"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

dimanche 30 août 2015

Comment faut-il donc les nommer ? Réfugiés ou migrants ?






Voilà le grand débat qui agite quelques cervelles ces derniers temps. Le but est simple, du moins pour ceux qui souhaitent que l’appellation de migrants soit abandonnée au profit de celle de réfugiés : susciter la compassion et ainsi faire avaliser le fait qu’on doit accueillir tous ces gens, ces pauvres hères devenus vagabonds par nécessité, qui pour fuir la guerre, qui pour fuir les persécutions, qui pour fuir la misère.

Migrants pourtant c’est bien pratique et tellement plus juste, car la notion englobe tous ces gens qui veulent changer de continent, changer de pays, changer de vie, quoique sur ce dernier point j’ai quelques doutes, mais j’y reviendrai parce que c’est essentiel, et ce quelles que soient les raisons qui les motivent. Si on les nomme réfugiés,  on brouille totalement les cartes, on confond délibérément les causes mettant sur le même pied le chrétien d’Irak qui a fui les islamistes et qui sinon allait mourir et le jeune sénégalais qui a trop regardé la télé et qui pense qu’en France bonheur et opulence l’attendent. Et entre ces deux cas on a toute une palette de motifs ayant provoqué une migration. Et puis le jeune diplômé ou le cuistot français qui par envie de dépaysement, parce qu’ils pensent que leur carrière sera meilleure ou qui veulent étoffer leur CV, sont donc eux-aussi des réfugiés. Et moi aussi d’ailleurs qui ne vit plus en France.
Non soyons sérieux, tous ne méritent pas le titre de réfugiés. D’ailleurs en 2014 sur 490000 demandes d’asiles déposées dans l’UE 305000 ont été rejetées. Ceux à qui on pourrait attribuer le titre de réfugiés sont évidemment très minoritaires, même si leur situation dans leur pays d’origine n’est certes pas enviable dans beaucoup de cas et sans doute dans la majorité.
Néanmoins, il faut bien évidemment faire le tri, et ce ne sont pas les conditions du voyage, les risques encourus, la mort d’autre migrants aussi terrible soit-elle, qui peuvent dispenser d’opérer ce tri. Tout simplement, en premier lieu, pour des raisons pratiques, parce que selon cette phrase devenue désormais célèbre de Rocard et reprise depuis à l’infini, on ne peut pas accueillir toute la misère du monde. Mais il avait ajouté qu’on devait en prendre notre juste part. Qu’est cela sinon la définition d’un tri nécessaire, un tri par exemple entre ceux qu’on ne peut renvoyer sans les condamner à mort et ceux qui, certes, continueront à mener une vie difficile dans leur pays, mais celle qu’ils mèneraient chez nous serait-elle forcément meilleure ?, mais ne risquent pas d’être accueillis par une balle à leur descente de l’avion. Cependant les critères du tri peuvent et doivent évidemment être élargis : doit-on par exemple accueillir à bras ouverts des diplômés venus pour l’appât du gain parce qu’ils peuvent nous être utiles, ou les renvoyer sans ménagement pour qu’ils participent au développement de leurs pays d’origine et participer ainsi à la progressive éradication des conditions favorisant l’exil des plus démunis ? C’est une question politique, mais à ce stade il semble que ce soit un peu la misère sous les crânes de ceux qui sont payés pour prendre des décisions de ce type. Faut dire que les idéologues ne manquent pas pour fustiger le retour forcé de qui que ce soit, en particulier des diplômés : certains se souviendront sans doute du tollé soulevé par une décision de Guéant de renvoyer dans leurs pays les étudiants étrangers en fin d’études et diplômés qui auraient raté leur avion de retour ; les mêmes pleureuses se plaindront qu’on ne fait pas assez pour le développement des mêmes pays d’où sont issus ces mêmes étudiants en fin de cursus, mais c’est vrai que l’idéologie voisine souvent avec la connerie. Et c’est  bien ce qui caractérise les bienpensants de gauche, les compassionnels mais toujours dans le même sens, celui qui place « l’autre » en priorité par rapport à l’autochtone, au souchien comme on dit, prié de se pousser pour laisser la place et aussi financer la prise en charge des malheureux réfugies car ils ne peuvent être que ça. Aussi accueille-t-on les clandestins à l’hôtel tandis que nos SDF se contenteront de dormir dans des cartons dans la rue ou dans des structures d’accueil notoirement insuffisantes. Sans doute un choix politique qui devrait s’accompagner pour la majorité virtuelle qui nous dirige d’un changement de nom en « parti de l’autre » par exemple. L’erreur serait là moins grande que celle faisant de tous les migrants des réfugiés.

