Comme 10 millions de Français,
1,5 millions de moins que l'an dernier, c'est un signe, j'ai écouté les vœux
présidentiels. Avec un espoir fou. Sans vraiment y croire j'attendais quelque
chose comme "je vous avais promis l'inversion de la courbe du chômage et vous avais
demandé de me juger sur les résultats. J'ai visiblement échoué malgré ces
dizaines de milliers d'emplois d'avenir et autres fantaisies testées depuis
bien des années, et payées par vos impôts, enfin les impôts de ceux qui
travaillent. En conséquence j'en tire les seules conclusions que peuvent dicter
l'honnêteté et la loyauté vis-à-vis du peuple français que j'ai si mal servi :
ce soir à minuit, mes fonctions prendront fin."
Ah que ça aurait été beau et
digne. Un départ à la Jospin, mais en mieux. Une parodie du départ du général
de Gaulle, donc en moins bien, mais un instant qui aurait démontré que derrière ce président il y avait
peut-être un homme d'Etat en devenir. Lointain, très lointain.
Mais évidemment ce n'est pas à
cela que nous avons eu à faire. Pas de complexe chez cet homme, toujours
content de lui, et à cette occasion moins président que directeur des futures
campagnes électorales pour les municipales et les européennes. J'y reviendrai.
Reprenons un peu quelques
éléments de son discours que du coup je dois réécouter une nouvelle fois. Que
ne ferais-je pour éclairer mes lecteurs!
Son discours s'articule en 4
parties.
Dans la première, il dresse un
piteux bilan. Une année "intense et difficile" dit-il.
Commençant pas les conflits où il
a entrainé ou voulu entrainer la France. Il y aurait long à dire sur ces
épisodes maliens, syriens et centrafricains, mais il ne le fera pas évidemment.
Ce n'est sas doute pas le moment, mais je crains que ce ne le soit jamais. Il
enchaine sur un satisfecit octroyé à une
Europe qui aurait surmonté sa crise financière. Là-aussi il y aurait du grain à
moudre au sujet de cette affirmation très contestable en fait ne visant que les
symptômes d'une maladie que je pense toujours bien présente.
Puis il parle des réformes du
gouvernement, pour finalement n'en citer qu'une, celle du mariage pour tous.
Mais y en a-t-il eu réellement d'autres? Même à gauche on s'interroge
là-dessus. On pourra d'ailleurs considérer que citer le mariage pour tous alors
qu'un récent sondage montre les Français encore divisés à part quasiment égale
sur le sujet plusieurs mois après le vote de cette loi, relève soit d'une
maladresse, soit d'une provocation. En tout cas, ce n'est pas vraiment
rassembleur.
Quant aux difficultés il les
admet. Pouvait-il faire autrement? Mais évidemment ce n'est pas de sa faute.
C'est la faute à la crise, une" crise
s'est révélée plus longue, plus profonde
que nous l'avions nous-mêmes prévu". Il faut sans doute considérer
cela comme un aveu, un aveu d'impréparation, ou encore un aveu
d'incompétence. Et aussi un aveu de
malhonnêteté car on se souvient que la crise n'était pour rien dans les
problèmes de la France quand Sarkozy en était le président.
Donc à cause de la crise, le
chômage est toujours là. Et puis à cause de la crise il a fallu augmenter les
impôts devenus trop lourds " à force
de s'accumuler depuis de nombreuses années". Car là-aussi pas question
de prendre sur soi la responsabilité de la grogne fiscale. C'est de la faute
aux autres aussi, même si on ne voyait pas avant l'arrivée des socialistes au
pouvoir des mouvements de protestation parfois violents.
Ceci dit, pourquoi s'alarmer, car
les difficultés finalement sont peut-être une vue de l'esprit car "les résultats sont là", même si
personne ne les a vus. Et comme ils sont là on va donc continuer comme avant,
ainsi que le confirme cette phrase : "
les résultats sont là, j'ai confiance dans les choix que j'ai faits pour le
pays". C'est un peu effrayant,
non? Car si après un constat d'échec on en vient à dire qu'on va continuer
comme avant, il y a lieu de s'inquiéter surement.
Dans une seconde partie vient le
temps des annonces qui peuvent ressembler à des redites.
Il faut comme à chaque
intervention présidentielle une formule "choc". On a eu le pacte de
compétitivité, le choc de simplification, la boite à outils. Cette fois-ci ce
sera le pacte de responsabilité. Une
adresse à l'intention des entrepreneurs. On pourrait dire "enfin il a
compris que ce sont eux qui sont les seuls à pouvoir créer de l'emploi".
Reste que c'est contradictoire avec ses propos
sur la continuation de sa politique et que ce qu'il appelle un pacte
n'est rien d'autre que du simple bon sens qu'il n'est pas nécessaire de
formaliser. Il faudra juste le mettre en œuvre, ce dont on peut douter dès lors
que le budget est déjà voté. Par ailleurs on peut se demander pourquoi on n'y
avait pas pensé auparavant. Enfin si ce traduit par la suite comme les annonces
sur le choc de simplification par exemple, il ne se passera rien.
