"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

samedi 23 août 2014

L'ère de la désinformation ou de l'intox





Nous avons en occident, parait-il, un quatrième pouvoir constitué par les médias. Ce quatrième pouvoir, et là je me limiterai au cas français, devrait logiquement limiter les possibles excès des trois autres pouvoirs qui eux-mêmes devraient être en mesure de modérer ceux des deux autres.
Or, dans certaines configurations, il apparait que tous ces quatre pouvoirs marchent d'un même pas pour cette fois en contrôler un cinquième qu'on ne présente jamais comme tel, et pourtant il parait que nous sommes en démocratie, et qui n'est autre que l'opinion publique.
Je fais partie de ceux qui pensent, mais sans doute suis-je dans l'erreur ou pas dans l'air du temps, qu'une démocratie digne de ce nom ne peut fonctionner que quand les citoyens sont éclairés.
Là je pourrais faire un long développement, mais je m'en abstiendrai, sur la formation du citoyen, sur la mise à sa disposition dès lors qu'il entre dans le système éducatif des moyens nécessaires à son libre-arbitre, pour finir par un triste constat que la résistance de quelques enseignants à des dérives idéologiques post-soixante-huitardes ne pourrait guère atténuer. Dès lors que le pouvoir ne veut pas se montrer coercitif, car il est des apparences démocratiques à conserver, il devient nécessaire de former des crétins. Et ici quand je parle de pouvoir, je ne me réfère guère à ceux institutionnels qui eux aussi sont apparence, mais à une sorte de nébuleuse dont on ne sait guère qui en est à la tête, cachée derrière des institutions supranationales dont les dirigeants ne font guère illusion, et c'est d'ailleurs pour cela qu'on les a choisis, quant à leur maitrise sur les événements. Pensez juste une seconde au trio van Rompuy, Barroso, Ashton pour en être définitivement convaincus.

Les médias quant à eux ont pris ce chemin d'une institutionnalisation vide de sens. Tributaires davantage du pouvoir (celui politique ou celui des actionnaires majoritaires) que de leur lectorat pour la presse ou audimat pour la télévision ou la radio pour subsister, mettant en avant des journaliste-vedettes dans le cadre du spectacle qu'on nous sert,  plutôt que les vrais journalistes de terrain qui pour certains risquent leur vie et même meurent pour tenter d'informer et dont souvent les informations qu'ils rapportent seront adaptées au message officiel qu'on veut faire passer, les médias sous des apparence de liberté, sont devenus pour la plupart des laquais n'ayant rien à envier à la Pravda à l'époque de Brejnev.
Pour illustrer mon propos je voudrais juste citer une anecdote concernant Patrick Bourrat, grand reporter pour TF1 et mort au Koweit dans l'exercice de ses fonctions. Alors qu'il était en poste à Moscou, et là aussi il avait risqué sa vie, il faisait des reportages dépeignant systématiquement la Russie sous son côté le plus sombre. Interpelé par une connaissance sur cette partialité, voici la réponse qu'il fit : "Tu sais, à Paris, j'ai un rédacteur en chef. Il a en tête une certaine image de la Russie avec des pointillés. Si mes reportages remplissent ces pointillés, ils passent à l'antenne. S'ils ne les remplissent pas, ils ne passent pas. Et si mes reportages ne passent pas à l'antenne, mon prochain poste sera au Botswana ou au Zimbabwe…" C'était il y a une vingtaine d'années. Et les choses ne se sont pas améliorées.
Dans le même ordre d'idée on a Olivier Ravanello déclarant que "l'information sur la Russie est faite à Paris". Ce que je confirme étant donné la distorsion entre ce que je peux lire et ce que je vis au quotidien. Au passage, pour vous rassurer sur mon sort et contrairement à ce que vous ne manquerez pas de lire bientôt, malgré l'embargo sur les produits alimentaires, les étals restent pleins (un peu moins de viande c'est vrai) avec maintenant des étiquettes sur la provenance  indiquant Serbie, Pérou, Argentine, Chili, Equateur, Egypte, Israël (tiens une raison de plus pour les haïr!),…

