"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

lundi 30 mai 2011

Le programme du parti socialiste vient de sortir


Et bien voilà, c'est fait. Dans une indifférence quasi générale, et on comprend pourquoi vu la teneur de la chose, les socialistes viennent d'approuver samedi leur programme pour 2012. Malgré sa pâleur ce dernier constituait un rayon de soleil entre un cyclone et les orages à venir.
En effet, après la disparition du candidat qui avait sa propre conception du rapprochement des classes, des races, des sexes et même des religions et qui ne devait faire qu'une bouchée de Sarkozy , et avant les orages qui vont ponctuer la période des primaires et n'en doutons pas celle qui suivra, tant il est clair que ça va encore s'étriper chez les sauveurs de la France, une journée où pouvait s'afficher sereinement une autosatisfaction, fusse-t-elle fondée sur du vent, ne devait pas faire de mal. Une veillée d'armes en quelque sorte.
 
Votre serviteur, s'éloignant des frasques du candidat à la candidature désormais déchu et d'un ministre ou secrétaire d'Etat, je ne me souviens plus, appelé à démissionner parce que soupçonné de mal également maitriser ses pulsions, a bien voulu se pencher sur un programme qui, sait-on jamais, aurait pu le porter dans un élan d'enthousiasme tel qu'il serait rentré en France pour participer aux primaires d'octobre et surtout signer une profession de foi indiquant qu'il adhérait aux valeurs de la gauche française, quoiqu'on ne sache pas ce qui se cache réellement derrière ce terme polysémique. Mais c'est vrai qu'on a pris tellement l'habitude d'entendre des gens dirent simplement qu'ils sont de gauche pour signifier qu'ils sont parés de toutes les vertus qu'on oserait mettre en doute ces dernières, même si objectivement la distance qui sépare l'aile droite, quel vilain mot, du parti socialiste est moins grande que celle qui la sépare de Mélenchon voire même de Hamon ou Emmanuelli au sein du même PS. Jospin avait très bien formulé ça avec la formule de gauche plurielle, cette pluralité n'étant pas tout à fait étrangère à son exil sur l'île de Ré, ce qui reste néanmoins moins infamant qu'un séjour éternel et forcé sur l'île d'Yeu.
 
Pour donc revenir au programme du PS décliné en 30 propositions qui devraient nous porter vers une autre civilisation selon un livre récent préfacé par Martine Aubry, j'y ai trouvé du réchauffé, de l'incantatoire, mais aussi quelques innovations qui méritent qu'on s'y arrête. Néanmoins avant d'aborder ces points, je dois constater que les financements, mis à part les 50 milliards environ qui devraient être escroqués aux Français imposables, je vais y revenir, n'apparaissent pas clairement. Bien évidemment on va selon la formule habituelle jouer aux Robins des Bois, prendre aux riches pour distribuer aux pauvres, mais à part ce vieux principe de vases communicants qui n'a jamais vraiment fonctionné, on ne voit pas comment nos amis socialistes vont s'y prendre pour financer leur programme.
 
Sur le réchauffé, je vais passer très vite. Il y a d'une part les mesures déjà testées sous Jospin et qui lui ont sans doute valu sa popularité comme les emplois jeunes qu'on appellera désormais emplois d'avenir. Il y a aussi ces vieilles rengaines qu'on nous bassine depuis 30 ans comme le vote des étrangers aux élections locales, juste histoire d'agiter le chiffon rouge qui fera un peu monter le vote FN qui d'ailleurs sera reconnaissant au PS de proposer une part de proportionnalité aux législatives ce qui devrait lui assurer un retour triomphant à l'Assemblée Nationale rappelant une certaine législative de 1986. Ce sont bien les héritiers de Mitterrand, je confirme.
 
