"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

jeudi 5 janvier 2012

Vers un nouveau statut pénal pour les syndicalistes?



Alors que le procès Chirac vient de se conclure de la façon que l'on sait après une douzaine d'années de procédure dont quelques unes gelées à cause d'un statut pénal, particulier, se trouve une nouvelle fois posée la question de ce statut que certains trouvent avantageux et donc forcément inique, que d'autres veulent conserver en l'Etat, non pas pour protéger le président, mais la fonction et par delà la bonne marche de l'Etat, je me suis déjà exprimé à ce sujet. Soit! Il n'est pas interdit de se poser des questions sur ce statut, d'exposer ses opinions, voire d'envisager de le modifier si la sanction des urnes le permet. Par contre ce qui est troublant, c'est que ceux-là même qui sont les plus ardents pourfendeurs de ce statut, ceux-là même qui voudraient faire du Président de la République un justiciable normal, la normalité semblant à ce propos être une qualité très en vogue actuellement, semblent envisager très sérieusement un statut pénal particulier pour les syndicalistes.
 
Ce sont en effet pas moins de 4 candidats à l'élection présidentielle, tous d'extrême-gauche, qui battaient le pavé mercredi à Amiens alors qu'allait se dérouler le procès en appel de Xavier Mathieu, ex-leader CGT des "contis", relaxé en première instance parce qu'il avait refusé un prélèvement d'ADN suite à une condamnation précédente, je vais y revenir. On a pu voir en effet à l'occasion de ce procès voir Joly, Mélenchon, Arthaud, et Poutou, classés de droite à gauche, sauf pour les deux derniers classés par ordre alphabétique, et bien que j'ai quand même quelques doutes sur la pertinence de mon classement pour les deux premiers, donc quand même quatre candidats à la présidentielle, qui s'ils étaient élus devraient être garants de la Constitution et des lois, s'insurger contre le fait que les empreintes ADN d'un syndicaliste délinquant, l'ordre des mots est important, puissent être relevées. Ils étaient accompagnés dans leur démarche par une xième couteau du parti socialiste, donc représenté mollement à l'image de son candidat et qui pourra donc dire, selon les circonstances futures qu'il était là, mais aussi pas là. Mais j'en reviens à ceux qui étaient bien présents et qui parlaient carrément de fichage des syndicalistes, comme si ces derniers, vu leur nombre, n'étaient pas connus. Car pour eux un syndicaliste délinquant n'est pas un délinquant quelconque, ce qui le caractérise en premier c'est sa qualité de syndicaliste, et ce qui fait que son délit n'est pas assimilable à un délit de même ordre commis par un non-syndicaliste, c'est que celui-ci est commis lors d'une activité syndicale. Je ne sais pas si je suis clair, mais pour résumer, si moi, non syndiqué, je commets un délit il est normal que j'encours toutes les rigueurs de la loi, tandis qu'un syndicaliste commettant le même délit, dans le cadre de ses activités, mettons, doit bénéficier d'un régime spécial. Un peu comme le Président de la République, quoi!
 
Revenons une seconde sur les faits. Lors d'une manifestation contre le sort qui leur est réservé par Continental, une bande d'abrutis, syndiqués, avinés peut-être, je ne sais pas, pénètrent dans la sous-préfecture de Compiègne qu'ils saccagent en bonne et due forme. Il y a dans cet acte au moins deux choses qui me gênent : la première est que l'action syndicale ne me semble devoir autoriser la violence, la seconde est que la sous-préfecture de Compiègne est équipée grâce aux impôts que je paie. La destruction de biens publics étant punie par la loi, il se trouve que Xavier Mathieu qui menait les opérations a été condamné à 4000 euros d'amende. Il faut dire que ça a été peut-être d'autant plus facile de le condamner car souvent on est clément avec les syndicalistes saccageurs, bien qu'en l'occurrence on puisse trouver qu'une amende de cet ordre sans peine de prison à la clé, même avec sursis, est un verdict relativement clément vu la nature des dégâts imputés finalement en grande partie aux contribuables, que Xavier Mathieu s'était démarqué de son syndicat, la CGT, ou du moins du dirigeant de ce syndicat jugé trop accommodant. Ceci dit il n'avait pas forcément tort puisque la récente unanimité au Parlement pour étouffer un rapport sur le financement des syndicats est bien le révélateur de ce jeu que jouent ces derniers et le pouvoir en place, quelle que soit sa couleur d'ailleurs. Je suggérerai en conséquence à Xavier Mathieu, la prochaine fois qu'une envie violente le prend de manifester son mécontentement face aux injustices que connait le monde salarié, d'aller saccager le siège de la CGT. Il ne se trompera pas de cible cette fois. Par contre la peine risque d'être plus lourde, au nom de la même connivence.
Donc Mathieu, condamné, officiellement délinquant, doit en plus se soumettre à cette formalité qu'ont les délinquants de voir leur ADN figurer dans un fichier des délinquants. Ce qu'il refuse et ce qui lui vaut de repasser devant le juge qui, contrairement au réquisitoire du parquet, le relaxe. Parce que notre système judiciaire est comme cela : un juge n'est pas tenu de faire appliquer la loi. Et c'est donc l'appel du même parquet qui nous conduit à cette très récente manifestation dont semblent absents les syndicats mais où on trouve donc nos quatre bien rouges candidats à la présidentielle assistés de loin par une vague sénatrice du PS, envoyée là au cas où. Hollande est à Bordeaux et les autres grands pontes du PS sans doute en train de l'acclamer, même si nulle part il n'en est fait mention.
 