J'ai déjà produit quelques billets sur la crise ukrainienne. J'ai cette chance d'être placé à la croisée de deux informations sur le même sujet et qui ne se ressemblent pas. C'est le moins qu'on puisse dire. Au point qu'une synthèse est impossible à réaliser donnant une idée qui pourrait être à peu près objective de la situation réelle. Médias asservis de part et d'autre.
Mais quand des pays mettent en avant leurs valeurs démocratiques, s'appuient sur ces valeurs pour valider leurs choix stratégiques (ce qui au passage serait une nouveauté, les intérêts primant évidemment sur les valeurs dans le cadre de ce qu'on appelle la Realpolitik), ne deviennent-ils pas désavantage critiquables? Le droit international, la vertu, les valeurs sont proclamées comme fondement de décisions dont ceux qui les prennent n'ont que faire. Et les médias ont pour rôle, en tronquant l'information, en pratiquant l'indignation sélective, en balançant des seaux d'émotion à la tête de leurs lecteurs, auditeurs ou spectateurs, d'appuyer cette hypocrite vision du monde. Je vais donner quelques exemples plus loin.
Les médias n'informent plus. On n'y trouve que très peu de véritables analyses. Ils désignent le camp des gentils et celui des méchants. Ce n'est pas nouveau. La guerre en ex-Yougoslavie fut en ce sens exemplaire. C'est d'ailleurs au cours de cette guerre que l'idée s'établit d'accompagner les opérations par des communicants, en particuliers les spins-doctors de Blair. J'ai encore en mémoire lors de la guerre du Kosovo, il fallait absolument que les Serbes soient les méchants et les Kosovars de pauvres victimes (on voit ce qu'il en est!), de l'inénarrable Jamie Shea, porte-parole de l'OTAN (qui au passage intervenait sans mandat de l'ONU), un de ces communicants qui pourrait vendre du sable en sacs à des bédouins, venir chaque jour nous raconter son petit conte de la journée. Un jour, parce qu'il fallait justifier une bavure, il réussit même à nous persuader qu'un tortillard à vapeur roulant sur un pont de bois branlant avait débouché à une telle vitesse, au moins celle d'un TGV, qu'il s'était  par mégarde placé sur la trajectoire d'un missile lancé par un pilote qui évidemment visait une autre cible.
C'était de l'information de guerre. Mais l'esprit était déjà là qui persiste actuellement à justifier des prises de position, notamment en politique étrangère. Certes on y va un peu moins fort, faudrait pas que ça paraisse trop gros, et les rédactions en général ne disposent pas de Jamie Shea, ce genre d'animal étant quand même exceptionnel et de toute façon pas dans les moyens des médias.

Maintenant où en sommes-nous? On balance des informations non vérifiées, et sans doute non vérifiables parce que fausses. Hypothèses d'une journée, elles deviennent subitement réalité. Et si la vérité risque de pointer son nez, alors on met bien tout ça sous le couvercle.
Quelques exemples. Je reste sur l'Ukraine pour les raisons indiquées plus haut.
Il y a quelques jours, "Kiev" déclare avoir anéanti une colonne de blindés russes ayant pénétré sur on territoire. Obama, Merkel, Cameron et les autres dont notre pépère-suiveur crient au scandale, menacent de nouvelles sanctions. L'info est devenue réalité alors qu'elle ne repose que sur des affirmations de l'une des partie bien incapable de fournir des preuves, même pas un petite photo, même un peu truquée, parce qu'il n'en existe sans doute pas. Les services américains diront d'ailleurs le lendemain qu'ils n'ont pas encore d'éléments prouvant un franchissement de frontière. Mais tout ça n'est pas grave, le mal est fait. Enfin le mal…façon de parler car il y a sans doute des intentions là-dessous. Le fait que l'OSCE n'ait rien vu ne constituera d'ailleurs aucun obstacle pour relayer une fausse information de ce type, et même pas un emploi du conditionnel.
Un peu plus tard; "Kiev" toujours annonce avoir mis la main sur deux blindés russes dont les occupants n'étaient pus là, sans doute partis boire un verre un peu plus loin. La preuve, ils ont retrouvé la sacoche d'un officier russe dans un des chars, avec toutes ses coordonnées. Ça ne gêne pas nos médias de publier ça alors que jamais aucune preuve n'a été montrée et que l'OSCE n'a toujours rien vu.
Et je pourrais citer une litanie d'infos de ce genre, celles balancées par "Kiev", par Rasmussen ou autres qui ont la preuve que, mais qui sans doute pour ne pas froisser les Russes ont la délicatesse de n'en jamais montrer une seule.