Mais j’en reviens à mon tri. Imaginons, miracle !, qu’il s’opère. Cela ne serait encore pas suffisant. Car que faire de ces migrants, de ces réfugiés pardon, dès lors que l’asile leur est accordé ? Comment faire en sorte qu’ils se fondent dans le paysage ? De fait, cette fois on connait la réponse. Elle nous a été donnée par de fameux rapports critiqués à leur parution, malgré leur grande qualité reconnue par le premier ministre de l’époque, au point que c’était la voie à suivre. Les rapports ont été enterrés mais c’est néanmoins leur esprit qui préside à l’accueil des migrants. C’est : « votre culture, vos modes de vie valent bien les nôtres et donc nous allons nous adapter pour que vous puissiez vivre comme vous le faisiez chez vous ». On appelle ça l’inclusion qui a remplacé l’intégration qui avait remplacé l’assimilation. C’est en fait le communautarisme qui devient la politique officielle d’accueil des migrants. Mais chut, faut pas le dire ! Faut continuer à faire comme si on n’avait rien vu ! Et donc on en vient sournoisement à créer petit à petit, et on le constate chaque jour de plus en plus, les conditions qui ont provoqué les flux de réfugiés ( ! ) que nous accueillons de si mauvaise façon. Quand certains prophétisent une guerre civile, et peut-être ne se trompent-ils pas, n’est ce pas ce rejet d’une politique d’assimilation qu’ils regrettent tandis qu’ils dénoncent celle d’inclusion qui mène aux communautarismes dont on sait quels malheurs ils portent en eux ?

Et si finalement c’était à cause de ça que ceux qu’on appellent les migrants, que d’autres voudraient qu’on appelle les réfugiés, sont considérés comme  des indésirables par des parties importantes de la population et plus généralement des populations européennes ? Et si c’était à cause de ça qu’un petit pays comme la Slovaquie, pas très riche, et même pauvre, consent à participer à l’accueil des migrants mais en souhaitant n’accueillir sur son sol que des chrétiens ? Sans doute intuitivement les Slovaques ont-ils compris que des valeurs communes fondées sur une religion commune étaient de nature à favoriser l’intégration. On notera d’ailleurs que les pays dernièrement accueillis dans l’UE, en fait ceux qui étaient auparavant dans l’orbite soviétique, ne sont pas très chauds pour accueillir migrants ou réfugiés. L’identité nationale leur a permis de tenir quand ils n’étaient plus des nations, mais juste des satellites de l’URSS, et ils conçoivent sans doute mieux que nous les risques d’une immigration massive non contrôlée et non assortie de conditions drastiques pour les migrants sommés de s’adapter et non l’inverse. Ceci étant évidemment le contraire de la politique européenne en terme d’accueil des immigrés. Et voilà donc pourquoi ces mêmes pays sont critiqués par les dirigeants généreux de l’argent de leurs peuples et, plus grave, de la cohésion nationale au sein des Etats tandis qu’ils sont payés normalement pour la garantir, et là on est loin du compte, surtout en France.
Et voilà pourquoi Schengen n’a vraiment aucun sens et constitue même une aberration qu’il convient d’éliminer. Schengen c’est bien sympa pour les Européens (résidant dans l’espace du même nom) ou pour les touristes désirant ne rester que touristes. Mais au-delà c’est une catastrophe. Une catastrophe parce qu’il n’y a pas de politique européenne pour l’immigration, et des quotas de répartition ne sauraient certainement pas en tenir lieu d’autant plus que le principe de libre circulation les rend absolument inopérants, une catastrophe pour les pays membres qui ne disposent pas d’une politique d’immigration affirmée ou n’appliquent pas cette politique, par exemple la France qui ne renvoie qu’une portion minime, ridicule même, de ceux à qui elle a refusé l’asile, et qui sont le point de chute privilégié des migrants. Il est donc facile de critiquer Orban qui fait construire une barrière entre son pays et la Serbie, il est donc facile de critiquer la Slovaquie qui souhaite choisir ses migrants en fonction de leur religion, il est donc facile de critiquer tous ces pays qui « ne jouent pas le jeu » (mais quel jeu ?). Eux savent ce qu’ils veulent et peut-être davantage ce qu’ils ne veulent pas et s’en protègent. Plutôt que de les en blâmer peut-être faudrait-il prendre exemple sur eux, pas forcément, sans doute pas d’ailleurs, en construisant des barrières, mais en définissant une politique claire qui ne soit pas préjudiciable à l‘unité nationale, qui ne soit pas source de conflits potentiels, en définissant combien on peut et qui on veut accueillir et en fixant des règles auxquelles il faudrait se tenir.

Je n’imagine pas un seul instant, ni ne le souhaite vraiment d’ailleurs, que cesse l’immigration dans notre pays. Je n’imagine pas un seul instant qu’on refuse l’asile à des gens en danger. Cependant tout ça doit être strictement encadré pour le bien de tous. Mais force est de constater que ça ne l’est pas chez nous, loin de là, et que plutôt que de décider on préfère se réfugier derrière le compassionnel, lequel pourtant ne saurait constituer le fondement d’une politique, ni excuser, c’est davantage le cas, son absence. Tant qu’on en sera à chercher le vocabulaire pour ne pas désigner les choses, tant qu’on en sera à penser que ce serait mieux d’appeler les migrants réfugiés pour apitoyer le « bon peuple » et lui faire accepter ce qu’il ne veut pas, on n’avancera pas.

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