L'évolution du FN dans notre
paysage politique est symptomatique de la misère politique dans laquelle nous
nous trouvons. Il n'est qu'à se pencher sur le programme de ce parti, souvent
ubuesque, en tout cas irréaliste et même non réalisable du fait des multiples
accords internationaux qui nous lient à diverses institutions auxquelles nous
avons délégué sans doute excessivement, imprudemment surement, notre
souveraineté, pour se convaincre que la place qu'a prise ce parti trouve ces
origines ailleurs que dans une adhésion forte à ses idées.
Il n'est guère utile de rappeler
le jeu machiavélique joué par la gauche dans les années 80 pour faire émerger
ce parti du néant dans lequel il se trouvait. Ce sont bien les socialistes qui
ont fait entrer une trentaine de députés du FN à l'Assemblée Nationale (on ne
discutera pas ici d'une représentation nationale souvent éloignée des réalités
politiques du terrain en favorisant souvent certains – cocos et verts – surreprésentés par rapport à leur poids politique, et en en
pénalisant d'autres lourdement– le FN en
particulier). Afin que ceux qui ont participé à cette manœuvre indigne et qui
aujourd'hui encore hantent les couloirs du pouvoir, même s'il devient de plus
en plus symbolique, ne se sentent pas trop responsables de la situation
actuelle les obligeant à s'agiter dans tous les sens de façon aussi ridicule
que contreproductive, je dirai que leurs actions pour promouvoir ce parti n'ont
fait qu'accélérer un phénomène qui de toute façon était prévisible au regard de
la qualité de la gestion des affaires par nos gouvernants successifs, ceux
qu'on connait parce qu'on les a élus et les autres, ceux qui n'ont pas été élu
et qui disposent de pouvoirs exorbitants. On le constate d'ailleurs dans toute
l'Europe où même quand les partis du même type n'ont pas le même succès, en
Allemagne par exemple, les mêmes idées reçoivent un écho favorable de la part
de la population. Souvenons-nous, puisque l'Allemagne a été prise en exemple,
du succès du brûlot fustigeant l'immigration écrit par Thilo Sarrazin (Deutschland shafft sich ab), membre
pourtant éminent de la gauche socialiste allemande, et des sorties de la
chancelière sur l'échec du "multikulti".
Les partis, au choix nationaux,
identitaires, fascisants, populistes, et j'en oublie certainement, progressent
partout en Europe. Pour ma part je retiendrai le second qualificatif
(identitaire) qui me parait le plus adapté, du moins le plus en phase avec les
raisons du succès de cette mouvance. On pourrait y ajouter celui de
sécuritaire, bien qu'il soit fortement corrélé avec le précédent quand on jette
un œil sur la population qui emplit les prisons, qui passe devant les juges, ou
qui alimente copieusement la rubrique qu'on nomme "faits divers", une
façon sans doute de relativiser l'importance de ce qu'elle contient alors
qu'elle constitue le quotidien de beaucoup de monde et qu'elle est à la source
de bien des inquiétudes. Les politiques ne s'y trompent pas qui voudraient sans
doute interdire pour certains cette rubrique pour mieux cacher une terrible
réalité. Ainsi l'inénarrable Najat Valaud-Belkacem parle-t-elle de la
"tyrannie des faits divers" dont ses gardes du corps la tiennent
éloignée.
Les multiples débats, faux débats
car souvent ils ne peuvent le devenir du fait de l'aspect passionnel que prend
leur contenu, qui empêche les uns et les autres de réfléchir sereinement à un
avenir commun pour tous, qui empêche de dire de simples constats que n'importe
qui peut faire, j'y reviendrai, indiquent aux Français que quelque chose a
changé, et que ce 'est pas fini. Certains s'en félicitent, d'autres le
regrettent et parmi ces derniers certains tentent encore de résister. La crèche
Baby-Loup et ses multiples rebondissements dont le dernier laisse un gout amer,
enfin à ceux qui ne sont pas gagnés par cette joie malsaine du constat de nos
reculades successives face aux ennemis de notre société, le hallal dans
l'assiette de nos enfants dans les cantines, dans nos assiettes et à notre insu,
l'abattage barbare du même nom toléré au nom de la différence, le port du voile
dans l'espace public, à l'école, à l'université, le difficile accouchement de
la loi anti-burqa, la construction d'édifices religieux financés en
contravention avec la loi sur la laïcité, les prières de rue, enfin toutes ces
choses, j'en oublie, qui nous ramènent au constat que la laïcité est menacée,
qu'au mieux nous devons accepter d'autres modes de vie voyants que les nôtres
sur notre territoire, et même sur notre palier et qu'au pire… Chut!
On nommera tout ceci l'insécurité
culturelle. Ce concept est d'ailleurs utilisé par une frange de la gauche,
honnie du reste de cette grande famille, qui après avoir compris les causes de
la perte de l'électorat populaire, s'efforce de développer des propositions
destinées à le faire revenir. Mais tout cela n'est pas très en phase avec
l'idéologie de terra nova qui au contraire veut s'appuyer pour partie sur les
minorités à l'origine du malaise. C'est d'ailleurs fort efficace d'un point de
vue électoraliste si on se réfère au vote musulman. Ceux qui nous gouvernent ont
accepté le prix à payer, donc la perte des catégories historiquement défendues
par la gauche, pour profiter des ors de la République. Mais comme la gauche est
par essence morale, on n'ira pas regarder d trop près les aspects moraux de ces
choix. Cependant on ne pourra manquer d'observer ceux qui nous dirigent avec
une certaine ironie quand ils constatent et fustigent la montée du FN, cette
ironie si bien exprimée par Bossuet quand il disait que " Dieu se rit des hommes qui chérissent les causes dont
ils déplorent les effets."