Mais peut-être quand même un peu plus grave, c'est l'affaire du vol MH 17 abattu évidemment par les rebelles, pardon les terroristes, grâce à un système d'armes sophistiqué et lourd (5 engins blindés) qui a franchi la frontière russe dans les deux sens à l'insu des satellites braqués sur cette frontière. Bon, l'affaire est dans le sac, sanctions aggravées, contre-sanctions (bien évidemment honteuses et même illégales – on va saisir l'OMC - et injustifiées et qui de toute façon ne nous ferons même pas mal, mais par contre les autres…), le ton monte, le méchants sont vraiment méchants et heureusement que les gentils sont là, etc.. Le crash c'était il y a plus d'un mois déjà. Depuis les boites noires ont été retrouvées, fournies d'ailleurs gracieusement par les séparatistes, pardon encore, terroristes, semblant curieusement, mais là les journalistes ne s'en sont guère inquiétés, bien silencieuses. Depuis des experts ont accédé bien difficilement sur le lieu du crash, devenu, mais ça évidemment personne ne s'en est vraiment offusqué ou ne s'est interrogé sur les causes, zone de combat (la zone étant sous contrôle rebelle, elle ne pouvait évidemment devenir zone de combat que par la volonté de "Kiev"). En fait plus personne n'en parle de ce crash. Normal puisque le coupable est connu même si par ailleurs aucune preuve tangible n'a pu être apportée à ce sujet. L'actualité est ailleurs sur le coup de boule donné par un joueur de foot à un autre ou, si on en revient à l'Ukraine sur les accusations d'invasion du pays par des sacs de riz et des bouteilles d'eau minérale venant du pays des méchants. Ça doit sans doute être la première fois que le conseil de sécurité de l'ONU se réunit pour se pencher sur le bien-fondé d'une opération humanitaire. Ça ça pourrait faire un bon sujet pour un papier, non?
Donc plus d'un mois après un crash meurtrier, les médias ne s'étonnent pas qu'on n'en sache pas plus. Le problème réside ans doute dans le fait que la raison de ce silence n'est guère avouable. Rassurez-vous, je ne vous donnerai pas le nom d'un coupable qu'il faudrait taire. Juste une information émanant d'une source ukrainienne, l'agence de presse Unian. Dans un article en date du 12 août cette agence (qui a pignon sur rue à Kiev) fait état d'un protocole signé entre l'Ukraine, la Belgique, l'Australie et la Hollande obligeant au secret pendant le temps de l'enquête dont les résultats finaux ne seront divulgués qu'avec l'accord unanime de toutes en parties, chacune d'elle disposant d'un droit de veto pour s'y opposer. La Malaisie aurait refusé de s'associer à ce protocole.
Cette information n'est évidemment pas anodine car si elle et avérée, elle implique que seule une vérité et admissible. Pas la vérité, une vérité. Elle est pourtant accessible, la preuve j'y ai accédé, et reprise par quelques blogs. Mais nos journalistes préférant visiblement rapporter les accusations de "Kiev", de Rasmussen et des autres semblent bien éloignés de la volonté d'informer objectivement le public qui se rapporte à eux pour se "faire une idée, une opinion".

Voilà juste quelques éléments nous montrant comment fonctionne notre fameux quatrième pouvoir.

mardi 19 août 2014

Mais de quel peuple s'agit-il?





Je viens de lire quelques extraits du discours prononcé par notre premier ministre à l'occasion de la commémoration du 70ème anniversaire de la libération de Paris.

