"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

mercredi 12 octobre 2011

Les primaires : on en redemande



Surtout quand elles sont socialistes, citoyennes, démocratiques et tout et tout, et quand on est de droite.
 
Il y a peu de temps de cela je notais le franc succès médiatique, suite au battage du même qualificatif qui précéda le premier tour de ces primaires. C'était effectivement assez bien joué, bien que demeurent certaines questions pour que l'exercice puisse être vraiment qualifié de démocratique, et particulièrement le moyen de donner un temps de parole équivalent à tous les partis présentant un candidat à cette élection. Il y avait aussi cette question soulevée en son temps d'un possible fichage surtout des non participants à l'élection supposés être des salauds de droite, argument sans objet véritable dès lors que seulement 2,5 millions de personnes se sont déplacées sur un potentiel d'environ 20 millions. Mais il parait que c'est un succès massif. Inespéré serait peut-être mieux adapté. Faut quand même dire que mobiliser 2,5 millions d'individus pour voter Hollande ou Aubry, c'est assez remarquable.
Donc, bien que les primaires, ce ne soit pas vraiment mon truc, j'y reviendrai, je trouvais jusqu'à il y a peu l'exercice habile politiquement et en redoutais les effets positifs pour la gauche. Mais depuis il y a eu le premier tour et ensuite le début de la préparation du second. Et là quand on n'est pas socialiste, franchement on se régale et on en redemande.
 
Voyons tout d'abord les résultats du premier tour. Le grand enseignement à en tirer, c'est qu'il n'y a toujours pas de leader qui se détache au PS. Quel que soit le candidat désigné, il aura eu moins de 40% des voix au premier tour de ces primaires et quand même c'est pas beaucoup. Surtout comparé aux plus de 60% obtenus par Ségolène lors des précédentes primaires juste socialistes celles-là, j'y reviendrai aussi, lesquels se sont traduits par un soutien, disons déficient, de la part du parti lors de sa tentative de conquête de l'Elysée. Le second enseignement, c'est que c'est le centre gauche européiste, celui qui avec Delors comme inspirateur nous a offert cette belle Europe ouverte aux quatre vents aux capitaux, aux marchandises et aux personnes tout en étant incapable de rien gérer. Là je suis assez d'accord avec Montebourg quand il dit que Aubry et Hollande sont les deux faces d'une même pièce, l'une étant la fille biologique de Delors et l'autre son fils spirituel. Alors évidemment ça peut nuire à Sarkozy, car on sait que ces gens-là ne modifieront pas l'ordre établi, mais pour le choix démocratique ce n'est quand même pas terrible. De fait quel que soit le résultat de cette élection, on restera gouverné au centre, ce qui explique, je crois l'avoir déjà dit ailleurs, que celui-ci manque d'air dans l'arène politique. Certes il y a bien le succès relatif de Montebourg, mais 400000 voix ce n'est quand même pas une tendance forte pour l'avenir, c'est juste le reflet d'une tendance, d'un courant on dit chez eux, qui existe depuis longtemps au PS avec Hamon ou Emmanuelli, et désormais au parti de gauche de Mélenchon. Mais c'est néanmoins très intéressant dans le cadre des primaires, du moins dans le cadre du second tour.
 
