"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

vendredi 24 février 2012

Doit-on se laisser imposer la nourriture hallal?



Hallal, c'est un mot qui est entré assez tard dans mon vocabulaire. Je suis pourtant originaire d'une région où les travailleurs immigrés ne manquaient pas et parmi eux un nombre relativement important de musulmans. Quand j'allais à l'école, au collège, au lycée, endroit où les plaisirs de la restauration collective furent longtemps mon quotidien puisque je fus tout à tour demi-pensionnaire puis interne, la ville étant bien trop loin pour que je puisse rentrer chez mes parents le soir, mes petits camarades musulmans n'employaient jamais ce mot. C'est vrai qu'on les voyait refuser le porc à la cantine et se voir servir à la place souvent des steaks également souvent hachés, ce qui nous permettait l'espace d'un instant de regretter de ne pas être musulmans. L'espace d'un instant car au moins nous pouvions, nous qui ne l'étions pas, nous taper une bière en ville à l'occasion, plaisir incomparable quand on a 15 ou 16 ans. Enfin à l'époque. Que ce steak ait été grillé sur la même plaque qui servait à griller nos côtes de porc ne les dérangeait même pas. Jamais je n'ai entendu ni plainte, ni revendication pour manger hallal. Ça se passait il y a une quarantaine d'années. Plus tard à l'armée, même topo même s'il existait des rations hallal ou casher pour ceux qui auraient eu des exigences. Mais rares sont ceux qui en profitaient. Il y a encore 5 ans, maintenant je ne sais pas, mais je ne pense pas, l'armée ne s'était toujours pas convertie au hallal même si dans la troupe, suite à la professionnalisation le nombre de musulmans était devenu significatif. Jamais vu de problème.
Il semblerait pourtant, si on en croit les médias, si on écoute les revendications de certains musulmans, ceux qui parlent plus fort que les autres qu'on n'entend d'ailleurs jamais, ce qui doit être une caractéristique du musulman modéré, c'est-à-dire celui qui ne s'oppose que modérément, très modérément aux revendications de ceux qui semblent avoir un problème avec notre laïcité, que le hallal soit devenue une préoccupation majeure de la minorité musulmane de France. A tel point qu'un marché florissant s'est mis en place, proposant désormais dans toutes les grandes surfaces, au moins, des rayons hallal, parmi lesquels le rayon boucherie, celui qui est au centre de la dernière polémique du moment qui cette fois voit tout le monde ou presque taper sur Marine Le Pen suite à ses déclarations sur le contenu de l'assiette des Franciliens.
Encore une fois il est dommage que ce soit le FN qui débusque ce type de problème, mais selon un traitement dépourvu de nuances, que d'aucuns ont envie de traiter à la légère mais qui est suffisamment complexe pour qu'on s'y attarde un peu.
 
Je ne sais pas si, je ne pense pas que les Franciliens soient condamnés à manger tous hallal, même si dans certaines agglomérations il devient difficile de trouver une boucherie autre qu' hallal. J'ai habité pendant 10 ans une petite ville en bordure du périphérique sud. Quand je suis arrivé dans cette commune, au milieu de nombreuses boucheries hallal subsistaient deux boucheries qui ne l'étaient pas. L'une a finalement fermé et été remplacée immédiatement par une autre boucherie hallal s'ajoutant aux nombreuses autres. Ne subsista donc que le dernier boucher gaulois qui, bravement car il aurait pu être taxé de discrimination sans doute ou recevoir des pavés dans sa vitrine, afficha en mettre énormes "boucherie française" sur sa devanture. Puis lui-même partit à la retraite et fut remplacé par… je vous laisse deviner. D'où la nécessité de se replier à moins d'avoir un goût certain pour la prospection sur les grandes surfaces si on ne voulait pas manger hallal. Sauf que parait-il rien ne l'a jamais garanti. Et ce sont même les professionnels de la filière qui le reconnaissent, puisqu'il faut bien qu'ils écoulent la marchandise que ne consomment pas les musulmans. D'où la question formant le titre de ce billet.
 
D'emblée, je vous réponds évidemment non. Reste maintenant à défendre cette position. Pour ça les arguments ne devraient pas trop manquer tellement ils sont multiples et se situent sur des tableaux variés.
 
Commençons par le mode d'abattage des animaux. Les réglementations nationale et européenne précisent que les animaux doivent être étourdis avant d'être abattus. Il semblerait pourtant qu'une directive autorise des dérogations pour l'abattage rituel. Abattage rituel alors que nous sommes dans une République laïque! Voilà déjà un élément propre à échauffer les esprits du moins ceux qui se réclament de la laïcité, pas ceux qui ne s'en servent qu'épisodiquement avec des mots, des promesses d'inclusion dans la Constitution, mais qui ferment les yeux depuis des années sur les entorses qui lui sont faites notamment par leurs camarades politiques.
Donc au nom d'une religion on pourrait déroger à des principes civilisés, au nom d'une religion on pourrait retourner à une espèce de barbarie qui veut que souffrent les animaux avant d'être transformés en viande de consommation. Bravo l'Europe, bravo la France! Mais finalement quelle est la différence qui sépare ce type de dérogation entre celle qui pourrait un jour autoriser la polygamie au nom de la foi de ceux qui souhaitent la pratiquer, ainsi pourquoi pas la lapidation des femmes adultères. C'est rituel aussi, non? Soit on accepte tout, soit on refuse tout. Soit on reste dans la laïcité, soit on décide que pour une religion le principe est dérogatoire.
Et le consommateur dans tout ça? Apparemment même s'il est heurté par un abattage barbare, d'un autre temps de notre civilisation, il n'a qu'à subir. Manger éventuellement de la viande venant d'animaux exécutés selon des méthodes qu'il juge abjectes.
 