Le ton m'a rappelé les ordres du jour ou certains discours que j'écrivais sur commande il y a une vingtaine d'années  au profit de mon chef étoilé quand il s'agissait de remuer les tripes de quelques jeunes officiers ou sous-officiers engagés. Car effectivement aller puiser dans l'histoire, s'inspirer de quelques faits glorieux  de notre passé constitue une recette facile même si elle est de moins en moins efficace. Et d'ailleurs je changeais volontiers de registre quand il s'agissait d'un autre public, ayant disons déjà un peu vécu, et que ce genre de discours laissait au mieux froid, sauf évidemment pour ceux ayant conservé les idéaux de leurs vingt ans et s'obstinant à considérer que le décalage entre un monde imaginé et le monde vécu n'était qu'un simple aléa de l'histoire et que les choses finiraient par revenir à une situation normale. Sauf qu'évidemment le normal, c'était ce qu'ils vivaient.

Pour tout dire, et avant de refermer cette parenthèse puisque ce n'est pas le sujet,  les jeunes militaires, en général, servent une nation qui n'existe pas ou plus, tandis que les plus anciens, sauf les exceptions que je viens de mentionner continuent ou par habitude, peut-être aussi par paresse, ou par un sens du devoir leur faisant comprendre le sens du mot abnégation, mais ont cessé depuis longtemps d'écouter les discours qu'on leur adresse surtout quand ils viennent d'un milieu politique qu'ils ont tendance à mépriser et auquel dans tous les cas ils n'accordent plus aucune confiance.

Désolé pour cette digression (j'ai failli écrire transgression), pour cet étalage d'impressions qui me sont venues à la lecture de ce discours de Valls.



Voilà donc que notre premier ministre s'adresse au peuple dans son discours avec des mots aussi touchants que vidés de leur sens par lui-même, ses collègues politiques du moment ou d'avant… et sans doute d'après.

Donc je cite : "La Libération, c'est la preuve que, face à l'adversité, un peuple, s'il sait se rassembler, peut reprendre en main son destin."



Je ne reviendrai pas en détail sur les événements historiques qui pourraient réfréner certains enthousiasmes. La libération de Paris a bien davantage une valeur hautement symbolique qu'un quelconque intérêt sur le plan stratégique. C'est même en quelque sorte un coup de force des Français qui, à la limite de l'insubordination, s'éloignent des plans des alliés qui voulaient contourner la capitale. Quant à la Résistance, je vous renvoie volontiers à ce récent film "Diplomatie" où au cours d'un long dialogue entre von Choltitz interprété par l'excellent Niels Arestrup et le consul de Suède Nordling interprété par le non moins excellent André Duss olier, le premier marque son mépris pour ces Parisiens se révélant résistants quand sonne l'hallali tandis que Paris fut livrée aux allemands sans un coup de feu et que les mêmes Parisiens s'accommodèrent finalement assez bien de l'occupation.

Allez! Soyons  sympa! N'insistons pas trop sur les militaires de la 2ème DB et de la 4ème DI américaine, oublions carrément von Choltitz qui, désobéissant à Hitler, évita à Paris de connaitre le funeste sort de Varsovie, et laissons s'autocélébrer le peuple parisien. Et revenons aux propos de Valls.



Il dit "face à l'adversité". C'est bigrement intéressant. Mais de quoi s'agit-il?

Dans un récent billet je notais justement que la grande difficulté du moment, celle qui empêchait le peuple de se mobiliser, était cette incapacité de nos gouvernants de désigner un adversaire. Alors certes, ils s'en trouvent de façon opportune. Un coup la finance, puis la mauvaise finance parce qu'il en existe une bonne, parait-il, un coup le chômage, en fait des  choses contre lesquelles il est difficile de se mobiliser, de prendre les armes.

Mobilisons-nous contre la finance, c'est quand même un peu creux même si ça peut réjouir quelques nostalgiques d'une gauche disparue. Et puis ça fait un peu désignation d'un bouc-émissaire pour justifier ces échecs passés, présents et à venir. Mobilisons-nous contre le chômage, c'est du mépris vis-à-vis de ceux auxquels on a promis de mener la bonne politique pour inverser une courbe du chômage qui n'en finit pas de grimper.

Mais c'est vrai qu'il y a aussi les forces rétrogrades, ou plutôt obscures contre lesquelles il faut se mobiliser parce qu'elles constituent  une menace pour le pacte républicain. Là on ne sait pas ce que ça veut dire, du moins le pacte républicain, parce que les forces obscures, ce sont ceux qui ne pensent pas bien, qui refusent le fameux progrès auquel il serait criminel de tenter d'échapper et surtout de vouloir faire échapper les masses.