Car aucun candidat n'ayant réussi à obtenir une telle avance qu'il est certain de l'emporter, il faudra bien compter sur ces voix échues à Montebourg pour l'emporter. Et celui-ci n'a donc pas hésité à faire monter les enchères en jouant le minoritaire indispensable, capable de faire un roi ou une reine dimanche prochain. Il laisse déjà deviner le rôle identique que joueront les verts à l'occasion du second tour de la présidentielle. Le rôle du chiant capable de faire adopter des mesures dont personne ne veut même pas le peuple dans sa majorité parce que son appoint est indispensable. Et c'est donc très drôle, même si ce n'est pas joli de voir nos deux prétendants tortiller du croupion en prétendant ne pas revenir sur leurs propositions tout en jurant bien fort que celles de Montebourg figurent bien évidemment dans leur programme. Mais vous reconnaitrez qu'il est quand même incongru de vouloir imposer des pans d'un programmes qui n'at recueilli qu'une minorité de voix, même si le score est supérieur à celui escompté. Là il y a quelque chose qui ne colle pas avec l'esprit démocratique des primaires. Mais Montebourg n'en a que faire. Ambitieux, arrogant, il roule davantage pour lui que pour le PS et surtout chacun des deux finalistes qu'il doit mépriser sincèrement. Lui, il prépare déjà 2017. Il aura 54 ans, donc le bon âge. Et pour avoir une chance sérieuse à cette échéance ce serait quand même dommage que la gauche l'emporte. Il y a peu de chance qu'on remette en cause à cette époque la légitimité du président sortant. Et en cas de forte déception de la part des Français qui après l'espoir généré par la fin du sarkozysme qui a "abimé la France, appauvri et divisé les Français" n'auraient pas vu se concrétiser le bonheur promis par cette gauche d'opposition, la droite repartirait pour 10 ans au moins. Montebourg aura-t-il au nom des intérêts de son parti la patience d'attendre ses 59 ou 64 ans pour espérer voir se réaliser son rêve? Je vous laisse deviner.
Et puis il y a cette charmante ambiance d'entre deux tours. Les soutiens des uns et des autres, quand ce ne sont pas les candidats eux-mêmes, mais de façon plus feutrée, ne sont plus très loin de se lancer des noms d'oiseau. Hier j'écoutais la députée Aurélie Filipetti qui s'exprimait dans le "talk" du Figaro, donc chez l'ennemi et qui entre autres gracieuseté déclarait que la camp Hollande n'avait aucune leçon à recevoir d'une candidate de substitution. Moi quand j'entends ça je jubile. Là, au moment où j'écris, on est à quelques minutes du débat entre les deux premiers secrétaires, l'ancien et l'actuelle. Je ne pense pas que je vais le suivre, mais j'en lirai les comptes-rendus. J'imagine qu'il n'y aura pas de gros dérapages de la part de l'un ou de l'autre, mais j'imagine aussi que quelques mots doux ou allusions ne manqueront pas de fuser. En tout cas il me semble que les bases de la défaite aux présidentielles sont en train de se renforcer de jour en jour. Et les messages d'union qui fleuriront dès dimanche soir ne parviendront pas à masquer ces haines qui déchirent le parti socialiste depuis au moins 2002.
 
