"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

mercredi 3 octobre 2012

A quoi sert le referendum? (1)


Trois sujets d'actualité soulèvent suffisamment de passions pour qu'un nombre sans doute significatif de citoyens semblent exiger de la part du chef de l'Etat l'organisation d'un referendum, enfin de trois en l'occurrence qu'on pourrait peut-être regrouper. En tout cas, si on n'est pas vraiment sûr que les Français souhaitent ces referendum, ou n'en souhaitent qu'un, deux ou trois, on entend certains partis politique en exiger, certes pas les trois, mais ceux dont ils pensent que la réponse leur sera bénéfique.

Ainsi voit-on la gauche de la gauche, appellation sans doute destinée à faire oublier qu'avant ça s'appelait l'extrême-gauche et que la filiation de cette dernière n'est pas très reluisante, du moins en termes de droits de l'hommes, de génocides, de privations de libertés et autres joyeusetés (tandis que dans le même temps est très prisé le terme d'extrême-droite avec même quand on ne peut l'établir une filiation fantasmée avec Vichy et la collaboration, n'est-ce pas Mme Hidalgo qui a dû sécher quelques cours d'histoire puisqu'elle n'a même pas l'excuse d'un jeune âge pour dire qu'on ne lui a pas appris), donc ainsi voit-on l'extrême-gauche demander l'organisation d'un referendum sur le fameux traité budgétaire européen, celui que le candidat hollande avait promis de renégocier tellement il était inacceptable. Elle est accompagnée dans cette démarche par le front national et aussi des éléments disparates, l'ensemble constituant peu ou prou le camp des nonistes de 2005, camp qui a perdu en route celui par lequel le scandale arriva au sein du PS à l'époque, à savoir Laurent Fabius. Mais on a appris depuis longtemps, et certains dans ce gouvernement (n'est-ce pas Duflot?) ont poussé la mesure si loin que ceux qui ne s'en seraient pas encore aperçu doivent le considérer désormais comme une évidence, que les convictions politiques ne valent guère quand elles sont confrontées à de médiocre petits intérêts personnels.

La droite, dite républicaine, peut-être pour signifier qu'elle n'est pas monarchiste à la différence de… heu, de…, bon passons, n'appelle pas à l'organisation de ce referendum, mais en verrait bien un sur la vote des étrangers aux élections locales. Un retournement récent des sondages peut l'y encourager, même si finalement cette demande de referendum semble inutile car il est sans doute inéluctable si Hollande et le gouvernement veulent tenir cet engagement reformulé pour la nième fois depuis 1981. Reste qu'il faut cependant se méfier de certains traitres qui pourraient permettre de faire passer la chose en Congrès. La traitrise fait également partie du jeu politique. Et c'est même une tradition que mon hostilité à la gauche m'empêchera de préciser. Même si de ce côté-là on n'est guère plus net véritablement.

Et puis il y a ce troisième sujet qui est le mariage homosexuel et l'homoparentalité que certains, quelques politiques et quelques associations voudraient bien voit trancher par les Français par le biais d'un referendum. Ceux-là ne croient sans doute pas aux vertus des sondages qui laissent supposer que les Français seraient favorables au moins au mariage homosexuel, le thème de l'homoparentalité n'étant abordé que d'une façon qui me semble superficielle sans doute à dessein.

Chacun de ses sujets est effectivement d'une importance telle que l'usage du referendum ne semble pas incongru pour les trancher.
Contrairement à ce qu'a affirmé très récemment le premier ministre devant l'Assemblée Nationale, le traité budgétaire constitue bien une remise en cause de la souveraineté budgétaire du pays. Outre ses aspects techniques, ce traité constitue bien une vision de l'évolution de l'Europe qui éventuellement peut intéresser les peuples des différents pays de cette entité.
S'agissant du vote des étrangers, il s'agit là d'une modification de la citoyenneté sur laquelle il serait tout de même intéressant, sinon utile, d'avoir l'avis des citoyens en titre de ce pays. D'autant plus que la manière de présenter les choses est fort discutable dans la mesure où les partisans du projet nous expliquent que l'octroi de cette (sous-)citoyenneté favoriserait l'intégration (ne parlons surtout plus d'assimilation!) tandis que d'autres pensent, et c'est mon cas, que la citoyenneté doit être l'aboutissement d'un processus d'assimilation (va pour intégration puisqu'il s'agit d'une sous-citoyenneté mais seulement si on veut bien se donner la peine de définir ce qu'est une intégration réussie).
S'agissant du mariage homosexuel et de l'homoparentalité, il s'agit là d'une modification sensible de la structure familiale traditionnelle avec des conséquences pour les couples hétérosexuels qui resteront, sans doute, et je m'abstiendrai ici d'un jugement de valeur, majoritaires. Si on considère que la famille constitue toujours un des piliers de notre société (et que d'ailleurs la détérioration de ce dernier est peut-être une des causes du malaise social actuel) là encore un avis, non pas un avis, davantage que cela, une décision du peuple par le biais du referendum ne parait pas saugrenue.