En fait on ne sait pas trop ce qu'est cette fameuse "adversité". Peut-être un indice? Dans une autre partie de son discours Valls déclare " Face à la barbarie, jamais la France ne pourra être indifférente, nulle part elle ne pourra détourner le regard." Allez Manu, un petit effort, lâche-toi, donne-nous des noms! Faut dire que c'est quand même gênant ces généralités. Autant dire qu'on est pour l'amour et contre la maladie, c'est pas moins profond finalement. Parce que, et je vous en épargnerai la longue liste, les barbaries, c'est pas ce qui manque. Il y en a d'ailleurs sans doute trop pour ne pas être obligé d'être sélectif. On en oublie certaines, en tolère d'autres, mais quand même on a la force de s'indigner contre quelques unes. Après tout on ne peut pas être partout. Encore un discours qui ne correspond pas à la réalité!

Mais peut-être, puisqu'on pourrait éventuellement supposer qu'il faille faire une analogie avec l'occupation nazie si on se place dans le contexte du discours, s'agit-il d'une forme de barbarie qui nous menace directement. Alors vite des noms, l'union nationale est à ce prix. Hélas on n'en saura pas davantage. Donc pas d'union nationale, pas de peuple rassemblé capable de reprendre en main son destin.



C'est pourtant ce qu'il souhaite dans son discours " un peuple, (qui) s'il sait se rassembler, peut reprendre en main son destin."

Personnellement je trouve ça particulièrement gonflé. Valls fait partie d'une longue lignée de dirigeants politiques qui ont fait tout justement pour que le peuple voie son destin se décider ailleurs. La preuve en est qu'il en appelle avec son piètre patron à l'Europe et à l'Allemagne (c'est pareil?) pour résoudre les problèmes de croissance de la France et partant de chômage. Valls fait partie de cette longue lignée d'hommes politiques qui ont bradé notre défense nationale et en conséquence notre politique étrangère dont elle était un des outils majeurs, mettant la France dans un alignement parfait avec Washington, même si ça peut nuire à ses intérêts. Valls est le prototype de l'européaniste atlantiste et qui ose aujourd'hui appeler le peuple à reprendre en main son destin. Si celui-ci avait envie de l'écouter, la première chose qu'il aurait à faire c'est de lui botter le cul et de le renvoyer au néant, politique j'entends. Valls, pour paraphraser Bossuet, fait partie de ces gens qui maudissent les conséquences des causes qu'ils chérissent. Dieu s'en rit peut-être, mais quant à nous il ne nous reste que les larmes.

Et pour terminer, juste histoire de justifier le titre de ce billet, j'ai envie de lui demander : mais de quel peuple parlez-vous? Cet homme de gauche, certains en doutent mais lui s'en réclame, fait partie de cette grande famille de politiques (et il en existe à droite aussi, du moins ceux-là se prétendent-ils de droite) qui  se sont essuyé les pieds sur la nationalité française, la bradant à qui la voulait et même la donnant à qui n'en voulait pas forcément mais qui avait eu cette chance ou ce malheur, tout dépend du côté où on se place, de naitre sur notre sol. Valls fait partie d'une famille d'hommes politiques qui se sont vautrés dans la repentance, qui ont revisité notre histoire pour en extirper le pire et négliger le meilleur, de ces gens pour qui une civilisation ne saurait être supérieure à une autre, toutes se valant évidemment, et qui avec le temps ont fini par tuer l'idée de nation, nauséabonde évidemment. Valls fait partie de ces gens qui emploient cette fameuse expression "peuple de gauche" invitant ainsi ce "peuple" à rompre avec une nation dans laquelle d'autres que lui pourraient se reconnaitre. Alors de quel peuple parle-t-il? D'un peuple qui n'existe plus parce que lui et ses semblables n'ont eu de cesse de le détruire.