Comment cela aurait-il pu être évité? Eh bien c'est assez simple. En n'organisant pas de primaires ou alors en huis-clos, entre socialistes.
Personnellement je suis contre cette idée de primaire, car elle ne correspond pas à l'esprit de nos institutions. Je sais, Sarkozy l'a dit aussi. Mais de temps en temps je parviens à me déterminer sur les choses autrement qu'en me référant à celui qui les dit. D'ailleurs j'en avais déjà parlé dans un billet précédent. Pour faire plus démocratique encore on pourrait organiser plein de primaires. D'abord au sein de chaque parti, et pourquoi pas au sein de chaque tendance au sein des partis. Ensuite on pourrait organiser des primaires par grande famille politique. Et ensuite on pourrait commencer véritablement l'élection avec en gros 5 candidats, un d'extrême-gauche, un du reste de la gauche, Bayrou, un de la droite dite républicaine, et Marine Le Pen supposée vu ce qui précède ne pas appartenir à un parti républicain. L'exercice prendrait deux ans et réconcilierait les Français avec la politique puisqu'avec les autres élections ils auraient en permanence une carte d'électeur à la main. Démocratie à tous les étages et même sur les paliers d'entre-deux, et pourquoi pas sur chaque marche. On n'est jamais assez démocratique dans nos comportements. Et une élection à 32 tours au moins devrait nous permettre de trouver enfin le bon ou la bonne.
Par ailleurs je pense qu'un parti qui est obligé d'organiser des primaires et un parti qui n'a pas de leader. Pour faire bien, enfin démocratique, pardon, on peut se faire un truc vite fait comme l'avait fait l'UMP avant la précédente présidentielle en connaissant le résultat par avance car on a déjà identifié le leader. Et celui-ci, naturellement devrait être le dirigeant du parti. Comment penser que les militants d'un parti puissent désigner celui qui les préside sans penser que c'est le meilleur pour le faire? Le meilleur tout court, donc. Celui qui les représentera aussi lors de l'élection-reine. Eh bien au PS, à priori on le peut. On peut par exemple désigner Martine Aubry en 2008, en trichant un peu, parce qu'à l'époque elle n'a pas d'ambition présidentielle et qu'elle ménage donc les ambitions, notamment celles des absents comme DSK. C'est évidemment pour cette raison que Ségolène ne pouvait pas, ne devait pas prendre la tête du parti. C'est en 2008 que cette dernière a vu toutes ses chances de voir se réaliser ses ambitions disparaitre définitivement. Elle a laissé faire, tant pis pour elle. Quand le chef d'un parti ne fait que 30% à des primaires, on peut s'interroger sur ses réelles capacités à diriger ce parti. Et quand c'est l'ancien chef du parti, pourtant bien critiqué, et qui n'a pas voulu relever le gant quand il était en fonction, qui a les meilleurs résultats, là on se dit que quelque chose ne tourne pas rond dans la maison socialo. A moins qu'elle se soit mise à l'autogestion. Alors après on peut camoufler tout ça derrière la volonté de répondre à une aspiration du peuple pour davantage de démocratie et se congratuler de voir 12,5% des électeurs potentiels se déplacer. Reste que derrière tout ça se cache la réelle politique d'un parti qui n'a pas de programme ou qui en a peut-être trop, qui n'a pas de chef véritable, mais qui dispose en son sein d'une forte concentration d'égos, rivaux potentiels.
Pour terminer, et même si ça fait plus démocratique, je ne parviens pas à comprendre comment un parti peut organiser des primaires pour désigner son candidat (zut! J'ai oublié Baylet) en faisant appel à l'avis, que dis-je au choix d'électeurs venant de tous horizons. Environ 200000 adhérents au PS, et 2,5 millions de votants. Moi si j'étais militant PS, dieu m'en garde, je rendrai illico ma carte. Car cela signifie que je suis incapable de choisir mon représentant et dois donc demander l'avis d'extérieurs. Je ne sais pas quel aurait été le résultat de ces primaires si seuls les socialistes avaient votés, mais je suis prêt à parier que Montebourg aurait sans doute fait beaucoup moins, et donc Ségolène beaucoup plus. Comme c'est lui qui a monté l'affaire, et c'est habile, il a sans doute réussi par la méthode à aller capter des voix à gauche du PS, chez son pote Mélenchon et les autres. C'est vrai qu'à l'origine on pensait (qui? Montebourg?) faire des primaires pour toute la gauche. Dans ce cas évidemment la large ouverture et même l'idée de primaires se défendait. Qui pouvait croire à cette connerie, hein? Comme si Mélenchon, les écolos et toute la bande encore plus à gauche allaient renoncer à l'élection où on vous offre un droit et un temps de parole inespéré en temps normaux. Et là je ne parle pas des egos. Les militants socialistes se sont donc vus contraints d'accueillir dans le corps électoral qui doit désigner leur champion des sympathisants, des militants d'autres partis présentant eux-mêmes leur candidat à la présidentielle! Et tout le monde trouve ça bien! C'est démocratique, il parait. Donc c'est certainement très bien.

2 commentaires:

  1. excellent billet
    j'ai regardé le débat, je vais en faire une photographie
    le débat de trop, ce soir la gauche a perdu les élections

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  2. Selon les commentaires sur le débat, je ne me suis pas trompé. En plus il parait que c'était chiant au possible.

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