révolutions qui va de celle d'Amérique, en passant par les françaises et les européennes (notamment 1848) pour se terminer sur les champs de bataille de la première guerre mondiale. Ce siècle qui a connu l'émergence des peuples-nations et de la démocratie pour directement aller se fracasser dans celui des idéologies meurtrières porteuses pour l'une d'entre elle au moins de l'idée de progrès et d'harmonie entre les hommes et réduisant la nation au néant. En gros nous avons tout essayé et rien n'a marché véritablement. Rien, même pas la démocratie, même pas ces tentatives de vaincre les déterminismes hélas trop tôt avortées à cause du socialisme sauce molle égalitariste, car le communisme avait eu au moins ce mérite d'y parvenir un temps, même pas cette fausse liberté qu'on nous vend comme progrès quand il s'agit de casser les structures sociétales comme la famille, quand il s'agit de brader la citoyenneté.

Un long processus d'individuation a réduit la société occidentale en miettes. Miettes d'humain dont le but commun s'est réduit peu à peu à la satisfaction égoïstes de besoins majoritairement artificiels. Ce processus tend à transformer les désirs en droits. Droit à l'amour, droit à l'enfant, droit à la mort digne, droit au dernier e-pad… Tout se confond et la liberté se résume en la possibilité de revendiquer toujours de nouveaux droits qui n'ont d'autre finalité que de satisfaire des envies tout à fait personnelles, même si l'expression peut-être collective.
Au niveau collectif, au niveau de la façon dont on veut vivre ensemble, selon l'expression à la mode, il n'existe rien ou pas grand choses. Justes de vagues slogans, morale, justice, égalité qui ont été vidé de leur sens originel. Ou l'affichage de quelques valeurs qu'on dit propres à la civilisation occidentale mais qu'on est incapables de défendre, ou même qu'il est mal vu de défendre car cela implique forcément le rejet d'autres valeurs liées à d'autres civilisations. Or de ça il n'est évidemment plus question puisque ça nous ramène à un passé honni. Car figurez-vous que tout ce qui a été acquis au cours des siècles, tant au niveau matériel qu'au niveau de l'esprit l'a été par les armes et le sang, des autres en particulier. Et ça ce n'est évidemment pas bien. Donc le passé, les fondations en quelque sorte sont rejetées. Et puisque nous sommes le produit du mal finalement, sans doute ne sommes-nous pas des références. C'est le grand renoncement. Le grand renoncement à être ce que l'on est, le grand renoncement à faire partager nos valeurs. De toutes façons quand on ne s'aime pas comment peut-on faire aimer ce qu'on est aux autres. Alors les autres on les laisse, on les laisse vivre selon leurs schémas même s'ils ont parfois de quoi nous répugner, et même on les encourage à conserver leurs identités. Pour cela on chante des odes à la diversité qui soi-disant nous enrichit alors qu'elle nous dissout dans quelque chose sans gout ni saveur. Et du coup tout devient à prendre et ce sont ceux évidemment qui auront dans cet ensemble informe conservé le mieux leur identité, ceux qui auront une vision claire de leur destin collectif, quel que soit le jugement qu'on peut porter dessus, qui emporteront la mise. C'est déjà fait dans certaines "poches" de notre territoire, là où les gens de souche se sont convertis dans tous les sens du terme et ont donc abandonné leur culture et même civilisation d'origine. Peut-être d'ailleurs une question de survie pour eux, pas tant physique qu'existentielle.
Bien sûr, il existe des résistances à ce mouvement. Mais bien faibles. Quelques discours qui en resteront à ce stade ou encore des projets dont l'outrance fait peur. Mais finalement attire de plus en plus de monde. Nous sommes dans un entre-deux, sur le fil du rasoir, et quel que soit le côté vers lequel on basculera ça risque de ne pas être très joli.