L'incantatoire est pour sa part transverse aux 30 propositions. Souvent peu développées quant à leur mise en œuvre, elles déclinent donc très peu des objectifs eux-mêmes assez vagues. Quelques exemples trouvés sur le site du PS :
  • Augmenter les droits de douane : Pour protéger les intérêts de l'Europe, de ses savoir-faire et de ses salariés dans la mondialisation, pour mieux réguler le commerce, nous agirons pour augmenter les droits de douanes sur les produits provenant de pays ne respectant pas les normes internationales en matière sociale, sanitaire ou environnementale.
    A retenir bien entendu le "nous agirons" qui reste évidemment très vague dans la mesure où il s'agit de quelque chose de vain que des gens comme nos trois candidats en tête pour les primaires devraient le savoir eux qui ont voté "oui" à Maastricht et au traité constitutionnel en 2005.
  • Pour réduire l'endettement de la France, nous affecterons à la réduction de la dette la moitié des marges financières que nous dégagerons. Quelles marges financières? Comment les dégager? On est là dans le vœu pieu. D'autant plus que parmi les 30 propositions certaines correspondent à des dépenses nouvelles dont on se demande comment elles pourraient être financées en dehors de ces marges ou d'un creusement de la dette.
  • Pour que notre alimentation soit plus saine et pour que les agriculteurs vivent de leur travail, nous orienterons les achats alimentaires des collectivités locales vers l'agriculture et la pêche de proximité (lait et laitages, viandes, fruits et légumes).
    Là nous venons de découvrir que proximité rime avec alimentation saine. J'ai un peu de mal à voir le rapport, mais puisqu'ils le disent.
  • Pour l'enseignement supérieur et la recherche, nous donnerons la priorité́ à la réussite dans les premiers cycles universitaires, nous renforcerons l'encadrement pédagogique et nous donnerons les moyens pérennes nécessaires à l'autonomie et au rayonnement des équipes, des laboratoires et des Universités. Déjà la priorité à la réussite dans les premiers cycles (licence je suppose) ça veut dire quoi ? Injecter de l'intelligence aux étudiants ou opérer (enfin) une sélection à l'entrée de l'université ? Ou plus simplement faire avec la licence ce qui fut fait avec le bac ? Quant au reste à part le fait que ça doit coûter de l'argent, je ne vois guère ce qu'il peut y avoir derrière.
  • Pour la santé, nous remettrons l'hôpital au cœur du système, et nous demanderons aux jeunes médecins libéraux d'exercer en début de carrière dans les zones qui manquent de praticiens. Remettre l'hôpital au cœur du système, ça veut dire quoi ? (Cimabue au secours!). Quant aux jeunes médecins on leur demande gentiment, avec du pognon et des cours de self-défense à la clé, ou en les obligeant (comment d'ailleurs ?)?  
Bon j'arrête là pour m'attarder sur quelques mesures aux conséquences par forcément mesurées ou parfois drôles. Avec ne mention particulière pour la dernière mesure de cet inventaire qui vous permettra de voir comment derrière une mesure qualifiée de juste, mais sans vous expliquer pourquoi, se cache une tentative de vous faire subir ma même chose que DSK a (peut-être, restons prudent) voulu faire subir à  une femme de chambre à NYC :
  • Pour refaire passer l'économie devant la finance et pour réguler le système financier, nous baisserons l'impôt sur les sociétés de 33% à 20% pour les entreprises qui réinvestissent intégralement leurs bénéfices et l'augmenterons jusqu'à 40 % pour celles qui privilégient les dividendes des actionnaires ; nous instaurerons au niveau européen une taxe de 0,05 % sur les transactions financières ; nous lutterons pour la suppression des paradis fiscaux ; nous séparerons les activités de dépôt et d'investissement des banques ; nous créerons une agence de notation publique européenne. Bon, là on mélange un peu tout, des choses qui ne sont pas de nos compétences nationales avec un seul point qui l'est. Donc même remarque que précédemment : surprenant pour des promoteurs du libre-échange et de l'Europe telle qu'elle est. Le point franco-français reste l'impôt modulable sur les sociétés avec ce paradoxe qui verrait certaines sociétés cesser de verser des dividendes à leurs actionnaires (donc propriétaires) pour être taxées au plus bas. Si je peux comprendre que l'équilibre entre dividendes, investissement et redistribution vers les salariés (tiens ici on n'en parle pas !)est souhaitable, il faut aussi rester persuadé que l'actionnaire n'est pas forcément un mécène, peut être très volatil et aussi que sans actionnariat les entreprises d'une certaine taille ne fonctionnent plus.
  • Nous limiterons les rémunérations abusives : rémunérations variables n'excédant pas la part fixe, écarts de rémunérations de 1 à 20 maximum dans les entreprises à participation publique… Voilà une manière saine de relancer l'ascenseur social. Car dans ces entreprises on verra émerger de hauts responsables qui n'auraient jamais pu espérer accéder à de tels postes. Par défaut bien sûr, puisque bien évidemment les plus compétents se dirigeront vers le privé. Par ailleurs, que se passera-t-il avec le salaire des "inutiles", c'est-à-dire des saltimbanques parfois animateurs télé voire journaliste, des footeux… ? C'est peut-être ça aussi la nouvelle civilisation : la confirmation d'une nouvelle échelle des valeurs.
  • Pour lutter contre les discriminations, nous généraliserons les CV anonymes, sans nom ni photo et nous expérimenterons un système d'attestations remises par les policiers lors des contrôles d'identité. Je me suis déjà exprimé il y a peu sur les CV anonymes. Ceux que ça intéresse pourront donc s'y référer. Pour les contrôles d'identité, si je comprends bien il suffirait de présenter l'attestation de contrôle du jour pour en être dispensé. Pourquoi pas simplement sa carte d'identité car le policier devra bien être obligé de contrôler la cohérence entre le nom figurant sur l'attestation et la carte d'identité. Moi, je proposerais pour les rendre attractifs que les contrôles d'identité soient rétribués. Une juste contrepartie de la discrimination puisque la mesure socialiste suppose implicitement que les contrôles ont une nature discriminatoire. Les policiers apprécieront.
  • Pour améliorer la sécurité des Français et la tranquillité publique, nous renforcerons les moyens de la police, de la gendarmerie, notamment en créant 10 000 postes de gendarmes et de policiers de proximité. Bon, retour sur une mesure Jospin non évoquée plus haut avec en plus un recrutement important de membres des forces de l'ordre. D'une part ça ne sert pas à grand-chose si en aval on ne sanctionne pas les délinquants, donc si on ne revient pas sur cette disposition qui veut que condamné à moins de 2 ans on n'aille pas en prison, et donc si on ne construit pas de nouvelles prisons pour accueillir 20000 délinquants supplémentaires (je suppose ici que les criminels n'échappent pas à la prison). D'autre part, si j'étais encore militaire je m'inquiéterais de cette mesure dont il est probable qu'on essaiera de minorer le coût en supprimant autant de postes dans les armées.
  • Pour stopper l'envolée des loyers, nous plafonnerons leur montant lors de la première location ou à la relocation, notamment dans les zones de spéculation immobilière. Ici je laisserai un socialiste, en l'occurrence Gérard Collomb répondre à ma place : "la pire période du logement en France, ça a été les lois de 1948 qui interdisaient l'augmentation des loyers et donc qui ont amené a une véritable pénurie de logements. Donc, si on consulte un certain nombre d'élus qui ont une expérience dans le domaine du logement, peut-être pourra-t-on moduler ces propositions."
  • Pour alléger la facture énergétique des Français, nous réinvestirons une partie des superprofits des groupes pétroliers dans des aides à l'isolation, le développement des énergies renouvelables et la mise en place de tarifs sociaux pour le gaz, l'électricité et l'eau. Là je dois dire que j'ai quand même bien rigolé. Je suppose que c'est Total qui est visé. Total qui malgré de substantiels profits mondiaux ne paie pas d'impôts en France parce qu'il n'y fait pas de bénéfices. De fait cette mesure a autant de pertinence que celle hypothétique qui prétendrait taxer en France Gazprom ou British Petroleum.
  • Pour davantage de justice dans les impôts, nous fusionnerons l'impôt sur le revenu et la CSG dans un impôt citoyen plus progressif et prélevé à la source. J'ai gardé celle-là pour la fin d'une part parce que j'ai déjà donné, et que d'autre part ça vous permettra de comprendre comment de la part de l'Etat gagner 50 milliards d'euros sur le dos des contribuables. Déjà je voudrais qu'on m'explique pourquoi c'est plus juste. A part cela, étant expatrié et touchant une pension en France, je suis prélevé à la source. A la limite, maintenant je ne vois plus trop la différence avec avant quand j'étais en France et mensualisé. Par contre le l'ai vue la première année où j'étais donc prélevé tous les mois sur mes revenus en France tout en payant mes mensualisations sur mes revenus de l'année A-1. Car bien évidemment payer ses impôts à la source, donc en temps réel, ne dispensera sans doute pas de payer ceux dus au titre de l'année A-1. Donc au pire l'année de mise en place les contribuables paieront un double impôt, celui de l'année A et celui de l'année A-1. Au mieux ou au moins pire, ça sera étalé, mais sans doute pas au-delà de la législature. Le temps de la mise en place, comptez donc au minimum une imposition majorée de 25%. Mais bonne nouvelle : l'année qui suivra votre décès vous n'aurez plus, enfin vos héritiers n'auront plus à en payer pour vous.
Je vais cesser là mon inventaire, après l'examen d'un bon tiers des mesures proposées par nos amis socialistes dont vous pourrez encore mieux apprécier la pertinence, mais sans les commentaires en allant jeter un œil sur leur site. Je sais que les périodes électorales représentent aussi des instants où les bonimenteurs sont rois. Je n'espère d'ailleurs pas mieux des autres partis. Mais avoir mis autant de temps pour nous pondre ça me laisse quand même dubitatif.
Ah si ! J'allais oublier ! Ceux qui espéraient encore un miracle et donc un retour triomphal d'un DSK blanchi pourront comprendre que le PS a fait une croix définitive sur cette hypothèse. Ils proposent en effet un retour à la retraite à 60 ans, ce qui ne figurait pas dans le pré-projet.