D'ailleurs ce thème de la
simplification revient dans les vœux démontrant bien que rien n'a été fait à ce
sujet (je pourrais pour ma part témoigner d'une aggravation dans mes relations
avec l'administration française).
Se contredisant une nouvelle fois
avec son affirmation de vouloir continuer la même politique, il plaide pour une
vraie réduction des dépenses, allant même jusqu'à évoquer les abus relatifs à
la sécurité sociale, une hérésie normalement chez les socialistes.
On notera aussi un couplet sur la
transition énergétique, un truc sans doute oublié mais ressorti opportunément
de la hotte du père François pour faire plaisir aux verts.
Donc pour résumer cette seconde
partie, il annonce une série de mesures sans qu'on puisse évidemment en
discerner le contenu, mais qui indiquent qu'il compte opérer un tournant dans
sa politique.
Qui croire donc? Un président qui
tente d'atténuer ses erreurs en en reportant la faute sur la crise et qui donc
ne compte pas changer de politique, ou un président ayant endossé le costume
d'une premier ministre, jamais évoqué d'ailleurs, qui énonce sa politique à
venir.
Dans une troisième partie, le
président donc après avoir endossé celui du premier ministre, et en s'adressant
à ses compatriotes de l'hexagone (quelle moche expression!) et des outre-mer (
moche aussi), oubliant au passage 3 millions d'expatriés concernés au moins par
les européennes (si, si on vote aussi pour les européennes désormais, rattachés
à la région IDF – tant pis pour Harlem), se pose en chef de parti en vue des
prochaines échéances électorales. C'est un exercice nouveau que ses
prédécesseurs avaient évité du moins au moment des vœux aux Français. C'est
dire la crainte, peut-être la certitude, de se prendre une raclée tant aux
municipales qu'aux européennes.
Certes il ne dit pas qu'il faut
voter socialiste, mais il le fait comprendre à demi-mot, au moins pour les
européennes.
S'agissant des municipales, il
joue sur la dissociation entre son action et celle des élus locaux. Il insiste
sur le fait que ces derniers après une autre réforme (?) auront davantage de
pouvoir. Ça veut dire en gros que les maires socialistes en place ne sont pas
responsables de ses erreurs et que si on en est content il faut d'autant plus
leur faire confiance une nouvelle fois qu'ils auront une marge de manœuvre
encore plus grande.
En ce qui concerne les
européennes il procède en deux temps. Dans un premier il nous vante les mérites
d'une Europe qui nous protège. Suffit-il de le dire pour convaincre, suffit-il
de déclarer que c'est en renforçant l'Europe que la France sera mieux protégée
pour que les électeurs en soient persuadés? En tout cas le président-chef de
parti doit le penser puisqu'il ne donne pas le choix mais dit qu'il faut "promouvoir une majorité politique
tournée vers l'emploi et la solidarité et non vers l'austérité et l'égoïsme
national" (on notera quand même
que deux minutes plus tôt il vient de déclarer qu'il fallait baisser les
dépenses). Euh! A-t-on encore le
choix? En tout cas venu d'un président en exercice, c'est quand même malvenu. Qu'il
laisse ça au si efficace Harlem, chef de parti (on ne rigole pas) et lui-même
tête de liste en IDF (juste histoire de garantir pour 5 ans encore des revenus
sans avoir jamais bossé). Au passage, comment prendre au sérieux des annonces promotionnelles
sur l'Europe à l'occasion d'une élection dont le plus grand mérite est de caser
dans d'excellentes conditions les copains et en particulier ceux qui soit ne se
risquent jamais à un suffrage direct , soit se sont pris des bâches en tentant
cet exercice (cela est vrai pour tous les partis)?
Concernant l'Europe toujours,
dans un second temps il fait son auto-promotion en annonçant des initiatives
avec l'Allemagne (dont on voit ce qu'elles ont pu donner depuis son élection)
pour renforcer l'UE.
Enfin il redevient président,
axant son discours sur la France et sa grandeur et en présentant enfin ses vœux.
Cet exercice des vœux a dont été
quelque peu surprenant. La forme a été jugée nulle par beaucoup de
commentateurs, mais c'est un détail. Quant au fond, l'essentiel, il ne
correspond pas à ce qu'on peut attendre d'un président en exercice lors d'une
telle prestation. On n'a pas vu là un président au-dessus le de mêlée, ou si
peu, mais un premier ministre et un chef de parti.
Dans ces différents rôles il sème
la confusion, ses propos en y regardant de plus près étant souvent
contradictoires. Il veut continuer à mener la même politique mais annonce des
mesures qui la remettent en cause. Il s'oppose aux politiques d'austérité quand
il s'agit d'Europe mais annonce qu'il va diminuer les dépenses. En fait c'est
du Hollande, il y en a pour tout le monde et pour personne à la fois. Certains aspects
de ses déclarations peuvent laisser penser qu'il va dans le bon sens, les
autres non. Le problème c'est que c'est sur les mêmes thèmes.
Bref, on ne sait toujours pas où
on va.
Pour vos étrennes je vous offre cette
vidéo d'un parlementaire européen eurosceptique qui s'attarde sur les
avantages de nos élites européennes. Un truc qui ne donne guère envie
d'Europe.
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