Et puis bien sûr
il y a l'insécurité, celle des biens et des personnes, celle dont la gauche
disait il y a un peu plus de 10 ans qu'elle n'était qu'un sentiment et non une
réalité. Cette insécurité, on le sait augmente. La violence qui l'accompagne
augmente aussi se manifestant désormais par des actes, parfois gratuits (le mauvais
regard, la cigarette non offerte par le non-fumeur), ou hors de proportion avec
le but rechercher : on tue désormais pour quelques euros. La gauche sait ce que son angélisme lui a
coûté. Désormais, elle n'ose plus vraiment tenir le même discours. Mais les
modes d'action pour traiter ce problème sont quand même particuliers et peu
convaincants. Il sera difficile de persuader les Français que les délinquants
dehors seront moins dangereux que les délinquants en prison. C'est inacceptable
pour les victimes. Réelles ou potentielles. Les Français ne sont d'ailleurs pas
convaincus. Le ministre de l'intérieur non plus. Mais là-haut ça se règle à
coup de bisous. Pas dans la rue.
Et puis il y a ce
camouflage de la réalité destiné à limiter cette "tyrannie des faits
divers". On ne les cite pas tous, c'est impossible. Mais il y en a qu'on
n'oublie à dessein. Par exemple une mosquée taguée n'échappera à personne,
tandis que des croix arrachés dans un cimetière ça restera un fait divers juste
connu localement. Il s'agit de fait de tenter de convaincre que les plus
victimes ne sont pas celles qu'on croit et qui ceux qui commettent des délits
non plus. Donc inversons les rôles en choisissant de quoi on va parler. Mais ce
n'est pas suffisant, on ne peut quand même pas assécher la rubrique. Donc on ne
cite plus les noms, sauf ceux qui sonnent bien gaulois, ou pire on les
gallicise. Sauf que ça a ses limites puisque si on constate que tous les
"souchiens" au centre d'un fait divers ont droit à l'étalage de leur
identité, on en déduit donc que ceux dont le nom est omis n'en sont pas.
Du coup, quand on
conjugue les phénomènes, les gens deviennent persuadés que le mensonge
désormais fait loi. Surtout quand de temps à autre sort un livre
"dérangeant", en fait fortement critiqué par ceux qui pensent bien
qui nous dévoile quelques vérités. Je pense par exemple à ce livre "La France
orange mécanique" d'Obertone, certes pas un chef-d'œuvre de littérature
mais qui par les chiffres qu'il dévoile et les faits divers souvent tirés de la
presse locale, donc inconnus du plus grand nombre, qu'il révèle nous donne une
autre image de l'insécurité que celle édulcorée qu'on nous offre
quotidiennement.
Dès lors, quand un
parti politique, et nonobstant les solutions qu'il propose, tient un langage
crédible, c'est-à-dire correspondant peu ou prou avec la perception qu'ont les
Français d'une situation, dans les deux domaines de l'insécurité précités, il
est logique qu'il remporte un certain succès. Il serait illusoire de penser que
seules les questions économiques, du moins celles qui les touchent au premier
chef, intéressent la population qui d'ailleurs sent bien que les choses dans ce
domaine se décident essentiellement ailleurs, au FMI, à Bruxelles… Par contre
sur ces problèmes d'intégration des étrangers et même des Français d'origine
étrangère, sur ces questions de laïcité, sur ces préoccupations identitaires
qui sont les leurs, sur le traitement de la délinquance, sur le fonctionnement
de la justice, les Français se retournent vers leurs gouvernants. Et si ceux-ci
ne sont pas à la hauteur et pire s'ils donnent l'impression de mentir sur la
réalité, ils le font payer électoralement. Soit ils ne vont plus voter, soit
ils portent leurs suffrages vers celui qui tient un langage qui parait vrai.
Et lutter contre
ça ne peut pas se faire en utilisant l'invective et même l'insulte envers ce
parti et par conséquent envers ceux qui votent pour lui. Ces discours dénués de
tout argument, se rattachant à une vague morale dont pourtant leur pratique du
pouvoir nous montre combien ces gens qui les tiennent en sont dénués, sont
évidemment contreproductifs et semblent même indiquer que c'est le FN qui dit
vrai. Ce n'est qu'un langage de vérité suivi d'une réelle action qui videra les
rangs du FN. Sarkozy avait franchi la première étape en 2007 par son verbe. Il avait
en effet suffisamment affaibli le FN pour que celui voie son existence menacée
pour des problèmes financiers liés à des élections désastreuses pour lui. Mais comme il n'en est resté qu'au stade du
discours, que le karcher est resté rangé, que le communautarisme a continué à
se développer, il a à la fois perdu les élections et relancé le FN.
Pour terminer je
voudrais caractériser la situation de la France par cette citation volée à Karl
Kautsky qui n'aurait sans doute pas été un partisan du FN:
"Quand
une classe ou une société dégénère, ou qu’elle est trop violemment bousculée,
elle rejette toujours la vérité. Elle n’use plus de son intelligence pour
clairement établir ce qui est, mais cherche des arguments pour s’apaiser, se
consoler et se tromper elle-même."
Le FN est sans doute la réaction,
une réponse, mauvaise sans doute, mais on en attend impatiemment une meilleure,
à cet état d'esprit qui semble être celui de ceux qui nous dirigent, de nos
intellectuels, ceux qu'on nous montre partout, et des médias. Et la seule
consolation réside sans doute dans cette partie encore notable du peuple
français, cette partie qui aime la France cette partie attachée à son héritage,
cette partie qui refuse une France qui ne serait qu'un ensemble administratif
où prospéreraient des communautés étanches, cette partie qui pense que la France
a encore un rôle à jouer, et qui dit non à ceux qui veulent lui ôter son
essence.
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