vendredi 20 mai 2011

DSK ou quand l'irrationnel domine toute réflexion



Il est des moments où quand la majorité des prises de position vous semblent irrationnelles, dénuées donc de tout sens critique et ne reposant que sur des analyses où les faits manifestement n'ont guère trouvé de place, vous pouvez être amenés à penser que c'est vous qui n'allez pas très bien et vous dire que finalement le plus irrationnel n'est pas celui qu'on croit.
Je dois avouer que j'ai eu ce questionnement à certains moments de cette semaine qui vient de s'écouler où je vis certains des mes appréciés correspondants prendre des positions qui m'ont surpris alors que généralement nous avons tout de même une certaine proximité dans nos opinions et valeurs. J'ai d'ailleurs été très discret pensant, à tort ou à raison, que le temps d'une discussion sereine n'était pas encore venu. Impression assez partagée avec un correspondant outre-Atlantique (hi Osceola), sans doute encore plus incrédule que moi en ce qui concerne les réactions qu'il peut lire dans la presse ou sur les blogs français puisque lui a au moins cet avantage de connaitre le fonctionnement et la philosophie de la justice de son pays. Et donc là où certains en France voient de l'acharnement, lui voit juste le traitement classique d'une affaire relevant du fait divers à la nuance près que le principal acteur de ce fait divers n'est autre que le directeur général du FMI qui avant ce 14 mai possédait des chances plus que raisonnables de devenir le prochain président de la République française, confronté aux accusations de viol, tentative de viol, séquestration, violences émises par une femme de chambre.
 
Avant de poursuivre et de livrer mon analyse de cette situation, je voudrais faire part des mes impressions au sujet de cette affaire. Quand dimanche dernier j'ai ouvert mon ordinateur et que j'ai lu que DSK avait été arrêté et était soupçonné d'une agression sexuelle sur une femme de chambre, je dois avouer que mon incrédulité a été de très courte durée. Disons que j'ai été moins surpris que si j'avais lu que Raffarin, Fillon, Fabius ou Hollande étaient soupçonnés des mêmes faits. C'est clair qu'on savait DSK cavaleur, et "aimant" (ce verbe est à prendre avec nuance bien entendu : moi j'aime le couscous mais n'en suis évidemment pas amoureux) les femmes de manière sans doute un peu trop compulsive. Bien évidemment il y a un pas entre ce statut de dragueur invétéré et celui de violeur, mais il était clair que son appétence au sexe était une de ses faiblesses. Les tenants de la théorie du complot devraient d'ailleurs s'en réjouir car c'était effectivement un angle d'attaque possible de la personne de DSK. Sauf que même si complot il y eut, on peut se demander si un personnage tombé dans un tel piège avait toutes les qualités pour diriger un pays. Mais les langues commençant à se délier, d'anciennes accusations mises opportunément sous le boisseau étant maintenant reprises tout aussi opportunément, une député assez connue du PS allant jusqu'à déclarer qu'elle évitait de se trouver seule dans une pièce avec l'individu l'ayant auparavant déjà harcelée, on comprend que la théorie du complot, sans devoir être définitivement abandonnée commence à bien s'effriter. D'ailleurs ma première réaction quand j'ai lu que cette théorie était mise en avant par beaucoup de monde, et pas seulement au café du commerce en bas de la rue, a été de penser qu'il était quand même compliqué de monter quelque chose de ce genre avec une femme de ménage, si telle était sa réelle qualité, et qu'il serait quand même assez simple de lui faire avouer ses mensonges si les faits dénoncés étaient faux. Quand j'ai appris un peu plus tard que cette femme était en poste depuis 3 ans la théorie du complot "téléguidé" m'a paru d'autant plus absurde. Il s'est donc très certainement passé quelque chose dans cette suite du SOFITEL entre DSK et une femme de chambre. Et, quelques soient les éléments qui seront mis en avant par chacune des parties maintenant, je reste persuadé que, et même en cas de retrait de la plainte, eux-seuls resteront les détenteurs d'une vérité qui échappera donc à tout le monde.
 