Et puis il semblerait, ce sont des vétérinaires qui le disent et pas un seul qui serait par un faux hasard encarté au FN, qu'il existe un danger sanitaire avec ce type d'abattage. Lors de l'égorgement de la bête des remontées gastriques seraient susceptibles de contaminer certaines parties de l'animal vouées à être transformées en viande à consommer par l'homme. Et bien évidemment ce serait les morceaux dans lesquels en particulier on ferait la viande hachée, donc susceptible d'être mangée crue par les amateurs de steaks tartare par exemple, du moins ceux qui n'ont pas compris que le steak tartare de cheval était incomparablement plus délicieux. Comme vous l'aurez remarqué j'ai largement utilisé le conditionnel n'étant pas vraiment de la partie. Mais ce conditionnel tout de suite devrait faire retentir à vos oreilles ce cri qu'on n'arrête pas de nous hurler depuis des années : "principe de précaution". Eh oui ce sacro-saint principe de précaution, celui que Chirac a cru bon d'inscrire dans la Constitution et qui nous empêche de faire des recherches dans certains domaines, dans certaines nouvelles technologies comme les nanotechnologies au risque de nous voir louper quelques trains de la croissance. Pour l'abattage hallal, curieusement ce principe ne s'applique pas. Mais peut-être que manger de la viande abattue selon un rite nous permet-til de bénéficier d'une protection divine même si nous ne croyons pas dans le dieu censé nous l'octroyer. Mais si dieu ne nous aide pas peut-être que le législateur le fera en imposant au moins dans les restaurants de nous servir des steaks tartares bouillis.
 
Sur un plan tout à fait différent, il parait que l'abattage hallal est soumis à une taxe destinée aux trois mosquées, je crois, qui disposent du privilège de certifier la viande hallal. Une taxe de l'ordre de 15 centimes le kilo. Elle sert en parti à payer les sacrificateurs, quel joli terme, on se croirait chez les Aztèques, et à assurer leur formation, c'est-à-dire le maniement de la boussole pour orienter la tête de l'animal vers La Mecque, celui du couteau servant à un égorgement net et efficace, et l'art de chuchoter à l'oreille des poulets, moutons, bœufs et autres animaux que l'on va occire dans la seconde qui suit. Car l'abattage hallal ne va pas sans un certain raffinement, vous le reconnaitrez. Mais revenons à notre taxe que nous baptiseront hallal. Elle est payée par les abattoirs qui eux-mêmes ne manquent pas de la répercuter sur leurs acheteurs grossistes, et ainsi de suite, jusqu'au consommateur qui est finalement le seul à payer cette taxe. Donc si vous êtes consommateur de viande hallal à votre insu, vous êtes aussi à votre insu un contributeur au denier du culte musulman. Je ne pense pas que ce soit très légal, ou très conforme à la laïcité, mais en plus c'est de l'extorsion de fonds, carrément du vol. Je refuse de financer des mosquées à mon insu. C'est clair.
 
Cela nous amène naturellement à ces revendications communautaro-religieuses qui comme je le précisais n'existaient pas il y a une trentaine d'années. Il faudrait peut-être enfin en prendre la mesure. Comprendre quel est le but à long terme de ceux qui les portent, et inclure cette revendication de viande hallal dans un ensemble beaucoup plus vaste qui va des prières de rues aux exigences pour des horaires réservés dans les piscines ou salles de sport en passant par le refus de voir sa femme soignée par un médecin mâle et autres joyeusetés qui participent à la bonne intégration des musulmans en France et font envisager avec un espoir mâtiné de bonheur notre avenir commun. Je ne veux pas m'étendre là-dessus car c'est un trop vaste sujet dont la revendication alimentaire n'est qu'un partie, certes visible, mais une partie seulement.
 
Voilà donc quatre éléments qui peuvent amener à réfléchir sur le hallal en général et sur le fait que certains soient amenés à en manger à leur insu. Combien? En fait on ne sait pas et on ne saura jamais tant cela est opaque. Les chiffres vont de 3% à 100% en Ile-de-France. Pour les autres on ne sait pas. Si en plus il fallait s'inquiéter de ce qui se passe au-delà de la N104 on ne s'en sortirait pas. Et même les musulmans devraient avoir des doutes sur l'hallalité de leur alimentation. Car je suis persuadé que des gens qui pensent manger hallal mangent de la viande classique. Je me rappelle avoir croisé il y a une vingtaine d'années de cela un jeune qui effectuait son service militaire dont le père dirigeait une "fabrique" de poulets. Il travaillait exclusivement pour les pays arabes et donc en quantité très importantes. Imaginez donc un sacrificateur, boussole dans la main gauche et couteau dans la droite en train d'égorger les 10.000 poulets de la commande irakienne en leur glissant à chacun un mot doux.
De fait c'est un problème majeur de traçabilité qui est soulevé par cette question de l'alimentation hallal. Alors qu'on nous bassine avec ce terme de traçabilité qui voudrait que du spermatozoïde du taureau au steak qui remplit son assiette rien ne soit inconnu du consommateur, un grand trou noir, sans que ça émeuve les autorités compétentes, existe dès qu'il s'agit de cet abattage rituel. Affaire de gros sous sans doute, favorisée par la volonté de ne pas stigmatiser une communauté, une religion.


 

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