"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

mardi 16 septembre 2014

EIIL : l'échec prévisible



Nul parmi mes lecteurs ne pourra supposer que j'ai une quelconque once de sympathie pour les islamistes de l'EIIL et même les islamistes en général. Et bien évidemment je suis de ceux qui pensent qu'il faut combattre l'islamisme partout et surtout chez nous sous toutes ses formes et même celles qui paraissent les plus bénignes, pour ma part je dirais insidieuses, quand il s'agit par exemple d'accepter quelques "petites" revendications d'ordre religieux, du type hallal dans les cantines, salles de prières sur les lieux de travail, aménagements horaires au moment du ramadan, ou autres fantaisies comme les prières de rue. En fait tout cela concourt au même objectif que celui que poursuivent le malades du cerveau de l'EIIL, al Al-Qaïda, et autres officines nombreuses et variées. Ces dernières ont au moins cet avantage d'annoncer clairement la couleur. Et c'est donc sur elles, du fait de leurs méthodes qu'on a tendance à se focaliser et à négliger les autres, voire même à trouver leurs demandes légitimes, ce qui est à mon sens une erreur.

Mais passons car ce n'est pas vraiment de cela dont je voulais parler, même si évidemment ça doit rester en toile de fond.
J'aurais pu intituler ce billet d'autres façon, peut-être d'ailleurs plus éloquentes, quelque chose comme
-          Où est passée l'ONU?
-           La communauté internationale selon Obama et Kerry
-          Vers une nouvelle croisade (là je me place évidemment du côté de l'adversaire)
-          L'art occidental de se mettre dans la merde mais pas tant que les autres… pour l'instant.
-          Les doux rêveurs et les pragmatiques

Tiens commençons par ça. Les doux rêveurs et les pragmatiques. En fait la formule "doux rêveurs" n'est pas très adaptée car elle correspond pour certains des membres de cette équipe à une posture destinée à l'opinion publique n'ayant pas trop à en connaitre des véritables enjeux, comme le pétrole ou le gaz par exemple.  Les doux rêveurs se caractérisent par un discours qui tend à faire accroire aux oreilles naïves auquel il est destiné que notre modèle est le meilleur et que les populations du monde entier sont désireuses de le partager mais juste empêchées par quelques importuns, des dictateurs par exemple ou dans le cas qui nous intéresse par des illuminés, ans pour autant faire le lien entre les deux à savoir que les dictateurs en question ont franchement œuvré pour que les illuminés ne se manifestent pas trop. Les doux rêveurs donc s'en vont parfois en guerre pour exporter leur modèle, leur fameux modèle démocratique que tout le monde leur envie. Ils chassent donc ou tentent de chasser les méchants dictateurs provoquant ainsi des guerres civiles d'où invariablement sortent vainqueur, soit les dictateurs en place ou d'autres, soit les illuminés, et sans bien sûr que pour autant la démocratie ait progressé d'un seul pas. Au contraire. Mais le problème des doux rêveurs est qu'ils ne se lassent jamais et recommencent sans cesse les mêmes erreurs qu'ils tenteront ensuite éventuellement de corriger en commettant les mêmes.
Les pragmatiques eux, comme leur nom l'indique, s'appuient sur la réalité et sur l'expérience. Ils considèrent que finalement mieux vaut un dictateur pas franchement fréquentable, mais qu'on fréquentera quand même pour l'avoir bien à sa pogne, que des illuminés incontrôlables. Les populations concernées globalement souffriront moins, beaucoup moins même, malgré évidemment quelques bavures propres aux actions des dictateurs, mais surtout le monde globalement s'en portera mieux.
Pour prendre un exemple assez récent, Tony Blair que nous classerons dans la catégorie des doux rêveurs, bien que critiqué avec vigueur suite à l'intervention en Irak au nom de motifs faux dira qu'il ne regrette rien car le monde se porte mieux sans Saddam Hussein. Un pragmatique lui demandera de regarder ce qui se passe en Irak et autour actuellement pour se persuader du contraire. Ce qu'il ne fera évidemment pas. Pour ceux que ça intéresse, je pourrai éventuellement en commentaire parler d'un type d'action pragmatique avec ce qui s'est passé en Tchétchénie. Le résultat crispe sans doute les doux rêveurs, mais en tout cas ça fonctionne.

Mais sortons de cette typologie néanmoins éclairante, du moins je l'espère, pour en revenir à l'EIIL et aux actions envisagées.
Nous avons pu remarquer que la réaction jusqu'à présent a été bien molle, davantage axée sur les parlottes et quelques mesures d'ordre miliaire qui ont tout juste permis de freiner, peut-être de contenir les fadas de l'EIIL. Entre temps des populations ont été décimées à cause de leur religion ou de leur manque de zèle vis-à-vis des nouveaux maitres de leur zone. Au passage on notera que les massacres à caractère religieux peuvent laisser indifférent, même les doux rêveurs, et surtout eux, quand ceux qui les perpètrent sont des alliés objectifs dans la mesure où le même ennemi est partagé. Aussi a-t-on largement fermé les yeux sur les massacres de chrétiens en Syrie dès lors que ce n'était pas l'EIIL qui les commettait. Comme on s'est peu ému de la diminution du nombre de chrétiens depuis l'importation de la démocratie dans la région. Mais après tout on ne peut pas être partout. En fait, la décapitation filmée d'un citoyen américain, acte évidemment terrible, est davantage sujette à provoquer une intervention que la mort de milliers d'anonymes du fait de leur religion. Mais fermons cette parenthèse peu glorieuse qui pourrait faire penser que les doux rêveurs sont surtout des cyniques.
Donc après un temps relativement long de flottement et quelques bombardements dont un ancien directeur de la CIA pense qu'ils ne servent à rien, on tente de passer à une vitesse supérieure. C'était l'objet de la très récente conférence de Paris qui a débouché au moins sur l'identification de cette fameuse coalition internationale dont le moins qu'on puisse dire est qu'elle est loin de constituer une représentation de la communauté internationale, terme portant abondamment utilisé dès que les Etats-Unis parviennent à rassembler deux pelés et trois tondus, souvent les mêmes d'ailleurs, pour aller taper sur un tiers qui leur déplait. Ainsi de la même manière que la communauté internationale condamne la Russie pour ses prétendus agissement en Ukraine, elle s'élève contre les agissements de l'EIIL et se prépare à lui mettre sur la gueule. La carte qui suit vous donnera une image de ce qu'est la communauté internationale dans le second cas. Dans le premier elle est encore davantage réduite.

