"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

jeudi 3 janvier 2013

"Une amende davantage qu'un impôt!" J'en reste baba



Je viens de lire l'interview donnée au Point par Christian Eckert, rapporteur PS du budget à l'Assemblée Nationale suite à la censure de la mesure visant à imposer à 75% les revenus à partir du premier million d'euros. Et donc dans cette interview, Monsieur Eckert nous explique pourquoi ni le président, ni mes ministres concernés, ni les conseillers et petites mains rédacteurs du projet n'avaient pensé voir cette mesure censurée par le Conseil Constitutionnel.

La réponse est effectivement simple : le Conseil a examiné l'affaire au regard de la pratique fiscale en France tandis que les initiateurs de la mesure la considéraient comme une punition vis-à-vis des nantis qui gagnaient individuellement plus de 1 million d'euros par an. Au passage, je ne sais pas si présenté de cette manière, hors du cadre budgétaire, cette mesure envisagée comme sanction aurait davantage passé sous les fourches caudines de ceux qu'on appelle les Sages, chose à laquelle je ne me risquerai pas étant donné la composition dudit conseil.

En tout cas ça en dit long et montre à quel point l'idéologie peut faire perdre tout bon sens et ignorer les simples fondements de notre République, en l'occurrence l'égalité, comme le souligne le CC dont il met en avant la rupture du principe pour expliquer sa censure.
Hollande avait dit qu'il n'aimait pas les riches. Et donc ça se confirme et se traduit en n'importe quoi. Le discours de Eckert sont à se propos véritablement édifiants. Je cite : "Nous ne cherchons pas à percevoir un impôt pour alimenter le budget de l'État, mais à éviter que des salaires supérieurs à un million d'euros par personne ne soient versés", "Alors, cette taxe, c'est une amende plus qu'un impôt. Nous disons : Si vous dépassez la ligne jaune, vous payez.", "Le Conseil constitutionnel a considéré qu'il s'agissait d'un impôt, alors que le Parlement - et François Hollande aussi - a considéré que c'était une taxe dissuasive, temporaire puisque prévue pour durer deux ans, donc exceptionnelle, et qu'on n'avait pas à lui fixer les règles de l'égalité devant l'impôt.", "C'est une mesure symbolique, qui ne rapporte pas énormément d'argent, 200 millions d'euros par an…Elle a joué un rôle important durant la campagne électorale."

Ces quelques phrases extraites de l'interview sont éclairantes. Sans les reprendre dans l'ordre, on peut en déduire une certaine philosophie qui s'est, heureusement, heurtée au mur de la constitutionalité.
Cette mesure n'apporte rien ou très peu aux finances de l'Etat, elle est donc d'une utilité pratique assez limitée. Néanmoins, elle a permis par son aspect symbolique d'attirer le gogo de gauche, le limité en nombre de neurones qui pense toujours que les riches sont a cause de sa vie médiocre, mais surtout jamais lui, et à qui il plairait sans doute de voir quelques têtes se promener entre Bastille et République platées au bout d'une pique. Comme nous n'en sommes plus là, ou pas encore, on se contentera du symbole de l'amende, de la punition, de la confiscation. Non mais!.
Reste qu'il y a une contradiction dans les propos puisque cette amende ne devait être que temporaire. Deux ans. C'est tout? Donc 400 millions de piqués aux riches pendant deux ans pour satisfaire les individus décrits ci-dessus. Le compte n'y est pas, ni pour les caisses de l'Etat, ni pour eux. Bon, c'est vrai qu'on n'avait pas dit ça pendant la campagne et qu'une fois élu, Hollande devait bien ménager la chèvre et le chou. "Excusez-moi, chers riches, la promesse de vous taxer m'a fortement aidé à être élu, alors vous comprenez que je suis quand même obligé de faire quelque chose. Allez, deux ans, c'est pas la mer à boire. Après on efface l'ardoise et on essaiera peut-être de compenser. Bon, mais ça je ne peux pas le dire". A moins que le doué, parait-il en fiscalité, ce serait au moins une chose sauf qu'en l'occurrence on n'a pu que vérifier l'inverse après la censure, ne savait que le Conseil allait le censurer. Il aurait fait ce qu'il a pu. Mais vous comprenez un Conseil Constitutionnel entièrement désigné par la droite ne pouvait que lui mettre des bâtons dans les roues. On va sortir les mouchoirs!

