"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

samedi 1 septembre 2012

L'insoutenable légèreté du pouvoir


Ceci n'est en aucun cas une allusion au régime de notre président qui manifestement s'est soldé par un échec.
Non, il s'agit juste ici, au moment où travaille une commission destinée à faire des propositions sur la rénovation et la déontologie de la vie publique, de voir où on se situe sur ce point au niveau du gouvernement. Je veux bien croire qu'avant d'agir ce dernier veuille attendre les conclusions de ladite commission, reste qu'on pourrait s'attendre de sa part à certains comportements, ou plutôt au refus de certains comportements largement dénoncés par la gauche, et en particulier les socialistes, parce qu'ils démontraient de la part du pouvoir sarkozyste l'affichage d'un mépris total pour quelques règles élémentaires de déontologie.
On se souvient en particulier de l'affaire Woerth/Bettencourt et de la mise à mort "ministérielle" d'un homme parce que son épouse travaillait dans le cabinet chargé de gérer la fortune d'une généreuse donatrice du parti majoritaire. "Conflit d'intérêt", hurlait-on alors sur les bancs de la gauche, évidemment vertueuse et qui jamais ne se laisserait aller à commettre pareille forfaiture.

Et puis voilà qu'aujourd'hui, le gouvernement, issu de ces politiques de gauche nécessairement vertueux, est pointé du doigt, mais vous remarquerez que la presse n'en fait tout de même pas ses choux gras, manquerait plus que ça, pour avoir passé un contrat avec la banque d'affaires Lazard. L'objet essentiel du scandale, officiellement, est que Audrey Pulvar, compagne actuelle de notre fringant ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, le même qui avait fustigé le couple Borloo/Schönberg dont la moitié féminine œuvrait encore comme journaliste tandis que la moitié masculine était ministre (de droite évidemment), a été cooptée par le patron de cette banque pour diriger le journal les
inrockuptibles dont il est l'heureux propriétaire. Montebourg, évidemment, nie être à l'origine de ce contrat et en dénonce même l'opportunité tandis que Moscovici en revendique l'entière paternité, tançant au passage son collègue du gouvernement parce qu'il doute de la pertinence du contrat. Nous pouvons certes les croire. Espérons juste pour eux qu'ils seront davantage crus que ce pauvre Eric Woerth dont les dénégations ne furent guère entendues de la part de nos vertueux socialistes ce qui provoqua son éloignement du gouvernement.
A ce stade nous pourrions déjà noter une certaine légèreté d'un gouvernement capable de se mettre dans une situation prêtant à critiques car ressemblant étrangement au conflit d'intérêts dénoncé dans le cadre de l'affaire Woerth.

Certes l'affaire n'ira pas aussi loin, et pour cause. Mathieu Pigasse, patron simultané de la banque Lazard et des inrockuptibles est aussi un des principaux actionnaires du Monde et du Huffington Post. Il aurait même, selon Jean Quatremer, journaliste à Libération, des vues sur ce dernier quotidien. Du coup on ne risque guère de voir une campagne de presse comme celle qui a tenté de déstabiliser le précédent gouvernement avc l'affaire Woeth/Bettencourt. Ne comptons pas sur médiapart évidemment dont on se demande comment il va pouvoir survivre au départ de Sarkozy. Quant au Point et au Figaro, ils me paraissent bien timorés. Il existe en plus deux journaux d'influence que je ne citerai pas employant chacun une journaliste partageant la vie d'un ministre du gouvernement actuel. L'affaire est donc bien maitrisée et ne devrait pas faire l'objet de débats qui se prolongent.
Je ne vais pas ici développer les incidences que peuvent avoir ces liaisons de couple entre politiques et journalistes, car ce n'est pas mon sujet. Je me bornerai juste à dire que ce que je crains le plus ce n'est pas ce que pourraient écrire et dire ses journalistes, ou encore faire écrire ou dire, mais ce qu'alors qu'ils se situent dans une position privilégiée pour obtenir des informations, ce qu'ils pourraient omettre de d'écrire ou de dire. C'est un véritable problème de déontologie qui interpelle beaucoup de gens de la profession, et d'autres évidemment.