Je passe maintenant, et c'est sans doute plus intéressant à tout ce qui s'est passé autour de l'affaire proprement dite et dont je crois qu'objectivement, en fonction des connaissances que nous avons à ce sujet, nous ne pouvons guère dire davantage que ce que je viens de dire.
Tout d'abord les réactions sur l'affaire proprement dite ou le fond si on préfère. Je passe très vite sur celle de Bernard Debré, particulièrement violente et qui ne pourrait se justifier que s'il avait des éléments concrets prouvant ses allégations. Bien évidemment DSK en ce moment ne peut guère l'attaquer en diffamation. Par contre le SOFITEL pourrait le faire, mais à ma connaissance s'est contenté d'un démenti. Je passe également sur celle de Marine Le Pen qui évidemment tente de faire de la situation une opportunité politicienne, donc rien que du convenu. A droite, on reste relativement discret, sur ordre semble-t-il peut-être aussi pour marquer que si on doit chercher ceux qui respectent la présomption d'innocence quelles que soient les circonstances, c'est de leur côté qu'il faut chercher. Car bien évidemment à gauche, on s'est vautré dans cette nécessaire présomption en oubliant quelques affaires récentes où elle n'avait guère été respectée. Woerth pourrait vous en parler mieux que moi. Mais à gauche surtout ce qui a dominé, c'est d'abord l'incrédulité. "Ça ne lui ressemble pas" a-t-on pu entendre maintes fois, notamment chez des strauss-kahniens d'autant plus dépités que leurs postes potentiels de ministres semblaient s'envoler à tire-d'aile. Je ne sais pas si ça lui ressemble ou pas, mais disons tout de même que les aventures de DSK n'en font pas vraiment un pratiquant de l'ascèse du sexe. Mais à force de répéter que ça ne lui ressemble pas, on pourrait finir par croire à la pureté virginale de l'intéressé, pourquoi pas ? Bien évidemment cette incrédulité va de paire avec une théorie du complot ou encore avec la théorie d'une provocation à laquelle un chaud lapin comme DSK n'aurait pas pu résister. J'ai déjà dit ce que je pensais de la théorie du complot. Pour le reste tout est encore ouvert.
Je souhaiterais néanmoins évoquer quelques réactions assez particulières. Je n'insisterai pas sur celle de Badinter qu'on aura connu plus nuancé dans ses propos, mais m'attarderai sur celles de l'inénarrable Jack Lang et de Jean-François Kahn, particulièrement abjectes. Pour Lang, il n'y a pas mort d'homme donc pas lieu d'emprisonner DSK. Voilà une conception assez particulière du crime de viol qui finalement ne serait pas si grave que ça. Il suffit sans doute de se laver après la chose et on n'en parle plus. JFK lui fait encore plus fort : il parle de troussage domestique. Nous voilà replongés quelques siècles en arrière quand existait encore le droit de cuissage du seigneur sur ses misérables sujettes, ou plus près à la fin du XIXème siècle avec "Le journal d'une femme de chambre" d'Octave Mirbeau (et ses reprises cinématographiques). La femme de chambre, objet sexuel ou plus vulgairement sac à foutre, n'a dans le cadre d'un troussage domestique sans doute pas à se plaindre; au contraire, elle devrait être honorée d'avoir retenu l'attention d'un puissant de ce monde et d'avoir provoqué son érection. Dans les propos de Lang ou de Kahn on retrouve bien évidemment les propos d'une gauche humaniste, certes, mais qui conserve le sens des hiérarchies. On n'aura pu d'ailleurs remarquer qu'il aura fallu un certain délai et certaines indignations, comme celle de Gisèle Halimi, pour qu'enfin on ait une pensée pour la supposée victime. Certains comme Ayraut ayant fait cette démarche en mettant les deux protagonistes sur le même plan, faisant passer DSK du statut de présumé coupable ou innocent à celui de potentielle victime, ce qui devrait logiquement en faisant encore un effort faire passer la présumée victime à celui de présumée coupable. Ce sont donc deux accusés ou deux victimes, au choix, qui seront présentes au tribunal en septembre prochain, ou mieux une victime et un(e) accusé(e) sans qu'on sache qui est qui. Il y a quand même des fois où on préférerait le silence, n'est-ce pas?
 
Venons-en maintenant à ce que j'appellerai la forme, élément sans doute déterminant dans l'émotion suscitée par l'affaire en général et ces réactions stupéfiantes que j'ai pu lire ici et là.
Les images diffusées lundi dernier d'un DSK menotté tout d'abord et ensuite d'un DSK mal sapé, mal rasé, à la mine verdâtre, ont naturellement choqué les esprits. Je dis naturellement parce qu'en France les mêmes images sont interdites. Ce qui ne signifie pas que dans la réalité les prévenus bénéficient de plus d'égards et se présentent devant le juge d'instruction vêtus de leur plus beau smoking, sourire ou cigare aux lèvres. Donc les conclusions visant à nous faire croire que DSK serait l'objet d'un acharnement sont évidemment fausses. DSK bénéficie du même traitement que n'importe quel malfrat aux Etats-Unis, et dans un pays (le nôtre) où on ne cesse de réclamer l'égalité pour tous, on devrait trouver cela sinon réjouissant, au moins exemplaire. Quant aux images, elles sont autorisées aux Etats-Unis comme elles l'étaient auparavant en France jusqu'à cette loi à l'initiative de Guigou. Mais d'une part, plutôt que de reprocher aux médias américains de faire leur boulot, même s'il peut apparaitre glauque à certains, on pourrait reprocher aux nôtres d'avoir complaisamment relayé ces même images, et en boucle. Et d'autre part nul n'est forcé de regarder ces images s'il les trouve choquantes. Or, paradoxalement, je suis persuadé que lors de la diffusion des images en cause, l'audimat a explosé.
Ce qui m'inquiète dans ces réactions, c'est l'impression que j'ai que beaucoup considéreraient comme normal qu'un homme comme DSK bénéficie d'un traitement, pas forcément de faveur (bien que…), mais nécessairement discret, ceci en raison de sa position sociale. Et j'imagine facilement aussi que finalement on reste incrédule, non plus devant l'accusation de viol, mais devant le fait qu'on ose trainer devant les tribunaux un homme aussi important pour ce genre de crime. Il est vrai que chez nous les crimes d'argent et même le fait d'en avoir beaucoup sauf si on est de gauche paraissent beaucoup plus graves que les crimes sexuels qu'on a tendance à prendre encore pour de la gaudriole. C'est clair qu'aux Etats-Unis ce n'et pas la même chose, même si je considère que parfois ils poussent le bouchon un peu loin. Mais à ceux qui penseraient encore que DSK a été victime d'un acharnement, je demanderai simplement de se souvenir de l'humiliation publique qu'a pu subir Clinton pour une pipe largement consentie.
J'ai tendance à voir dans ces réactions françaises un révélateur d'une société qui ne s'est pas encore affranchie de certains réflexes féodaux et où il semble normal que les puissants bénéficient encore de certains privilèges pouvant éventuellement les mettre par exemple à l'abri de poursuites en cas de troussage domestique comme dirait l'autre. N'oublions pas également cet antiaméricanisme primaire prêt à ressurgir au moindre prétexte et qui n'est sans doute pas sans altérer les capacités de réflexion de nos concitoyens quand l'action se passe aux Etats-Unis. Il serait d'ailleurs dommage de persévérer dans cette voie et générer des querelles stériles mais aux conséquences réelles d'autant plus que d'après les informations que mon honorable correspondant m'a communiquées, cette affaire est loin de déchainer les passions outre-Atlantique où elle est plutôt considérée comme un banal fait divers.