Mais j'en reviens à la notion d'amende. Elle est explicite dans l'interview et, de plus, est renforcée par cette expression "dépasser la ligne jaune". Donc gagner de l'argent en France serait devenu un crime ou un délit qu'il conviendrait de punir par une amende proportionnelle aux gains enregistrés. On s'éloigne quand même de la notion de justice sociale ou fiscale qui voudrait, et c'est logique, que plus on gagne d'argent davantage on contribue. Ceci n'est pas critiquable, et on comprendrait même aisément que le système fiscal avec ses niches qui permettait aux grosses fortunes de payer moins en proportion que les classes moyennes soit complètement révisé pour effacer certaines aberrations. On comprendrait par exemple que quelqu'un ayant un revenu imposable de 78516 euros, célibataire et n'ayant qu'un enfant à charge et ne payant que 5217 euros d'impôts sur le revenu, soit invité à contribuer davantage. Au fait j'avais oublié, mais ces chiffres concernent notre président, du moins Monsieur Hollande pour sa situation fiscale en 2011, publiée en début d'année. Comme quoi c'est peut-être finalement un bon fiscaliste. Et aussi quelqu'un qui ne doit guère s'aimer, car quand on n'aime pas les riches… Reste qu'ne l'occurrence on s'éloigne là de la justice sociale ou fiscale, car le terme d'amende n'est pas anodin. Il ne s'agit plus de faire contribuer davantage, pour d'ailleurs un rapport discutable, mais carrément de punir. C'est une drôle de la conception de la gouvernance, et surtout d'une gouvernance apaisée, puisqu'il parait que c'est un objectif de notre président, dont la réalisation, comme celle de tous les autres d'ailleurs, est assez douteuse. On ne peut donc se réjouir que la mesure ait été censurée. Ce n'est pas une satisfaction personnelle parce que le million d'euros, je ne suis même pas sûr de l'avoir gagné depuis que je travaille. Et comme je ne travaille plus…

Enfin on remarquera que Monsieur Eckert peut avoir quelques éclairs de lucidité, à moins que la censure ne lui ait ramené les pieds sur terre. Il déclare que "On peut craindre que si l'on passe par l'impôt dans la nouvelle version le Conseil constitutionnel explique que la taxe est confiscatoire, puisque c'est ce qu'il a fait pour la taxation des bénéfices sur les stock-options et sur les retraites-chapeaux." et "Mais après, c'est toujours pareil, on nous oppose la concurrence internationale et la liberté d'entreprendre. Sans parler de quelques Gérard Depardieu...". En clair ça veut dire que la taxation à 75%, même bidouillée pour la ramener au niveau du foyer fiscal, est d'ores et déjà abandonnée, et que si par hasard, elle n'était pas censurée ou était même allégée, elle se heurterait aux réalités de la mondialisation pourtant chérie par les socialistes, à savoir un départ de ceux qui peuvent envisager de gagner beaucoup d'argent ailleurs sans être rackettés.

2 commentaires:

  1. il existe une inégalité fiscale digne de Lapalisse,vu la démographie des foyers fiscaux en regard des revenus imposables
    0.01% des plus hauts revenus sont en dessous des 1 million
    on peut faire tout le web en n'oubliant pas l'INSEE, les m à j datent de 2009
    la grande arnaque intellectuelle est cette opacité
    si le citoyen de base avait les chiffres exacts il pourrait se rassurer, rien ne viendra des fameux riches aux 1 million et plus s'il veut s'en sortir
    la guerre civile, Expat si un jour tout le monde intègre que l'inégalité est ailleurs et ça douille! régimes des retraites, participations dans le privé, avantages en nature, des choses infimes entassées pour le petit peuple, qu'il se taise....des différences que l'on ne peut même plus chiffrer

    et au plus haut des presque 5000 sont partis et des bien en dessous de ce machin 75% par insécurité fiscale qui empêche à court terme et quand on zoome dans le patrimoine et le capital mobilier là: grand vent!

    ce gouvernement nous prend pour des cons

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  2. Vous avez raison Cimabue. Les inégalités, celles qui coutent, on va les retrouver ailleurs, par exemple sur les docks de Marseille, ou sur votre facture d'EDF. Mais ce ne sont que deux exemples parmi une foultitude dont on redécouvrira encore une fois quelques aspects quand on reparlera des retraites et des régimes spéciaux.

    Bien évidemment cette taxe c'est un rideau de fumée auquel d'ailleurs personne parmi ceux qui l'ont portée ne croyait. Mais mieux valait une censure que le retrait d'une promesse lancée un soir de campagne au grand dam des conseillers dans le domaine, Cahuzac par exemple, même pas au courant et qui l'a appris sur un plateau télé. Après il fallait faire avec et laisser penser que le CC de droite, de manière conjoncturelle, n'agissait pas en droit mais en organe d'opposition.

    Oui, ils nous prennent pour des cons. C'est clair.

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