Le propos est certes très occidentalo-centré. Mais si on élargit ça à la planète on se rend compte que la civilisation qui porte les valeurs qui sont le plus à vocation universelles, au point que même leurs ennemis jurés s'empressent de les singer souvent de façon grotesque, ne croit plus en elle-même. Minée de l'intérieur par ses contradictions, elle subira de plus en plus les coups de boutoirs de ceux qui continuent à en appeler à des principes dictés par une puissance supérieure et invisible dont l'existence ne peut guère être remise en cause du fait de son emprise totalitaire incluant un contrôle de tous par tous.

Mon propos est bien sûr et hélas, par nécessité, très condensé et mériterait pour chacun des items d'amples développements. C'est une vision très raccourcie d'un long processus qui aboutit au bout de celui de désenchantement du monde et qui réduit les valeurs pour lesquelles tant de gens se sont battus et sont morts à pas grand-chose, en tout cas pas assez pour qu'on puisse encore se battre pour lui. Et les mirages sociétaux accompagnés des slogans minables qu'on nous sert à longueur de temps ne changeront rien à cet abandon de nous-mêmes. Peut-être la peur ou le danger rallumeront-ils la flamme éteinte. Mais dans des conditions qui ne pourront être que terribles.


 
COMPLEMENTS

La table rase ou vers un nouveau totalitarisme

Si j'en viens à évoquer la notion de table rase (suggérée par une bloggeuse ailleurs), c'est parce qu'elle me semble correspondre au fondement de ma pensée.
Car c'est bien de ça dont il s'agit. J'ai parlé au-dessus d'une haine de soi qui s'est emparée de l'occidental et qu'il l'amenait à renoncer à la défense des valeurs de sa civilisation. Par-delà ce constat on peut en dresser un autre qui le complète de manière dangereuse. C'est celui du dévoiement des termes qui désignaient nos valeurs. Je pense en particulier à l'égalité qui devient l'égalitarisme, et la liberté qui devient le libertarisme.
L'égalitarisme même s'il ne peut pas s'opposer à des données objectives naturelles ou autres qui impliquent que les hommes sont différents, tend à réduire les conséquences de ces données dans une société libre, où chacun devrait pouvoir exprimer ses caractéristiques et ses compétences et se situer dans la société par rapport à elles et notamment par rapport à leur utilité sociale quand il s'agit des compétences. Si aucune société n'y est jamais réellement parvenue, on peut toutefois noter que fut une époque où la méritocratie dite républicaine devenait de plus en plus une réalité. L'école en était sans doute le principal outil de promotion. Sa destruction par quelques individus rongés par l'idéologie égalitariste qui leur a fait rejeter la sélection, la hiérarchie même entre le maitre et les élèves, a relancé de plus belle les déterminismes sociaux et culturels et figé la reproduction des élites. D'une façon plus générale, c'est toutes les différences qu'on souhaite voir disparaitre. Bientôt il n'y aura plus d'hommes et de femmes (en Suède une réforme grammaticale à supprimé les genres), juste des gens indéterminés dans leur appartenance sexuelle. Plus de père ni de mère, mais des parents numérotés. L'horreur.
Le libertarisme soutient ce mouvement égalitariste supprimant les distinctions institutionnelles ou détruisant tout simplement les institutions. En ce sens le mariage pour tous peut-être considéré non pas comme un élargissement d'une possibilité, mais la perte de sens d'une institution, sa fin objective.
Les deux conjugués sont une profonde régression en termes de liberté car ils assignent à une identité vidée de son sens, car ils impliquent l'impossibilité d'exprimer ses différences, sa personnalité, ses gouts, ses compétences, tout ce qui fait un homme.
Pour parvenir à cela, il faut évidemment rejeter un passé qui pendant une courte période d'environ deux siècles, des Lumières à une époque encore récente qui a constitué justement la période phare pour la conquête de la, des libertés. La période fut certes chaotique, même très violente, jalonnée de ce qui nous parait maintenant des erreurs et parfois des crimes, mais elle aboutit non pas à une situation parfaite mais à une forme suffisamment enviable pour que tout le monde, même les plus hostiles à la liberté se mettent à vouloir l'imiter ou au moins à en pratiquer le simulacre. De cette période on nous a apprend à ne retenir que le plus mauvais.
Il faut donc faire effectivement table rase du passé et même des caractéristiques de chacun pour avancer vers un monde nouveau où l'indifférenciation sera la valeur dominante. C'est donc effectivement un nouveau totalitarisme dont la plus grande perversion, outre le fait de s'appuyer sur des valeurs tronquées, est assez soft, se limitant à isoler médiatiquement ceux qui lui résistent ou à les parer de caractéristiques honnies (facho est très à la mode). Au moins les totalitarismes qui précédèrent, nazisme ou communisme étaient-ils assez violent pour susciter des vraies résistances.