vendredi 13 mai 2011

La faute à Pompidou



La date des prochaines élections présidentielles vient d'être dévoilée. Nous serons amenés donc à choisir notre futur président ou future présidente, le pire ne peut nous être épargné (nota : je ne dis pas ça par misogynie, mais à cause des candidates potentielles sérieuses  au poste) les 22 avril et 6 mai 2012.
Bien évidemment ces dates ne pouvaient qu'apporter une nouvelle polémique. Elles tombent, d'une part, en pleines vacances scolaires, et d'autre part, le 6 mai, avant-veille du 8 comme vous l'avez peut-être remarqué, se situe au beau milieu d'un pont qui sera bien apprécié après les vaches maigres de ces deux dernières années. Donc tout naturellement des critiques commencent à s'élever. L'abstention serait favorisée par ces dates, et les zones de vacances lors du second tour seraient plus favorables à la gauche selon certains commentateurs. Ce qui est à moitié vrai et donc à moitié faux également car si Bordeaux et Créteil on donné leurs faveurs à Royal en 2007, ce fut l'inverse du côté de Versailles et de Paris.
De toute façon par principe, il fallait contester ces dates. En décembre, janvier et février, ça aurait pu être les risques de verglas mais aussi les sacro-saintes vacances scolaires, en mars les giboulées et peut-être les vacances scolaires, en juin le beau temps, la préparation des grandes vacances scolaires et les législatives qui auraient suivi en juillet, en octobre le ramadan peut-être et les vacances scolaires de la Toussaint, en novembre le pont du 11 et la fin des vacances scolaires de la Toussaint… Rien ne peut convenir puisque c'est du temps personnel, du temps de loisirs qui est hypothéqué… et même pas payé. Mais c'est vrai que la configuration choisie hypothéquant vacances scolaires et pont est particulièrement odieuse.
On sait évidemment que désormais les vacances scolaires sont également celles des parents d'élèves et même des adultes n'ayant pas ou plus charge d'enfants, car c'est tellement plus drôle de partir à des dates institutionnalisées et tous ensemble. Ceci dit ça fait quand même pas mal de semaines dans l'année tout ça que même les RTT ont du mal à justifier. De plus je me demande comment il se fait que tant de monde puisse encore partir en vacances alors qu'il parait que les gens sont de plus en plus pauvres. D'ailleurs j'ai pensé spontanément à l'annonce des dates de l'élection que Sarkozy voulait se saborder n'ayant plus que la masse des pauvres pour voter contre lui à ces dates, les quelques riches restant préférant se faire dorer la pilule loin de l'hexagone.

En fait les choses sont plus simples que ça. Il n'y a pas vraiment de perversité dans le choix de ces dates. Tout cela de la faute à Pompidou.
Petit rappel historique. De Gaulle fut élu et réélu un moins de décembre. On n'aurait pu penser que de façon nominale, les années restant des années, même quand on les groupe par paquets de sept ou de cinq, que l'élection présidentielle se déroulerait au moins le temps que durerait la 5ème entre fin novembre et début décembre. C'était sans compter sur les facéties du Général  qui démissionne le 28 avril 1969 et provoque donc une élection au début du mois de juin. Pas de bol, Pompidou meurt le 2 avril 1974, et provoque bien malgré lui une élection en mai de la même année (5-19) avec une prise de fonction le 21 mai. Mitterrand prendra ses fonctions le 21 mai 1981 tandis que Chirac entrera à l'Elysée le 17 mai 1995 et laissera son fauteuil à Sarkozy le 16 mai 2007. Etant donné que la constitution dans son article 7 précise que l'élection présidentielle doit impérativement avoir lieu vingt jours au moins et trente-cinq jours au plus avant l'expiration des pouvoirs du président, qu'il doit y avoir précisément quatorze jours entre les deux tours, et que le premier mandat de Sarkozy (juste un pronostic très hasardeux) s'achève donc le 16 mai au plus tard, le choix des dates (n'y voyez aucune contrepèterie) possibles était très limité (15 et 29 avril ou 22 avril et 6 mai) et tombait dans tous les cas sur des vacances dans certaines zones et sur un pont.
Tout ceci pour vous expliquer pourquoi un prêtre, sans doute soucieux de ses vacances scolaires et des ponts de mai, a pu souhaiter la mort de Sarkozy au moment de l'affaire des Roms. Juste pour rattraper la faute de Pompidou.

lundi 9 mai 2011

Questions pour un candidat


A moins d'une année de l'échéance présidentielle, nous avons environ 25 candidats potentiels. Bien sûr après quelques primaires et quelques abandons âprement négociés, il en restera certainement entre 12 et 15 (rappel : 12 en 2007) à se présenter au premier tour. Dans le tas, il y aura quelques "bleu-bites", des nouveaux sans doute pas encore préparés à cette épreuve. Ce qui suit s'adresse dont prioritairement à eux. Qu'ils me lisent et ils sauront à quelles questions ils devront répondre sans hésiter sous peine de passer pour des charlots qu'ils sont néanmoins pour certains d'entre eux. Je pense notamment à ma bête noire préférée dont je tairai le nom par charité.
L'inventaire qui suit n'est naturellement pas exhaustif et pourra être complété utilement par les quelques lecteurs qui passeraient par là. Evidemment je ne réponds pas aux questions moi-même. Faut quand même pas pousser! Cependant je vous donnerai, le plus souvent entre parenthèses quelques indications pour ne pas commettre l'erreur fatale.