Ce qui m'amène naturellement à m'interroger sur le rôle de l'ONU. L'ONU est la grande absente du moment. Ce qui se passe à travers le monde, les conflits, les tensions, semble ne plus l'intéresser. L'organisation roule pour elle, pour ses milliers de fonctionnaires surpayés au train de vie dispendieux dès qu'ils mettent un pied hors de leur bureau (je me permets d'en parler parce que je connais un peu). Certes on a bien vu en 2003, avant l'attaque de l'Irak que l'institution ne servait à rien. On l'avait également vu auparavant lorsqu'il s'est agi de "libérer" le Kosovo en bombardant Belgrade. Mais au moins on s'y réunissait et ceux qui n'étaient pas d'accord avaient la possibilité de s'exprimer, parfois avec panache. Ça servait, sinon à empêcher ce qu'avaient décidé de faire les Etats-Unis et la communauté internationale du moment, à au moins alerter l'opinion publique, lui donner un autre son de cloche. Il semblerait donc que même ça soit devenu de l'histoire ancienne.
Comment peut-on tolérer qu'un seul pays, aussi puissant soit-il, aussi légitime soit la cause qu'il défend, car ça peut aussi arriver, puisse décider seul qui fait ou qui ne fait pas partie de la communauté internationale, en acceptant tel pays à une conférence dite internationale et en refusant tel autre? Peut-on encore parler de droit international? Certes, je ne suis pas assez naïf pour croire encore en ce genre de baratin sur ce fameux droit international, sur des valeurs non négociables, mais par pitié qu'on cesse ces discours, que la vérité soit enfin dite, que la loi du plus puissant soit consacrée! Et que ceux qui la refusent quand leurs intérêts sont menacés ne soient pas systématiquement considérés comme des malfaiteurs. Une somme d'intérêts peut conduire à la mise sur pied de coalitions, mais, juste par honnêteté, qu'on ne fasse pas de ces intérêts des valeurs.
L'ONU aurait pu prétendre à cela, à la définition de valeurs universelles méritant qu'on aille se battre et mourir pour elles. Elle a été incapable de le faire. Elle ne sert même plus aujourd'hui de lieu de discussion, sauf de ses innombrables fonctionnaires autour d'un café. Donc qu'elle disparaisse!

Je crois qu'il est temps de présenter cette carte qui nous dévoile les membres de la coalition internationale, la communauté internationale du moment selon Kerry. En outre, cette carte nous montre selon quel principe les différents membres de la coalition comptent intervenir, militaire, humanitaire, mise à disposition de bases. Ça ne manque pas d'intérêt.


eiil participants.jpg


On retrouve évidemment tous les pays occidentaux et assimilés ou presque, la Suède s'abstenant et quelques pays arabes ou musulmans.
Quelques pays occidentaux seulement (la moitié environ) envisagent d'intervenir sur le plans militaire. Quant aux pays arabes un seul envisage d'intervenir militairement. Il s'agit de l'Egypte.
Le résultat est que cette coalition sera une nouvelle foi considérée comme une coalition occidentale, comme une nouvelle croisade dirigée par les Etats-Unis. Un mandat de l'ONU et une coalition sous son nom  aurait au moins pu nuancer cette impression
L'EIIL a donc gagné quels que soient les dégâts qu'il subira et même s'il disparait.

En fait, et ne nous leurrons pas. Pour se débarrasser des islamistes dans les pays majoritairement musulmans, il n'y a pas 36 solutions. Et ce n'est pas une coalition dirigée par les Etats-Unis qui y parviendra. Je vois 3 solutions.
Les musulmans réagissent eux-mêmes au phénomène, s'organisent et chassent ceux qui, selon eux, mais c'est davantage nous qui le disons, ont une vision pervertie de l'islam qu'ils trahissent. Honnêtement je n'y crois guère, même si c'est pourtant la meilleure solution.
Une autre solution serait de remettre ces pays sous mandat, protectorat ou je ne sais quoi. Pas facile et surtout pas politiquement correct.
 La dernière solution revient à la précédente sous une forme différente : on rejoue la carte de dirigeants musclés laïques ou pas obsédés par la religion. Donc on sauve el Assad, on conforte le général Sissi en Egypte, on trouve de remplaçants à Khadafi et Saddam Hussein , et vous verrez, le monde ira mieux.
Quant au traitement de ceux qui sont chez nous, j'ai bien une petite idée, mais pas très humaniste.

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