Nul
parmi mes lecteurs ne pourra supposer que j'ai une quelconque once de
sympathie pour les islamistes de l'EIIL et même les islamistes en
général. Et bien évidemment je suis de ceux qui pensent qu'il faut
combattre l'islamisme partout et surtout chez nous sous toutes ses
formes et même celles qui paraissent les plus bénignes, pour ma part je
dirais insidieuses, quand il s'agit par exemple d'accepter quelques
"petites" revendications d'ordre religieux, du type hallal dans les
cantines, salles de prières sur les lieux de travail, aménagements
horaires au moment du ramadan, ou autres fantaisies comme les prières de
rue. En fait tout cela concourt au même objectif que celui que
poursuivent le malades du cerveau de l'EIIL, al Al-Qaïda, et autres
officines nombreuses et variées. Ces dernières ont au moins cet avantage
d'annoncer clairement la couleur. Et c'est donc sur elles, du fait de
leurs méthodes qu'on a tendance à se focaliser et à négliger les autres,
voire même à trouver leurs demandes légitimes, ce qui est à mon sens
une erreur.
Mais passons car ce n'est pas vraiment de cela dont je voulais parler, même si évidemment ça doit rester en toile de fond.
J'aurais pu intituler ce billet d'autres façon, peut-être d'ailleurs plus éloquentes, quelque chose comme
- Où est passée l'ONU?
- La communauté internationale selon Obama et Kerry
- Vers une nouvelle croisade (là je me place évidemment du côté de l'adversaire)
- L'art occidental de se mettre dans la merde mais pas tant que les autres… pour l'instant.
- Les doux rêveurs et les pragmatiques
Tiens
commençons par ça. Les doux rêveurs et les pragmatiques. En fait la
formule "doux rêveurs" n'est pas très adaptée car elle correspond pour
certains des membres de cette équipe à une posture destinée à l'opinion
publique n'ayant pas trop à en connaitre des véritables enjeux, comme le
pétrole ou le gaz par exemple. Les doux rêveurs se caractérisent par
un discours qui tend à faire accroire aux oreilles naïves auquel il est
destiné que notre modèle est le meilleur et que les populations du monde
entier sont désireuses de le partager mais juste empêchées par quelques
importuns, des dictateurs par exemple ou dans le cas qui nous intéresse
par des illuminés, ans pour autant faire le lien entre les deux à
savoir que les dictateurs en question ont franchement œuvré pour que les
illuminés ne se manifestent pas trop. Les doux rêveurs donc s'en vont
parfois en guerre pour exporter leur modèle, leur fameux modèle
démocratique que tout le monde leur envie. Ils chassent donc ou tentent
de chasser les méchants dictateurs provoquant ainsi des guerres civiles
d'où invariablement sortent vainqueur, soit les dictateurs en place ou
d'autres, soit les illuminés, et sans bien sûr que pour autant la
démocratie ait progressé d'un seul pas. Au contraire. Mais le problème
des doux rêveurs est qu'ils ne se lassent jamais et recommencent sans
cesse les mêmes erreurs qu'ils tenteront ensuite éventuellement de
corriger en commettant les mêmes.
Les
pragmatiques eux, comme leur nom l'indique, s'appuient sur la réalité
et sur l'expérience. Ils considèrent que finalement mieux vaut un
dictateur pas franchement fréquentable, mais qu'on fréquentera quand
même pour l'avoir bien à sa pogne, que des illuminés incontrôlables. Les
populations concernées globalement souffriront moins, beaucoup moins
même, malgré évidemment quelques bavures propres aux actions des
dictateurs, mais surtout le monde globalement s'en portera mieux.
Pour
prendre un exemple assez récent, Tony Blair que nous classerons dans la
catégorie des doux rêveurs, bien que critiqué avec vigueur suite à
l'intervention en Irak au nom de motifs faux dira qu'il ne regrette rien
car le monde se porte mieux sans Saddam Hussein. Un pragmatique lui
demandera de regarder ce qui se passe en Irak et autour actuellement
pour se persuader du contraire. Ce qu'il ne fera évidemment pas. Pour
ceux que ça intéresse, je pourrai éventuellement en commentaire parler
d'un type d'action pragmatique avec ce qui s'est passé en Tchétchénie.
Le résultat crispe sans doute les doux rêveurs, mais en tout cas ça
fonctionne.
Mais sortons de cette typologie néanmoins éclairante, du moins je l'espère, pour en revenir à l'EIIL et aux actions envisagées.
Nous
avons pu remarquer que la réaction jusqu'à présent a été bien molle,
davantage axée sur les parlottes et quelques mesures d'ordre miliaire
qui ont tout juste permis de freiner, peut-être de contenir les fadas de
l'EIIL. Entre temps des populations ont été décimées à cause de leur
religion ou de leur manque de zèle vis-à-vis des nouveaux maitres de
leur zone. Au passage on notera que les massacres à caractère religieux
peuvent laisser indifférent, même les doux rêveurs, et surtout eux,
quand ceux qui les perpètrent sont des alliés objectifs dans la mesure
où le même ennemi est partagé. Aussi a-t-on largement fermé les yeux sur
les massacres de chrétiens en Syrie dès lors que ce n'était pas l'EIIL
qui les commettait. Comme on s'est peu ému de la diminution du nombre de
chrétiens depuis l'importation de la démocratie dans la région. Mais
après tout on ne peut pas être partout. En fait, la décapitation filmée
d'un citoyen américain, acte évidemment terrible, est davantage sujette à
provoquer une intervention que la mort de milliers d'anonymes du fait
de leur religion. Mais fermons cette parenthèse peu glorieuse qui
pourrait faire penser que les doux rêveurs sont surtout des cyniques.