On peut commencer par des questions-bateau qui piègent néanmoins toujours quelques candidats. Par exemple :
  • De combien de porte-avions dispose la marine nationale ? (m minuscule pour ne pas confondre avec une candidate) 
  • Plus dur : combien de SNLE dans cette même marine ?
  • Encore plus dur : quel est l'âge du capitaine ?
Puisque nous sommes dans le domaine des armées, bien évidemment celle-ci :
  • Comptez-vous effectuer un retrait rapide de nos troupes en Afghanistan, si vous êtes élu(e) ? (Ici on répond toujours OUI)
    Et peut-être celle-là :
  • Comptez-vous alléger notre dispositif militaire en Afrique, si… ? (Bien sûr on répond également par l'affirmative)
Mais comme les journalistes à part quelques uns (mais qui n'interviennent jamais lors d'élections) n'y connaissent pas grand-chose, sinon rien, dans la chose militaire, ça devrait d'arrêter là. On va donc passer à l'Europe. Bien évidemment la majeure partie des questions qui vous seront posées seront complètement idiotes. Vous devrez donc faire semblant d'oublier que nous sommes pieds et mains liés par un certain nombre de textes et faire comme si vous aurez une influence notable sur l'évolution de l'Union.
  • Comment envisagez-vous l'évolution de l'UE ? (Ne répondez pas toujours vers le pire et toujours vers plus d'impuissance)
  • Faut-il sortir de l'euro ?
  • Comment voyez-vous le fonctionnement de la BCE? (Bien évidemment vous ne voyez rien, car tout est figé, mais faites comme si sous votre présidence la BCE allait se mettre réellement au service de l'économie européenne)
  • Faut-il sortir de Schengen ? (Question que vous retrouverez quand on parlera des immigrés clandestins)
  • Faut-il élargir l'UE à d'autres pays et notamment la Turquie ? (Sur la Turquie laissez ouvertes toutes les possibilités surtout si vous êtes foncièrement contre de façon à ne pas être taxé d'islamophobe)
  • Plus anecdotique, mais néanmoins essentiel : doit-on supprimer ces navettes du parlement européen qui coutent la peau du c.. (navettes et parlement) entre Bruxelles et Strasbourg ? (Evidemment on se bat pour Strasbourg. Petite astuce : peut-on laisser le parlement dans la capitale d'un pays qui va imploser ?)
  • Etes-vous favorables à une politique étrangère européenne ? (Ne répondez pas que vu la cruche qu'on a mis au poste de responsable de la politique étrangère de l'Europe, il est clair que même si vous le voulez, les autres ne le veulent pas et que donc rien ne changera)
  • Etes-vous favorable à une défense européenne commune ? (Question évidemment sans objet car pas de politique étrangère commune, mais ça ne coûte rien de répondre par l'affirmative, d'autres l'ont fait avant vous)
  • Etes-vous pour une harmonisation fiscale, sociale, …? (Quoique vous répondiez, n'oubliez pas que vous devez affirmer qu'il n'est surtout pas question de pénaliser nos agriculteurs, nos éleveurs, nos pêcheurs, nos routiers, …, enfin tous ces quelques pourcents de voix qui pourront faire la différence le jour du vote)
Il y aura peut-être d'autres questions sur l'Europe, mais comme c'est un sujet facile sur lequel vous pouvez réponde de manière vague en faisant preuve d'un volontarisme nécessairement vain, ne vous privez pas d'occuper ce terrain. Mais comme les Français sont finalement peu sensibilisés sur cette UE à laquelle ils ne comprennent pas grand-chose, et pour cause, ce sera sur les questions relatives au pays, mais encore davantage aux différentes catégories qui composent la population de ce pays, que vous serez attendu. Vous-même, attendez-vous à tout et à n'importe quoi, mais surtout ne restez pas sec, car dans la foulée ce sont des milliers de voix qui s'envolent. Une parenthèse à ce propos : c'est ce qu'a fort bien compris la candidate Royal (R majuscule, car royale elle ne l'est assurément pas –désolé, c'est trop facile) en se mettant souvent au niveau d'une assistante sociale ou une employée du planning familial. La présidentielle ce n'est plus, selon la formule consacrée, une rencontre d'un candidat avec les Français, mais une rencontre avec chaque Français. En tout cas sûrement pas avec la France.
 
