"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

mardi 4 octobre 2011

Autour de l'affaire Neyret



Le commissaire Neyret a dormi la nuit dernière à la prison de la Santé. Si l'incarcération est normalement après une mise en examen la solution à éviter pour un juge, ça n'aura pas été le cas dans l'affaire concernant ce policier. Je ne sais pas s'il est coupable de tout ce dont on l'accuse, pour faire court d'être un ripoux, par contre je sais qu'il était considéré jusqu'à la semaine dernière comme un des meilleurs flics de France avec un bilan digne de tous les éloges. C'est sans doute ce qui lui vaut l'insigne honneur de rejoindre ceux qu'il a contribué à mettre en taule. Les malfrats avérés, eux, bénéficient d'une plus grande mansuétude. Je ne vais pas ici vous citer la litanie des cas qui hérissent le poil des policiers et déroutent ou dégoutent l'opinion publique en général. Le commissaire Neyret a des états de service remarquables, donc il doit payer le prix fort. Sa déchéance avant même son procès doit être exemplaire.
 
Comme ces histoires de gens quelque peu hors normes m'intéresse, j'ai fait quelques recherches sur le net et j'ai à cette occasion retrouvé une vieille affaire dont le nom m'a tout de suite interpelé, même si je ne m'en rappelais plus les tenants et les aboutissants. C'est une affaire qui remonte aux années 80 et qui a vu aussi un policier aux débuts de carrière très prometteurs se faire pourrir par un juge, passer de son poste à la PJ directement à la case prison. Pour se faire totalement blanchir par la suite. Il s'agit de l'affaire Jobic que je vais essayer de résumer en quelques lignes, sans entrer dans des détails fastidieux..
Le commissaire Jobic est chef des unités de recherches de la 1e division de Police judiciaire quand la PJ des Hauts-de-Seine interpelle un certains nombre de petits dealer ou supposés tels. L'affaire est confiée à un certain juge Hayat. Parmi ces petits malfrats figure un des indicateurs de Jobic. Celui-ci l'ayant appris un peu tard ne peut pas intervenir avant que la procédure soit bouclée et se rend donc chez le juge pour lui exposer le cas de son indic. Le juge le prend assez mal et plutôt que de se contenter de renvoyer Jobic à ses affaires, le soupçonne d'être un ripoux et mandate la gendarmerie pour enquêter sur lui. Là se passent des choses assez extraordinaires, à savoir le recueil pour le moins douteux de prostituées et de toxicomanes mettant en cause le commissaire Jobic. Témoignages douteux car parallèlement la PJ des Hauts-de Seine recueille le témoignage d'une prostituée mettant en cause cette fois, non pas le commissaire Jobic, mais le juge Hayat qui aurait demandé à cette dernière d'attirer le commissaire dans ce département où il est compétent et de luis glisser de la drogue dans les poches pour le faire interpeler dans la foulée.      En fait beaucoup de fantaisiste et aucun fait. Mais le dernier témoignage évoqué permet à Jobic de contre-attaquer de porter plainte contre X pour forfaiture et atteinte à la vie privée. X s'étant évidemment reconnu prend mal les choses et envoie Jobic en prison. Lequel sera blanchi lors de son procès et indemnisé à hauteur de 150000 francs pour incarcération abusive et préjudice particulièrement anormal et grave.
De fait cette procédure n'aurait jamais dû avoir lieu. Mais les motifs de l'acharnement du juge Hayat se situent à un autre niveau que celui de la justice. Membre du syndicat de la magistrature que sa femme préside, d'ailleurs à l'époque, c'est donc évidemment un homme aux convictions de gauche affirmées, confondant peut-être son militantisme et son boulot. De fait il déclare à Jobic qu'il n'a rien de matériel contre lui, mais qu'il a l'intime conviction qu'il est
le maillon d'un important réseau de policiers qui alimente, avec l'argent de la prostitution, les finances d'un parti d'opposition. Donc un parti de droite, vu l'époque. Et donc à partir de cette intime conviction de militant certainement, le juge n'hésite pas à briser la vie d'un homme. Certes Jobic sera réhabilité mais n'aura pas la carrière que ses qualités présageaient. Et on n'efface pas non plus quelques mois de prison avec de l'argent. Le juge Hayat, par contre, poursuivra et poursuit toujours une belle carrière. Il aura été en outre conseiller de Ségolène Royal, pas toujours avisée dans le choix de ses collaborateurs comme on le voit, alors qu'elle était ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.
 
