"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

mercredi 30 juillet 2014

Le déni de réalité cause de notre perte





Ma lecture quotidienne des "informations ", les guillemets s'imposent de plus en plus je crois, me rend de plus en plus pessimiste quant à l'avenir du monde. Pas tant à cause des conflits qui le ravagent, car il y en a toujours eu, même si quelques régions privilégiées ont pu être durablement épargnées dans l'histoire, pensons à la pax romana par exemple qui dura 5 siècles. Mais ce ne furent que des parenthèses. Doit-on en penser que le goût du conflit est inscrit dans l'homme? Ou plutôt que c'est une condition d'existence des groupes d'hommes, d'existence, pas de survie?  Hobbes  ou Rousseau? Bof! Répondre à ses questions insolubles n'a finalement qu'un intérêt réduit puisque le confit reste une donnée.



Pourtant depuis quelques petites décennies les choses ont bien changé quant à l'appréhension des conflits. Et je crois sincèrement que c'est cela qui les multiplie.

Il fut un temps, pas si lointain, car je l'ai vécu, où il n'était pas honteux, ni considéré comme discriminatoire, raciste, machinophobe, ou je ne sais quoi, de désigner clairement son adversaire ou le danger potentiel, la menace. Et à partir de là on pouvait en faire un objet d'étude, l'observer, le regarder évoluer, évaluer ses forces, etc., et s'adapter. Lui-même en faisant d'ailleurs autant. Et ces comportements symétriques ont permis pendant plus de 40 années d'échapper à de grandes conflagrations ou à la grande conflagration. Certes, ça faisait peur à beaucoup cet équilibre fondé sur la terreur, sur la certitude réciproque que si l'un prenait l'initiative il provoquerait des dégâts autant à lui qu'à l'autre. Tout le monde était perdant d'avance. Certes le pacifisme de certains (la peur?) mettait parfois l'équilibre en péril. Je me souviens de ce slogan qui fleurissait en Allemagne à la charnière des années 70 et 80 : "besser rot als tot" (plutôt rouge que mort). Mais les dirigeants ont tenu et l'équilibre tint jusqu'à ce qu'un des protagonistes s'effondre de l'intérieur. Rendons d'ailleurs grâce à ces dirigeants d'avoir tenu car c'est quand l'un est en train de s'effondrer que le danger de la fuite en avant est le plus grand.

Et ce fut le vide. Les uns proclamaient la fin de l'histoire se prenant pout Hegel après la bataille d'Iéna et oubliant que c'était peut-être le début d'une autre histoire. D'autres plus prudents et surtout plus lucides prophétisèrent qu'on allait passer de l'ordre au chaos. Les seconds ont bien sûr eu raison, ayant pressenti que la fin d'un équilibre mondial garanti par deux superpuissances ennemies allait réveiller les vieilles passions endormies ou auxquelles on interdisait de s'exprimer. Certes il restait un héritage de l'ancienne période, notamment des régimes qui aussi peu sympathiques qu'ils paraissaient avaient encore cette capacité de maintenir l'ordre dans l'espace placé sous leur juridiction ou leur influence. Mais ces régimes avaient vocation à disparaitre dans un monde nouveau qui, parait-il, devait être meilleur et parvenir, selon une trajectoire implacable, à une bienheureuse démocratie globale. Alors on les y a aidés même si cela fut présenté sous une forme mensongère, une espèce d'aspiration subite à la démocratie, à la liberté dont on a vu ce qui en est advenu.



Bon, ça semble compromis! En fait nous sommes entrés dans une phase de régression dont certaines formes n'ont rien à envier à ce qu'elles furent aux périodes les plus barbares. Et si on veut être honnête 5 minutes, on reconnaitra que la clé de voute des conflits est l'ethnique et le religieux, ce dernier semblant supplanter le premier sans jamais l'effacer. Quand ils ne se combinent pas. Rwanda, Yougoslavie, Kosovo hier et maintenant, Macédoine demain, Mali, Centrafrique, Côte d'Ivoire, Ukraine, Nigéria, Moyen-Orient, etc., etc., car la liste est loin d'être exhaustive, tous ces conflits ont une source ethnique, religieuse ou les deux. Même à Gaza aujourd'hui car le combat que mène le hamas et d'autres n'a rien de territorial mais juste l'expression d'une haine des juifs. Ce n'est pas le territoire où ils vivent qui est important, c'est juste leur existence sur ce territoire, terre d'islam, parait-il, et même leur existence tout court.