Voilà donc une série de questions que je vais essayer de regrouper par grands thèmes et auxquelles il vous faudra impérativement répondre.
Tout d'abord, et même si finalement c'est ce qui intéresse sans doute le moins sauf quand il y a du scandale dans l'air (comme avec MAM), la politique étrangère.
  • Quelle politique étrangère vis-à-vis des Etats Unis ? (Evidemment derrière cette question vague se cache celle qui concerne l'alignement ou non avec les Etats-Unis. Question piège car si au moment de l'élection d'Obama vous envisagez un rapprochement, c'est bien vu. Ça l'est un peu moins actuellement. Et ça ne le serait pas si c'était encore Bush le président. Donc prenez la posture de l'allié vigilant)
  • Faut-il sortir des structures intégrées de l'OTAN ? (question difficile également mais vous pouvez prétendre que maintenant que c'est fait il serait quand même inconvenant de sortir trop rapidement de là, que ça ferait un peu brouillon. Donc vous serez vigilant et prêt à. Par ailleurs, si vous le savez, et ce n'est pas sûr, rappelez que nous sommes encore, contrairement à la Grande-Bretagne complètement indépendants quant à l'usage de l'arme nucléaire et que donc il resterait encore un pas à franchir, que vous ne franchirez pas, pour être totalement intégré dans l'OTAN)
  • Quelle attitude vis-à-vis du conflit israélo-palestinien ? (Ne bredouillez pas, soyez ferme! Affirmez le droit d'exister à l'Etat d'Israël tout en soutenant l'idée d'un Etat palestinien indépendant. En fait ne proposez rien d'original qui pourrait fâcher les uns ou les autres et restez sur ces principes on ne peut plus vagues, au moins en termes de modalités d'exécution)
  • Faut-il (ou fallait-il) soutenir les révolutions arabes ? (Question aussi délicate ou vous devrez maintenir l'équilibre entre le soutien et la non-ingérence. Bien évidemment vous soutenez tous les mouvements démocratiques dans le monde. Il faut d'ailleurs aider les pays à se développer pour garantir l'enracinement de la démocratie. Si vous parlez de l'intervention libyenne, camouflez-vous derrière l'ONU –sauf Sarkozy- et faites de même si on vous demande s'il faut intervenir en Syrie, c'est-à-dire, refilez les problèmes aux autres)
  • Faut-il sortir enfin de la Françafrique ? (Bien sûr)
Sorti de ces quelques questions on ne devrait pas trop vous ennuyer sur ce thème de la politique étrangère. Si vous suivez mes conseils et ne répondez donc à rien, ça devrait suffire.
Et donc maintenant, je vous livre en vrac, en essayant toutefois de respecter les pôles d'intérêts, toutes ces questions qui passionneront les Français et qui vous vaudront une victoire ou une défaite.

Economie/ dette :
  • Comment retrouver la croissance ? (Evidemment, comme les autres, vous ne savez pas trop parce que structurellement et mondialisation aidant, c'est foutu ou ça ne dépend pas de vous, ce que vous ne pouvez pas dire. Donc parlez de réindustrialisation –dur à faire avaler quand-même -, de mesures contraignantes pour ceux qui veulent délocaliser – même si vous n'avez aucun moyen de pression réel-, de pôles d'excellence que le monde nous envie – priez pour qu'on ne vous demande pas qui -, des PME que vous allez aider et qui porteront cette croissance – classique- …)
  • Comment résorber le déficit budgétaire ? (baratin classique : retour de la croissance dont rentrées fiscales importantes, économies de l'Etat sans pour autant toucher à la qualité du service public qui d'ailleurs va être même renforcée…)
Social :
  • Que comptez-vous faire pour les plus défavorisés?
  • Que comptez vous faire contre les plus riches ? (Voilà deux questions qui semblent complémentaires, même si ce n'est pas le cas, tant les gens sont persuadés que s'il y a des pauvres, c'est parce qu'il y a des riches, et réciproquement. Il ne vous appartient pas de démonter cette logique populaire, car on vous classerait tout de suite dans le camp des riches. Donc fustigez certains abus, montrez vous le champion des luttes contre les inégalités sociales sans quand même trop en faire, car si les riches n'expliquent pas forcément les pauvres, leur absence en garantit de supplémentaires)
  • Quel avenir pour la sécu ? (Mettez les différents acteurs devant leurs responsabilité, c'est-à-dire ne proposez rien)
Société (ou vivre ensemble), immigration, laïcité, sécurité: (c'est un peu le fourre-tout, mais d'aucuns prétendront que c'est intimement lié)
  • Quelle est votre position par rapport à l'immigration légale ? (Vous commencerez par rappeler les bienfaits de l'immigration, cette chance et ce besoin pour la France –il y a trop de personnes d'origine immigrée en France pour faire l'impasse. Ensuite, tenez évidemment compte des derniers sondages pour répondre – plus, mois, pareil)
  • Comment comptez-vous lutter contre l'immigration clandestine? (Ne fustigez pas les clandestins qui sont évidemment des malheureux qui n'avaient pas d'autres choix. Rappelez néanmoins certains principes sur lesquels vous resterez fermes sans négliger toutefois l'aspect humain ou humanitaire qui fera que certains seront, bien sûr, régularisés –même si à terme ce sera la majorité-. Bien entendu les reconductions se feront selon les principes les plus humains qui font l'honneur de la France, même si vous envisagez d'anesthésier ou de bâillonner ceux qu'on va charger dans les avions d'Air France pour qu'ils cessent d'importuner les autres voyageurs. Après tout votre humanité se porte peut-être vers ces derniers. S'il est dans vos intentions de régulariser tous les sans papiers, dites-le et perdez l'élection)
  • Etes-vous pour le vote des étrangers à certains scrutins? (Là vous éludez. Vous n'êtes pas foncièrement contre –donc pas complètement pour-, mais l'aval des Français est indispensable pour ce genre de réforme)
  • Peut-on remettre en cause le principe de laïcité face aux revendications de certaines religions ? (Question embarrassante. Bon, évidemment certaines des revendications sont légitimes. Mais vous êtes bien entendu attaché au principe de laïcité comme à votre femme ou votre mari –mauvais exemple?-. En conséquence de quoi vous êtes prêt ou pas à faire des concessions et par exemple à construire des mosquées avec des aides publiques)
  • Que comptez-vous faire pour améliorer la sécurité des Français? (Comme ni l'angélisme, ni le discours de fermeté n'ont fonctionné, vous avez les deux pieds et les deux mains dedans. Vous pouvez parler de construire de nouvelles prisons car il manque 20000 places actuellement, mais ça en plus des mosquées et accessoirement des logements sociaux ça commence à faire beaucoup. Et puis parler de prison ce n'est pas porteur. Vous ne devez pas dire non plus que la petite délinquance est désormais complètement ou presque impunie, car vous vous mettriez les juges à dos. Ne dites pas non plus que ce n'est pas une réalité mais juste une perception, sinon, c'est foutu pour vous. Donc démerdez-vous. C'est quand même bien vous qui voulez être président(e), non ?)
  • Comment maintenir la cohésion nationale alors que se réveillent de plus en plus des forces centrifuges ? (Vous êtes bien entendu contre le communautarisme, même si par ailleurs vous pouvez être favorable à la diversité. Les gens ne comprennent pas tout donc ne vous privez pas de certaines incohérences. N'oubliez pas que si vous prônez l'assimilation, vous êtes un néo-réac donc quasiment un facho)
Ecologie :
  • Comment comptez-vous promouvoir une politique écologique ? (ici pas question de dire que ce n'est pas votre souci. Il faut être écolo dans l'âme. Si vous êtes de gauche, n'oubliez pas de dire que l'écologie est une valeur de gauche, même si historiquement c'est complètement faux, mais comme les pays communistes ou anciennement communistes ne sont pas un lieu privilégié de tourisme, les gens ne le savent pas forcément. Si vous êtes de droite dites que l'écologie n'est ni de gauche ni de droite, mais un devoir pour les générations futures. Pour le reste un peu de blabla –évitez le réchauffement climatique, ça ne passe plus- sur les énergies propres et renouvelables, et roule. Si vous êtes écolo favorable à la décroissance, méfiez-vous des questions sur l'économie et la croissance, parce que vous allez atteindre vite vos limites déjà bien étriquées)
  • Quel avenir pour l'énergie nucléaire ? (Question d'autant plus facile à éluder que vous ne serez même pas concerné pendant votre éventuel quinquennat. Donc conformez-vous à l'air du temps)