Donc
après un temps relativement long de flottement et quelques
bombardements dont un ancien directeur de la CIA pense qu'ils ne servent
à rien, on tente de passer à une vitesse supérieure. C'était l'objet de
la très récente conférence de Paris qui a débouché au moins sur
l'identification de cette fameuse coalition internationale dont le moins
qu'on puisse dire est qu'elle est loin de constituer une représentation
de la communauté internationale, terme portant abondamment utilisé dès
que les Etats-Unis parviennent à rassembler deux pelés et trois tondus,
souvent les mêmes d'ailleurs, pour aller taper sur un tiers qui leur
déplait. Ainsi de la même manière que la communauté internationale
condamne la Russie pour ses prétendus agissement en Ukraine, elle
s'élève contre les agissements de l'EIIL et se prépare à lui mettre sur
la gueule. La carte qui suit vous donnera une image de ce qu'est la
communauté internationale dans le second cas. Dans le premier elle est
encore davantage réduite.
Ce
qui m'amène naturellement à m'interroger sur le rôle de l'ONU. L'ONU
est la grande absente du moment. Ce qui se passe à travers le monde, les
conflits, les tensions, semble ne plus l'intéresser. L'organisation
roule pour elle, pour ses milliers de fonctionnaires surpayés au train
de vie dispendieux dès qu'ils mettent un pied hors de leur bureau (je me
permets d'en parler parce que je connais un peu). Certes on a bien vu
en 2003, avant l'attaque de l'Irak que l'institution ne servait à rien.
On l'avait également vu auparavant lorsqu'il s'est agi de "libérer" le
Kosovo en bombardant Belgrade. Mais au moins on s'y réunissait et ceux
qui n'étaient pas d'accord avaient la possibilité de s'exprimer, parfois
avec panache. Ça servait, sinon à empêcher ce qu'avaient décidé de
faire les Etats-Unis et la communauté internationale du moment, à au
moins alerter l'opinion publique, lui donner un autre son de cloche. Il
semblerait donc que même ça soit devenu de l'histoire ancienne.
Comment
peut-on tolérer qu'un seul pays, aussi puissant soit-il, aussi légitime
soit la cause qu'il défend, car ça peut aussi arriver, puisse décider
seul qui fait ou qui ne fait pas partie de la communauté internationale,
en acceptant tel pays à une conférence dite internationale et en
refusant tel autre? Peut-on encore parler de droit international?
Certes, je ne suis pas assez naïf pour croire encore en ce genre de
baratin sur ce fameux droit international, sur des valeurs non
négociables, mais par pitié qu'on cesse ces discours, que la vérité soit
enfin dite, que la loi du plus puissant soit consacrée! Et que ceux qui
la refusent quand leurs intérêts sont menacés ne soient pas
systématiquement considérés comme des malfaiteurs. Une somme d'intérêts
peut conduire à la mise sur pied de coalitions, mais, juste par
honnêteté, qu'on ne fasse pas de ces intérêts des valeurs.
L'ONU
aurait pu prétendre à cela, à la définition de valeurs universelles
méritant qu'on aille se battre et mourir pour elles. Elle a été
incapable de le faire. Elle ne sert même plus aujourd'hui de lieu de
discussion, sauf de ses innombrables fonctionnaires autour d'un café.
Donc qu'elle disparaisse!
Je
crois qu'il est temps de présenter cette carte qui nous dévoile les
membres de la coalition internationale, la communauté internationale du
moment selon Kerry. En outre, cette carte nous montre selon quel
principe les différents membres de la coalition comptent intervenir,
militaire, humanitaire, mise à disposition de bases. Ça ne manque pas
d'intérêt.
On
retrouve évidemment tous les pays occidentaux et assimilés ou presque,
la Suède s'abstenant et quelques pays arabes ou musulmans.
Quelques
pays occidentaux seulement (la moitié environ) envisagent d'intervenir
sur le plans militaire. Quant aux pays arabes un seul envisage
d'intervenir militairement. Il s'agit de l'Egypte.
Le
résultat est que cette coalition sera une nouvelle foi considérée comme
une coalition occidentale, comme une nouvelle croisade dirigée par les
Etats-Unis. Un mandat de l'ONU et une coalition sous son nom aurait au
moins pu nuancer cette impression
L'EIIL a donc gagné quels que soient les dégâts qu'il subira et même s'il disparait.
En
fait, et ne nous leurrons pas. Pour se débarrasser des islamistes dans
les pays majoritairement musulmans, il n'y a pas 36 solutions. Et ce
n'est pas une coalition dirigée par les Etats-Unis qui y parviendra. Je
vois 3 solutions.
Les
musulmans réagissent eux-mêmes au phénomène, s'organisent et chassent
ceux qui, selon eux, mais c'est davantage nous qui le disons, ont une
vision pervertie de l'islam qu'ils trahissent. Honnêtement je n'y crois
guère, même si c'est pourtant la meilleure solution.
Une
autre solution serait de remettre ces pays sous mandat, protectorat ou
je ne sais quoi. Pas facile et surtout pas politiquement correct.
La
dernière solution revient à la précédente sous une forme différente :
on rejoue la carte de dirigeants musclés laïques ou pas obsédés par la
religion. Donc on sauve el Assad, on conforte le général Sissi en
Egypte, on trouve de remplaçants à Khadafi et Saddam Hussein , et vous
verrez, le monde ira mieux.
Quant au traitement de ceux qui sont chez nous, j'ai bien une petite idée, mais pas très humaniste.
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