Ah que voilà un beau discours! Des mots, rien que des mots. Un beau travail digne du "communiquant", cette nouvelle race d'hommes politiques en vogue, qu'est notre premier ministre.

mardi 12 août 2014

L'Organisation





On l'appelle Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, mais il serait sas doute opportun de la débaptiser et de la nommer Organisation du Traité de Washington, là où fut signé le traité par les membres fondateurs. Comme il serait judicieux de réviser celui-ci et pour le rendre conforme à la réalité. Car, et depuis longtemps, tout est bancal dans cette organisation qui tente vainement et en trompant seulement ceux qui le veulent à se parer de principes vertueux pour exercer une pression sur ses membres, mais ce sont eux qui ont choisi cette situation, et sur des Etats souverains dont ils ne faudrait pas qu'ils pensent que leur souveraineté, voire même leur intégrité ne puissent connaitre certaines limites, pensons par exemple au cas de la Serbie amputée du Kosovo après une intervention de l'OTAN dont la légalité est pour le moins discutable par ailleurs.
Je reviendrai sur tout ça.

En attendant un peu d'histoire. Car il ne faut pas non plus cracher dans la soupe et nier le rôle stabilisateur, et sans doute même davantage, qu'a eu l'OTAN de sa création à la chute de l'URSS.
Crée en 1949, l'organisation répondait aux besoins de défense collective des pays d'Europe occidentale face au danger que représentait l'URSS. A noter qu'à l'époque on craignait également une résurgence du nationalisme allemand. De 12 membres fondateurs, l'OTAN passa à 15 membres dans les années qui suivirent en intégrant une Allemagne ayant découvert les vertus de la manne étasunienne via le plan Marshall et deux pays périphériques, éloignés géographiquement de l'Atlantique Nord et même Sud mais intéressants de par leur position stratégique, à savoir la Grèce et la Turquie. Puis plus rien jusqu'aux années 90 exceptée l'Espagne devenue démocratique qui entre dans le dispositif en 1982.
L'OTAN, et on pourra s'en étonner, survit à la chute du mur de l'URSS et à la disparition concomitante du pacte de Varsovie alors que le danger semble donc s'éloigner des rivages de l'Atlantique Nord. Et même mieux, elle prospère de façon insolente passant de 16 à 28 membres au jour d'aujourd'hui et ne semblant pas vouloir réfréner son appétit.
Un petit retour en arrière s'impose pourtant, juste pour montrer que ce n'était pas une marche en avant inexorable. Quand en 1990 l'Allemagne se réunifie, pour s'assurer de l'accord par l'URSS qui vit ses derniers mois de l'intégration de la nouvelle Allemagne dans l'Organisation, il est promis qu'aucune arme nucléaire ne serait stationnée dans l'ex-RDA et que l'OTAN renoncerait à s'étendre vers l'est. On voit ce qu'il en fut de cette promesse puisqu'après une première fournée en 1999 comprenant la Tchéquie, la Pologne et la Hongrie, ce furent en 2004 la Roumanie, la Bulgarie, la Slovaquie, et les 3 pays baltes qui intégrèrent l'Organisation. Il y a aussi la Slovénie, la Croatie ou l'Albanie, membres également mais pas à l'est. Et à ça on pourrait ajouter les tentatives pour l'instant infructueuses de faire entrer la Géorgie et l'Ukraine. Pas besoin donc d'être devin pour comprendre que la nouvelle Organisation post-guerre froide s'attache à encercler la Russie. Et on sent d'ailleurs une certaine fébrilité depuis que cette dernière n'est plus dirigée par un pouvoir faible et pillée par de puissants oligarques fort bien disposés à brader les richesses de leurs pays aux occidentaux. Il suffit de regarder qui sont les  bénéficiaires, même si l'affaire est loin d'être terminée,  du récent arrêt de la cour arbitrale de La Haye en ce qui concerne l'amende infligée à la Russie au sujet de l'affaite Loukoil (le conglomérat de Khodorkovski lequel n'a pas volé ses 10 ans de taule). Poutine ayant, dans l'intérêt de son pays qui en a vu les effets gêné, quelques appétits, il doit en payer le prix.