Mais à la limite, je dirai que la présence d'Audrey Pulvar à la tête des inrockuptibles me parait être un problème assez secondaire. Ce qui me semble plus intéressant c'est d'une part les relations entretenues par le patron de la Banque Lazard avec la presse, d'une manière générale, et les liens de cette banque et de son patron avec la gauche socialiste. On pourra par exemple se souvenir que la banque Lazard a échappé à la vague de nationalisations de 1981 sur les instances de Jacques Attali. Elle est d'ailleurs surnommé à l'époque "le ministère bis de l'économie". Et on n'oubliera pas non plus que Mathieu Pigasse, après avoir été conseiller de DSK quand il était ministre de l'économie et des finances dans le gouvernement Jospin fut un des ardents soutiens de François Hollande qui allait devenir Normal 1er. Il est également membre de Terra Nova. Bref, on peut se demander si ce n'est pas un retour d'ascenseur que ce contrat entre cette banque et le gouvernement.
Attention! J'ai bien dit "on peut se demander". Je n'affirme absolument rien. Peut-être et sans doute même cette banque d'affaires est-elle capable de conseiller le gouvernement dans sa création d'une banque publique d'investissements. Comme d'autres évidemment. Mais le fait que ce soit elle qui ait été choisie, quand on connait ses liens et ceux de son patron avec le pouvoir actuel, ainsi que l'influence qu'il peut avoir dans le monde de la presse, on est en droit et d'une, de se poser des questions, et de deux, de constater qu'il s'agit là d'une bien grande imprudence. Et que la gauche dans un cas inverse, donc si elle était dans l'opposition, n'aurait pas manqué de monter au créneau épaulée par de nombreux médias.
Encore cette insoutenable légèreté du pouvoir.

 
Mais passons à d'autres comportements, pas si éloignés de ce qui vient d'être énoncé ci-dessus.
Peut-être vous rappellerez-vous cet échange lors du débat entre les deux tours :
- Vous avez nommé vos proches partout, partout, dans tous les ministères, dans toutes les préfectures, partout!
- Vous êtes un petit calomniateur
Sans doute qu'un vent d'hypocrisie a dû à ce moment traverser le plateau. Car c'était comme on dit l'hôpital qui se moquait de l'infirmerie et réciproquement.
Allez quelques révélations faites pendant l'été par le Canard enchainé (on peut peut-être encore compter sur lui!) : Laurent Olléon, époux de la ministre Fleur Pellerin, est entré au cabinet de Marylise Lebranchu, Boris Vallaud , époux de la ministre Najat Vallaud-Belkacem est devenu conseiller d'Arnaud Montebourg, et l'épouse d'Aquilino Morelle, le Guaino avec nécessairement moins de talent de Normal, dirige le cabinet d'Aurélie Filippetti. 
Je crois que même ça, Sarkozy n'aurait pas osé le faire. Peut-être! En tout cas ce n'est pas de ce côté qu'il faudra chercher les manifestations du changement.

 
Allez Jospin, au boulot! Il y a du grain à moudre! Faut dire qu'épaulé par Bachelot qui avait casé son fils dans un ministère, peut-être le sien d'ailleurs, il bénéficie de compétences certaines.

4 commentaires:

  1. j'ai regardé sur wiki le pedigree de cette banque
    faire appel à elle sans tambour ni trompette ne sort pas du chapeau et es l'objet d'une préméditation de longue date
    il serait intéressant de connaître sa démarche pour servir le montage de la banque d'investissement

    je n'y comprends rein mais y a un loup et l'ombre de la diaspora DSK plane (ami de Mosco)

    remarquez ne crachons pas sur la soupe, mais cette engeance me débecte

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  2. En fait ces pratiques nous y sommes devenus tellement habitués que ça ne me choque même plus. Ce qui par contre m'énerve ou me débecte comme vous dites, c'est que ceux-là même qui il y a 4 mois encore s'appuyaient sur la dénonciation de ce genre de chose pour parvenir au pouvoir agissent au grand jour de cette manière qu'ils dénonçaient sans que ça émeuve évidemment grand monde, et surtout pas les médias qui nous en auraient balancé des tartines pendant des semaines sur un même sujet.

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  3. Nos ancêtres latins disaient déjà, dans leur brièveté dorée, "Nihil novi sub sole".Usbek

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    1. Et moi qui croyais que "le changement c'était maintenant". Nous aurait-on menti?
      Les charognards d'un côté, les vertueux de l'autre, voilà pourtant un scénario qui a connu, connait et connaitra toujours de grands succès. Mais ce ne serait donc pas pour nous!

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