Je me suis permis d'évoquer cette affaire ancienne déjà, pas seulement pour relever une certaine ambiance qui peut régner entre la justice et la police, mais pour revenir sur un point que j'estime commun avec l'affaire Neyret : le traitement des indicateurs. On devine, enfin moi j'essaie de deviner n'étant pas introduit dans le milieu policier, que sans indics de nombreuses affaires ne pourraient être résolues. Et que les bons indics se trouvent être aussi des personnes introduites dans le milieu du crime et de la délinquance. Il faut donc aux policiers se créer un réseau d'indics et pour cela les attirer par autre chose que l'apologie de l'esprit civique. Donc par un rémunération en espèces sonnantes et trébuchantes ou en nature, voire par une protection. Des choses peut-être pas bien morales, mais les seules choses susceptibles de fonctionner. Dans l'affaire Jobic on voit qu'il s'agit de protection, dans l'affaire Neyret, du moins je pense que la défense utilisera cet argument, on devine qu'il s'agit de rémunération en nature à laquelle s'ajoutera une "infiltration" du commissaire dans le milieu. En fait on se rend compte que tout ça c'est quand même dangereux pour les policiers qu'on pourra toujours accuser un jour d'avoir franchi la ligne jaune, difficile à délimiter, sauf évidemment si on s'en tient strictement à la loi qui définit un statut de l'indicateur et la rétribution des informations délivrées par lui, contre reçu. La valeur de l'information valide est de 50 euros, si je ne me trompe. On voit tout de suite l'efficacité de cette loi qui protégera certes les policiers qui la respecteront à la lettre mais fera baisser sensiblement leur taux d'élucidation. On est là dans le choix entre l'efficacité et la morale, choix que d'ailleurs on essaie de nous imposer dans un tas d'autres domaines en tentant de faire pencher invariablement la balance du côté de la morale t sans aucun discernement. Tout ça risque de mal finir, mais au moins si nous finissons mal ce sera en tant qu'être vertueux.
 
Reste que je me pose toujours cette question : pourquoi Neyret, toujours présumé innocent, et aux états de service remarquables est-il sous les verrous pendant que de vrais salopards reconnus attendent paisiblement leur procès chez eux. Une réponse, monsieur le juge?

2 commentaires:

  1. parce qu'il faut qu'il balance every body, ils sont déjà 7 en examen, dont un ancien de ma bonne ville paraît il, un de Cannes....

    ces pratiques de rémunération des indic avec de la blanche sont interdites
    Les douanes payent mieux parait il que ces 50 euros misérable (au bout de la rue il y a un flingue pour l'indic souvent

    mais la magistrature se régale, si elle pouvait embastiller tout l'Intérieur et Guéant avec elle le ferait

    pour l'heure un homme seul mijote au quartier VIP, Guéant l'a destitué, même s'il y a non lieu, ou peu, il est foutu,
    ce genre de cow boy faut se méfier de leur manière d'envisager leur vol arêté

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  2. Hier je lisais qu'un assassin ayant reconnu les faits et en attente de procès avait été libéré sur arrêt de la cour de cassation pour une question de délais de procédure, non respectés par la justice. ça se passe à Pau.
    par ailleurs le criminel verra ses aveux passés en garde à vue annulés du fait de la rétroactivité de la loi sur la présence des avocats. Du coup les faits seront peut-être requalifiés et passibles non pas des assises mais de la correctionnelle.La victime était un jeune de 18 ans je crois. Et désormais ce sont ses parents qui doivent vivre avec ça.
    Là je me dis qu'il y a quelque chose qui ne comme plus du tout et ça me fait mal au ventre que les jugements soient rendus au nom du peuple français qui doit quand même, espérons-le avoir du mal à se reconnaitre dans ce type de décision.
    Là-dessus l'incarcération de Neyret me met encore plus les boules. En fait les juges font en gros ce qu'ils veulent sans jamais être inquiétés comme Hayat et dans une moindre mesure le juge d'Outreau dont j'ai oublié le nom. Pas de faute professionnelle chez eux, pas de partisanisme ouvertement affiché. On croit rêver. On peut dire que c'est le seul pouvoir sans contre-pouvoir et qui en plus ne cesse de se plaindre de subir des pressions. un peu comme les médias à la botte et qui n'ont jamais autant médit sur le pouvoir. Faut arrêter de nous prendre pour des cons.

    Quant aux indics payés 50€ l'info contre reçu, faut arrêter là aussi. ceux qui pondent des trucs comme ça ont subi une lobotomie sans doute. Peut-être même que c'est imposable ces 50€. Et peut-être que demain on aura un tordu qui voudra leur donner un statut de fonctionnaire, auxiliaire de justice ou un machin comme ça. On est au-delà du délire dans ce genre d'affaires.

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