L'OTAN ne répond donc plus du tout à un besoin de sécurité dans l'Atlantique Nord mais à bien d'autres intérêts.
Cette organisation a par ailleurs placé ses membres, donc l'Europe essentiellement, dans un état de sujétion vis-à-vis des Etats-Unis. De Gaulle avait compris ce risque de perte de souveraineté au moins en termes d'indépendance au niveau de la politique extérieure en quittant les structures otaniennes en 1966 ayant déjà préalablement retiré du commandement otanien les flottes de l'Atlantique et de la Manche et en ayant, on le comprend, refusé de perdre son autonomie sur sa force nucléaire. La France de de Gaulle était redevenue souveraine. Ses successeurs, à partir de Mitterrand et de la première guerre du Golfe ont renoncé à cette souveraineté en se rapprochant incessamment de l'OTAN, notamment en participant à ses opérations en ex-Yougoslavie d'abord puis sur d'autres théâtres, cela impliquant de fait une mise aux normes des PC opérationnels de niveau corps d'armée (ce fut fait au début des années 2000) et une participation à la planification. La réintégration décidée par Sarkozy n'était en fait que la formalisation ou l'aboutissement de choses qui s'étaient déjà déroulées avant qu'il arrive au pouvoir.
Mais il faut dire que les Européens en ont tiré avantage. Leur effort de défense s'est sans cesse réduit, d'où des économies réalisées au profit de choses sans doute plus importantes que leur souveraineté.
Les dirigeants américains ont donc bien joué transformant une alliance bien sympathique si on se réfère au traité de Washington en un lien de dépendance vis-à-vis de leur puissance. On ne saurait vraiment leur reprocher, chaque Etat devant, théoriquement, puisque ce n'est plus le cas en Europe, œuvrer pour ses intérêts. Is n'ont même véritablement rien imposé profitant de la faiblesse, de la paresse, du manque de hauteur de vue de dirigeants qui n'avaient et n'ont sans doute pas toujours intégré ce que disait de Gaulle quand il rappelait que les Etats n'ont pas d'amis mais seulement des intérêts.
Or, qu'en est-il de nos  intérêts, dans la crise ukrainienne par exemple?  Qui pourra me démontrer qu'il est davantage dans les intérêts de la France ou de la Bulgarie par exemple dépendante à 100% du gaz russe de sanctionner la Russie sur les injonctions d'Obama? Qui pourra convaincre les exportateurs français de denrées alimentaires que les réactions de Hollande à la crise ukrainienne sont opportunes alors qu'ils vont devoir licencier en masse ou faire faillite? Quels sont les intérêts supérieurs de la France qui justifient cela? Moi je n'ai pas trouvé de réponses.

Alors, mais oui! Les principes me direz-vous! Rasmussen, le secrétaire général de l'OTAN a affirmé bien des choses démontrant sans jamais rien montrer que le méchant c'était la Russie qui représentait une menace. C'est d'ailleurs le même Rasmussen qui alors premier ministre danois avait justifié la seconde guerre du Golfe et engagé des troupes danoises qui n'étaient pas intervenues depuis un siècle en déclarant "L'Irak possède des ADM. Ce n'est pas quelque-chose que nous croyons tout simplement. Nous le savons". Déjà la voix de son maitre à l'époque. Mais faut dire qu'il fut quand même récompensé, du mois le pris-t-il comme ça, quand il quitta son poste de premier ministre pour celui qu'il occupe actuellement et qui nous a donné le plaisir de faire sa connaissance.

Et puisque nous parlons de principes, allons-y. Et pour cela référons nous au traité de l'Atlantique Nord, du moins à certains extraits :

Préambule :[…] Déterminés à sauvegarder la liberté de leurs peuples, leur héritage commun et leur civilisation, fondés sur les principes de la démocratie, les libertés individuelles et le règne du droit…
On pourrait gloser sur l'héritage commun et la civilisation dès lors par exemple que la Turquie est membre de l'organisation. Mais je reprendrai ça en conclusion ça pourrait devenir un principe d'action d'une organisation réformée.
Quant aux principes démocratiques, la Grèce n'en était pas vraiment une lors de son admission dans l'organisation. Et quand en 1960 la Turquie est devenue une dictature, elle n'a pas été exclue pour autant de 'organisation. Mais sans doute que nécessité fait loi.

Article 1 : Les parties s'engagent…à s'abstenir dans leurs relations internationales de recourir à la menace ou à l'emploi de la force de toute manière incompatible avec les buts des Nations Unies.
S'agissant de l'emploi de la menace, je vous laisse juge. Quant aux buts des Nations Unies, je n'avais pas exactement perçu qu'il s'agissant d'encourager les frappes aveugles contre sa population et ses propres infrastructures et d'interdire les interventions humanitaires.