Les conflits pour un territoire ou un morceau de territoire se font rares. Les conflits pour la victoire d'une idéologie politique également. Sauf à considérer les religions ou une religion en particulier comme une idéologie politique. D'ailleurs les territoires n'ont guère d'importance puisque les conflits les transcendent largement. Ils se déroulent sur eux, en débordent. En fait ils ne signifient rien par rapport à l'ethnique et au religieux. Peut-être autant, voire davantage que la mondialisation économique et financière, ces conflits consacrent la fin des Etats-Nations



Et alors me dira-t-on! Après tout ça se passe ailleurs! C'est triste de voir tous ces morts, ces gens maltraités pour leur appartenance ethnique ou religieuse, c'est affligeant de voir les tentatives démocratiques se transformer par le remplacement d'une dictature par une autre. Etc, etc. On compatit. L'émotion pour guide, l'indignation comme loi, l'inaction comme règle.



Certes! Sauf que ces phénomènes, ces nouveaux conflits, immigration incontrôlée oblige, légale ou pas, diversité obligatoire faisant de l'intégration un quasi-crime contre l'humanité complétant cela, sont désormais visibles chez nous. Un conflit lointain, un match de foot, en fait n'importe quel prétexte sont l'occasion de démontrer que la couleur de peau, l'origine ethnique, la religion sont des ferments de conflit. Que nos dirigeants, bien moins courageux que leurs prédécesseurs, davantage guidés par des intérêts qui ne semblent plus guère être ceux de leur pays, peut-être vaincus eux-aussi par la tyrannie de l'émotion et du compassionnel, sans doute atteints par le syndrome de la repentance, en fait indignes de leurs emplois (nous n'oserons même plus appeler ça fonctions tant tous depuis longtemps se sont empressés de les vider de leur contenu pour se livrer à de nouveaux maitres), donc que nos dirigeants  tentent de minimiser cela est évident! L'essentiel pour eux est de profiter du pouvoir, ou plutôt de ses signes et avantages divers et variés, et donc de ne pas franchir ce pas courageux et nécessaire qui mettrait leur avenir en péril. Mais les petites gens, ceux qui ont dû quitter le quartier où ils avaient toujours vécu, ceux qui baissent la tête dans le RER ou en rentrant chez eux, ceux qui savent où il ne faut pas aller mais n'ont pas les moyens d'aller là où ils voudraient aller, ceux-là savent que le conflit a déjà commencé. Normal, ils en sont les premières victimes. Et en plus méprisées. Logique, ils votent pour le seul parti qui décrit leur situation.  Mais ça ne se passe pas qu'en France. Du coup on s'émeut de la montée des populistes comme on les appelle, la référence au peuple étant évidemment odieuse aux yeux de ces gens dont les enfants n'ont guère fréquenté l'école publique ou alors seulement celle des beaux quartiers.



Oui la guerre est déjà potentiellement chez nous, dans un état de semi-latence, se manifestant par des violences et des paroles lors de manifestations dont les motifs pourtant sont assez explicites pour ne pas cacher leurs intentions réelles.

Mais ça, faut pas le dire. D'ailleurs c'est faux, exagéré et même peut-être une incitation à la violence, à la haine raciale, religieuse ou je ne sais quoi. Parce que désormais dire ce qu'on voit, exposer des faits vérifiables par tous et tenter de les interpréter peut être jugé ainsi.  Le monde est en guerre mais tous les bellicistes sont des gentils sauf ceux qui ont été désignés comme des méchants, par Obama ou un de ses prédécesseurs, leurs fidèles toutous, néanmoins chefs d'Etat, enfin de plus en plus fidèles car il y a 10 ans encore il existait une résistance,  et les médias. Alors aujourd'hui c'est les Russes et Bachar el Assad, hier c'était Milosevic, Saddam, Khadafi, Gbagbo et d'autres. C'est selon. Selon quoi? Devinez. En tout cas ce n'est pas toujours très avisé et surtout pas dans les intérêts de ceux qui "dénoncent", du moins des pays qu'ils représentent. Il faut faire la nuance.



Au début de ce billet je disais qu'i fut un temps pas si lointain où on était capable de désigner l'ennemi et donc de se mettre en position de le combattre. Cette époque est révolue. C'est même interdit de le faire. Des associations appointées pour cela y veillent assistées par des lois qui de plus en plus réduisent la liberté d'expression.

La désignation de l'ennemi s'est transformée en déclarations futiles d'indignation. On s'indigne contre des paroles, contre des graffitis, contre des violences de façon évidemment récurrentes puisque rien n'est fait de concret pour que tout cela cesse. C'est à pleurer! Et pas de rire.

Cette absence de courage, cette absence de désignation de la menace de façon explicite est un crime et davantage que cela une faute. Car les pays, les civilisations incapables de faire cela se condamnent à disparaitre, à être vaincus par ceux qui n'ont pas cette crainte de désigner en eux leurs ennemis et qui ne s'en privent pas.

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