Alors la question qui se pose est la suivante : le relevé d'empreintes ADN sur un syndicaliste délinquant correspond-t-il à une volonté de ficher les syndicalistes, ou simplement à une application de la loi? Une loi générale, comme le sont toutes les lois d'ailleurs, mettant tous les délinquants et criminels jugés dans le même sac, qu'ils soient pédophiles, serials killers, voleurs de sacs de mémés, dealer, casseurs ou syndicalistes ayant commis les mêmes crimes et délits. Cette loi est ce qu'elle est, on peut l'approuver, la trouver débile, mais en tout état de cause, tant qu'elle n'est pas abrogée elle est opposable à tous. Moi-aussi il y a quelques lois qui me dérangent, et même qui nuisent à mes intérêts. Pourtant je les respecte. Parce que c'est comme ça, parait-il que ça fonctionne dans les Etats de droit. D'où ma surprise de voir des candidats à la présidentielle, d'extrême-gauche il est vrai donc peut-être pas très attachés à l'Etat de droit, et le PS, représenté par sa sénatrice, revendiquer pour un individu et même au-delà, un groupe d'individus ayant pour caractéristique commune d'être des syndicalistes, la non-application de la loi.
Certes, on peut nuancer. Eva Joly, par exemple, mais je crois que c'est la seule des quatre, a déclaré qu'il fallait changer la loi, ce qui est une démarche normale. Mais ceci nous ramène au début de ce billet: pourquoi ceux qui exigent une réforme du statut pénal du Président de la République pour en faire un justiciable comme les autres, sont également ceux qui envisagent des dérogations à la loi pour les syndicalistes, voire même une réforme de la loi qui leur donnerait un statut particulier, notamment celui de ne pas pouvoir figurer au fichier des délinquants même s'ils sont condamnés comme tels?
Je sais que malgré la Révolution, que malgré presque 150 ans d'Etat républicain, il existe encore en France un réel attachement à un ordre féodal d'ancien régime, ou un certain corporatisme, mais on aurait pu espérer que des leaders d'extrême-gauche, et en particulier Madame Joly à qui tellement de choses déplaisent en France, échappent à ce travers.
 
Quoiqu'il en soit le jugement sera rendu en février. On verra à cette occasion si le juge, peut-être lui-même syndiqué, est partisan d'un retour en arrière avec l'édiction de nouveaux privilèges pour un certain groupe d'individus ou un défenseur de l'ordre républicain.

 

4 commentaires:

  1. le pire est de voir ce désordre militant ultra gauche sortir du bois tout à coup sur une désobéissance individuelle de XM pour une loi quelque peu trop "généraliste" et de ne pas pouvoir se souvenir exactement ce que l'ultra gauche a fait pour sauver Continental
    Comme personne n'a rien dit lors de l'appel du Parquet au dernier jugement
    Mesure costaud quand même
    Je ne sais pas à quoi sert de venir ainsi dégommer nos institutions sur les parvis alors qu'aux chambres tout passe
    même si ce commando n'a pu s'exprimer parlementairement
    une démocratie barbare
    le poignant est qu'au bout du compte ce XM aura joué les lampistes d'un syndicalisme qui n'a rien à envier au barbare si on se souvient de la violence Conti et des humiliations infligées aux dirigeants
    feu de broussaille révolutionnaire en modèle réduit, juste pour emmerder
    mais franchement cette histoire de fichier c'est pas possible! on est tous fichés, et du temps des RG mailles serrées! faut encore un coton tige?

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  2. Faut dire que je les comprend un peu les 4 mousquetaires. Il leur faut bien trouver des lieux d'expression, attirer la curiosité des médias, pour rappeler qu'ils sont encore candidats.
    Du coup un petit cinéma, sans doute mené en concertation et qui n'intéresse même pas les syndicats, à priori, pourtant les principaux intéressés.
    Quant au XM, lui, il n'a rien compris, d'où d'ailleurs cette indifférence que son sort inspire aux syndicats, à comment ça marche entre eux, les syndicats, et le pouvoir.
    J'ai eu la visite de machin en bas. Tellement éloquent que j'ai gardé sa prose uniquement pour moi. mais je lui ai quand même répondu.

    Au fait il y a un bel article sur le figaro concernant le fonctionnement de la CFDT à Seafrance. Eloquent.

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  3. j'ai vu, j'ai du arriver pendant votre manoeuvre, lisant les félicitations et vous répondant je t'aime
    en retournant croyant avoir eu la berlue, votre réponse en entier, ouf!
    ma che facciamo in questo mondo?

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  4. Ce qui est bien en bas, c'est qu'on peut entrer dans les commentaires et les modifier parce que là on est très éloigné de la première mouture.

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