Et pourtant il n'y aura pas de referendum. On se demande d'ailleurs s'il en existera encore aux résultats incertains, nécessitant de la part des politiques de déployer pédagogie et persuasion pour amener le peuple là où ils souhaitent. Le dernier referendum de 2005 sur le traité constitutionnel européen peut être d'ailleurs considéré comme un accident de parcours, tant, je pense, il semblait évident, et même les sondages le disaient, que le OUI allait l'emporter. Mais enfin accordons à Chirac le bénéfice du doute et rendons lui grâce de nous avoir offert ce dernier grand moment de démocratie. Reste qu'il aurait dû se méfier, à condition bien sûr qu'il ait été initialement persuadé que le OUI allait l'emporter, car le referendum sur Maastricht aurait pu connaitre un sort funeste. Ce sont sans doute un fort taux d'abstention et le cancer de Mitterrand qui ont fait pencher de peu la balance vers le OUI, et ce malgré un début de campagne qui laissait aussi les nonistes à la marge dans les sondages.
Au sujet du referendum de 2000 sur le quinquennat, tout le monde politique ou presque était d'accord et les Français s'en moquaient puisqu'ils se sont plus que massivement abstenus. A tort d'ailleurs car les conséquences sont importantes du passage du septennat au quinquennat, expliquant entre autres les changements quant aux comportements présidentiels. De fait le sujet n'a pas eu les débats qu'il méritait.
Le referendum de 1988 sur la Nouvelle-Calédonie n'avait pas non plus attiré les foules, sans doute peu concernées par ce qui se passait sur ces îles lointaines.
Celui de 1972 sur l'élargissement de l'Europe à l'Irlande, la Grande-Bretagne, la Norvège (qui reculera, rente pétrolière oblige), et le Danemark, aura connu de l'intérêt. Comme quoi l'Europe peut, ou pouvait être, un sujet d'intérêt. Les autres élargissements, pourtant plus discutables, n'auront pas été discutés. L'Europe échappe peut-être à cette époque au peuple français puisqu'ensuite on fait deux referendums pour confirmation des sondages, en passant outre le résultat "s'il n'est pas dans la ligne de l'histoire". On aurait sans doute fait de même pour Maastricht, les Danois ayant été obligés de revoter. Les Irlandais qui sont obligés constitutionnellement de s'exprimer par referendum à chaque traité connaissent bien ce processus.
Le dernier vrai referendum, ce fut donc peut-être celui de 1972, qui intéressait les Français et dont le résultat ne semblait pas devoir être remis en cause.
Avant celui-là, il y en a eu quatre, avec peu d'abstention, et portant sur de vraies questions : la politique d'autodétermination du général de Gaulle en Algérie (61), l'approbation des accords d'Evian (62), l'élection du Président de la République au suffrage universel direct (62 – celui-là est intéressant sur la méthode, j'y reviendrai peut-être), et le fatal referendum sur la régionalisation et la réforme du Sénat (69). Ce dernier est aussi intéressant car l'enjeu qui se trouvait derrière la question posée a sans doute modifié la perception de ce moyen d'exercer une démocratie directe sur un point précis.

Comme je sens que je vais être trop long, je vais cesser ici dans l'immédiat, en espérant livrer une suite assez rapidement.
Dans l'immédiat ce qu'il faut retenir c'est que le referendum finalement a été utilisé assez peu en 54 ans, juste 9 fois dont 4 sous de Gaulle. C'est donc un outil qui apparemment fait peur à l'exécutif qui semble l'employer depuis de Gaulle seulement quand la victoire est assurée, même si on n'est pas à l'abri d'un accident. Depuis la fin de la présidence de de Gaulle, 3 des 5 referendums ont été consacrés à l'Europe et ont connu un bon taux de participation avoisinant les 70%, ce qui signifie que le peuple se sent concerné. Les deux autres, dont l'un presque obligatoire, sinon juridiquement, moralement car c'est la présidence, clé de voute de notre système politique qui était touchée, ont fat un vrai bide. Aucun référendum n'a porté sur des questions de société. Peut-être serait-il temps? Surtout à une époque où on ne cesse de pleurer sur le délitement du lien social. Mais nous y reviendrons dans une partie suivante.

2 commentaires:

  1. je serais incapable de voter oui ou non pour ce fameux traité en sachant l'argumenter
    je voterais oui pour répondre à une question qu'on ne pose pas, celle de faire le pari européen et de rester groupés ou de commencer un éfilochage , déjà nous sommes sans GB et sans les tchèques

    le sociétal ne me pose pas de probléme

    on a du mal à séparer la réponse brute sans y associer l'aval que l'on donne à celui qui pose la question

    je propose un référendum inédit
    question, entre votre âme et conscience comprenez vous ce qu'il se passe si oui/non trouvez vous judicieux d'organiser des référendum

    recevez mon admiration, vous ne lâchez jamais et ça nous rajeunit les neurones

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  2. Il y a des moments où on est pris dans un mouvement contre son gré, ce qui oblige ensuite à modifier ses stratégies pour que les choses ne soient pas pires encore.
    J'ai voté non à Maastricht et je n'en éprouve aucun regret. Mais une fois la chose lancée, il me parait difficile de revenir en arrière de faire un bond de 20 ans dans le passé et de faire comme s'il ne s'était rien passé. Mes compétences ne me permettent pas de mesurer toutes les conséquences d'une sortie de l'euro, mais je devine que pendant un temps long ce sera un sacré foutoir sans être pour autant sûr que les bases ensuite soient assainies. Je sais aussi qu'à partir du moment où on accepte ça on ne peut plus que souhaiter l'événement d'une véritable Europe de type fédéral.Donc je serais obligé de voter oui, mais avec quand même un certain regret.

    Les deux autres sujets ne me posent aucun problème de ce type.

    J'essaierai de parler demain (j'espère) des problème inhérents au referendum.

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