Article 2 : Les parties contribueront au développement de relations internationales pacifiques et amicales…
C'était sans doute le but de l'installation d'un parapluie nucléaire en Europe. Mais c'est vrai que si la Russie pouvait se sentir visée, ce n'était pas le cas, bien sûr. C'est juste parce qu'elle était au mauvais endroit.

Article 3: Afin d'assurer de façon plus efficace la réalisation des buts du présent Traité… maintiendront et accroîtront leur capacité individuelle et collective de résistance à une attaque armée.
Ce point a déjà été évoqué avec les conséquences du non-respect de l'article de la part des Européens. Le non-respect de l'article 3 persistant depuis plus de 20 ans n'a pourtant jamais amené une exclusion ou des mesures incitatives.

Article 7 : Le présent Traité n'affecte pas et ne sera pas interprété comme affectant en aucune façon les droits et obligations découlant de la Charte pour les parties qui sont membres des Nations Unies ou la responsabilité primordiale du Conseil de Sécurité dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales.
Je vous revoie à l'opération de l'OTAN au Kosovo et aux bombardements subis parla Serbie à cette occasion.

Article 12 : Après que le Traité aura été en vigueur pendant dix ans ou à toute date ultérieure, les parties se consulteront à la demande de l'une d'elles, en vue de réviser le Traité, en prenant en considération les facteurs affectant à ce moment la paix et la sécurité dans la région de l'Atlantique Nord,…
Qui aura l'amabilité de prévenir une des parties que la guerre froide est terminée et que peut-être il faudrait réfléchir à une révision du traité? Que le Kosovo, la Macédoine, la Libye, etc., étaient assez loin de l'Atlantique Nord lequel ne pouvait guère craindre de conséquences pour sa sécurité même par effets de projection?
(Nota : je n'ai pas cité à dessein l'Afghanistan envisagé comme guerre contre le terrorisme. Comme il ne me gênerait pas de voir l'OTAN intervenir militairement en tant que telle contre l'EIIL)

Article 14 : Après que le Traité aura été en vigueur pendant vingt ans, toute partie pourra mettre fin au Traité en ce qui la concerne un an après avoir avisé de sa dénonciation le gouvernement des Etats-Unis d'Amérique…
A part les pays ayant intégré l'OTAN depuis la fournée de 1999, aucun autre ne pourra dire que la sujétion évoquée plus haut n'est pas volontaire.


Pour conclure, je dirai que l'OTAN a joué le rôle pour lequel elle a été conçue, mais qu'elle portait déjà en germe dès lors qu'il n'y avait qu'un seul grand contributeur des risques pour les autres de ses membres qu'avait très bien distingués le général de Gaulle qui, en Homme d'Etat, donna à la France les moyens militaires adaptés à la menace du moment pour se sortir d'une nasse qui finirait bien un jour par se refermer. Ses successeurs ont démoli son travail.
La logique aurait voulu qu'elle s'auto-dissolve à la fin de la guerre froide. L'UE aurait dû être très logiquement à l'initiative de cette dissolution tandis qu'elle abordait avec Maastricht déjà dans ses cartons, et en phase même d'être adopté, une nouvelle étape de son intégration politique qui quoiqu'il arrive n'adviendra jamais tant qu'elle ne disposera pas d'une politique extérieure indépendante et donc des outils de celle-ci, à savoir une véritable capacité de défense autonome. Ce choix n'a pas été fait pour des raisons qui mériteraient d'autres développements et nous voyons désormais dans quelle situation nous sommes, capables même de prendre des décisions allant contre nos intérêts et même dangereuses pour nous.
Et si alliance il devait y avoir, elle devrait l'être, c'est mon sentiment, sur la défense de valeurs communes rapportant effectivement à des racines civilisationnelles  communes. Le danger pour notre civilisation n'est pas la Russie dont les racines sont les mêmes que les nôtres. Un regard même distrait sur le monde indique bien ce qui nous menace nous et nos valeurs. Encore faut-il vouloir en tirer les justes conséquences.