 
Le rapport à la vie (variations occidentales)

On peut distinguer ou pouvait distinguer deux grands groupes d'individus classés en fonction de leur civilisation d'appartenance. Il y avait ceux qui aimaient la vie, et ceux qui aimaient la mort. Ceux qui trouvaient dans la vie, pas la leur, mais la vie en général, et notamment celle de ceux qui viendraient après eux, le vrai sens à leur présence sur terre. Les autres, ceux qui aiment la mort sont ceux pour qui leur passage sur terre est une préparation à l''après, ceux qui par leurs comportements sur terre préparent leur "vie" au-delà. Disons de façon assez grossière que l'occident sécularisé entrait dans la première catégorie tandis que des groupes d'hommes soumis à une religion dans leur comportement de chaque instant entraient dans la seconde. Cette dernière existe toujours. Certains le disent d'ailleurs ouvertement quand ils disent autant aimer la mort que les autres la vie et le prouvent assez régulièrement. Quant à la première, disons qu'elle diminue de plus en plus en volume. Car de plus en plus de gens on cessé d'aimer la vie pour aimer la leur, seulement la leur et s'y consacrer uniquement pour qu'elle soit plus belle selon leurs critères souvent uniquement matériels.

Si les gens aimaient la vie au sens premier où je le décris, peut-être et sans doute que les problèmes d'environnement que vous citez ne seraient plus un problème. Peut-être que les cycles économiques défavorables seraient-ils compensés par des attitudes plus altruistes. Peut-être que le terrorisme auraient moins d'impact sur des gens tous d'accord pour le combattre quel qu'en soit le prix individuel à payer.
C'est peut-être une utopie ce que je raconte. Peut-être. Mais le fait de voir des gens attendre de plus en plus de choses de l'Etat pour tous les domaines que vous citez sans eux-mêmes penser un instant à ce qu'ils pourraient faire pour améliorer les choses n'est sans doute pas ce qui est le plus souhaitable. C'est pourtant ce que nous vivons.

Mais si vous n'êtes pas convaincu, je voudrais quand même vous faire toucher du doigt l'évolution que nous avons connu en quelques petites décennies, 5 pour être précis. En vous citant juste une phrase d'un discours d'un démocrate américain, Kennedy :
"Que tous les pays le sachent, qu'ils nous veuillent du bien ou du mal : nous sommes prêts à payer n'importe quel prix, à supporter tout fardeau, à endurer toutes les épreuves, à soutenir tous nos amis et à nous opposer à tout ennemi afin de garantir la survie et le succès de la liberté."
Pensez-vous qu'on puisse entendre désormais, 51 ans plus tard, un tel discours appelant au sacrifice pour défendre une valeur fondamentale. Personnellement je ne le crois pas. On est passé du discours volontaire, ferme sur les valeurs, au discours de compromis, de lâche compromis devrais-je dire, pour le plus grand bonheur de tous. Et les conséquences en sont déjà terribles, rien que sur nos territoires. Et ce n'est qu'un début.

 


 

 

1 commentaire:

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