 
Bon, je crois que je vais m'arrêter là, même si je suis conscient que bien d'autres questions pourraient être posées. Mais après tout ce travail est gratuit et il ne faut quand même pas trop en demander. Mais rappelez–vous ces quelques principes :
  • Vous n'êtes surtout pas obligé de répondre aux questions qui vous sont posées.
  • Il ne faut pas oublier de flatter tout le monde, même ceux que vous exécrez.
  • Si vous pouvez passer le ballon à d'autres ne vous privez pas. Si c'est aux instances internationales, on dira que vous êtes respectueux de l'ordre du même nom. Si c'est aux Français, auxquels vous projetez de demander leur avenir, on dira que vous êtes attaché à la démocratie. Si c'est à l'avenir, c'est encore mieux.
  • Et n'oubliez pas de remercier aimablement celui ou celle qui vous aura posé ces questions essentielles qui vous auront permis de faire connaitre votre position… même si vous n'avez fait que brasser du vent.

samedi 7 mai 2011

Foot, quotas et société


 
Le scandale des quotas dans le foot qui agite actuellement la société française pourrait être traité par le mépris. Ou même devrait. Des propos assez approximatifs quant au sens réel à leur attribuer tenus lors d'une réunion privée, dévoilés par une taupe et repris par un média de caniveau qui a bien compris que pour conserver un équilibre financier bien précaire et acquis depuis très peu de temps, il devait livrer de la (non) information puante parce que c'est ce qui fait vendre, ne mériteraient sans doute pas d'être frappés d'une telle indignité. On en aurait par contre davantage attendu lorsque qu'Anne Lauvergeon déclara que chez AREVA, le mâle blanc n'avait plus aucune chance d'être embauché, ce que la justice n'a pas d'ailleurs estime discriminatoire, ou quand furent établis des quotas à Science-Po pour les jeunes des quartiers défavorisés. Nous ne parlerons pas non plus des quotas pour l'emploi des handicapés lesquels, d'après ce que j'ai pu lire, ne sont pas assez nombreux pour que la loi puisse être appliquée, ni de cette fameuse parité devenue institutionnelle dans certains domaines, sur les listes électorales en particulier sans qu'on en voit des conséquences probantes sur la féminisation des assemblées.
 
A propos de "l'égalité hommes-femmes" je vais d'ailleurs ouvrir une parenthèse en évoquant ce qui s'est passé dans l'armée. Il fut une époque pas si lointaine parce que je l'ai connue où les femmes étaient interdites dans les écoles des officiers des armes. Ensuite l'accès leur fut autorisé mais avec un nombre de places contingentées et avec interdiction ensuite de servir dans les armes dites de mêlée. Ces dernières restrictions sautèrent quelques années plus tard car jugées discriminatoire. Et que se passa-t-il ? Rien. Les femmes n'affluèrent pas dans les écoles d'officiers malgré des épreuves sportives adaptées, ce qui n'était peut-être pas très égalitaire pour le coup, et continuèrent à opter dans leur grande majorité pour les armes de soutien, donc les moins exposées. Ce qui signifie clairement qu'on ne modifie pas une culture juste par des lois. Et que se plaindre d'un manque de représentativité dans certains domaines de certaines catégories ne signifie pas qu'il existe forcément de la discrimination.
 
Revenons au foot et à cette intention supposée d'établir des quotas, ou de blanchir une équipe de France qui tire de plus en plus vers le sombre. De fait en lisant le verbatim on constate deux choses.
La première est que des choix techniques semblent devoir infléchir la morphologie des joueurs sélectionnés pour jouer en équipe de France. C'est peut-être idiot de corréler des morphotypes avec des couleurs de peau, mais à la limite n'étant pas spécialiste en anthropologie physique je ne m'avancerai pas trop là-dessus. Je peux éventuellement constater que les meilleurs sprinters mondiaux sont noirs, que les noirs ne sont pas de grands amateurs de cyclisme sportif, mais j'aurais du mal à en tirer des conclusions définitives. Ce que n'ont peut-être pas fait les dirigeants de la FFF qui se sont fondés sur une vision empirique pour en tirer certaines conclusions. Maintenant je préfèrerais que ce soient des scientifiques qui leur indiquent leurs erreurs que des idéologues de l'antiracisme.
La seconde est qu'il existe une crainte, sans doute fondée sur certains cas concrets, que parmi les binationaux bénéficiant d'un programme de formation coûteux, un nombre significatifs optent pour le pays de leur seconde (ou première) nationalité, celui-ci n'étant pas la France, pour y exercer leurs talents. J'y vois là surtout un comportement de bon gestionnaire, soucieux de l'argent public. Quelle entreprise accepterait de former des gens pour qu'ils aillent ensuite travailler pour la concurrence ? Bien évidemment les binationaux visés étant essentiellement noirs ou arabes, ce souci gestionnaire devient immédiatement l'expression d'une pensée raciste.
Le résultat est qu'on risque de perdre un sélectionneur qui, semble-t-il, réussissait à ramener l'équipe de France vers la victoire et aussi une certaine dignité. Je dis "semble" parce que je me suis détourné de ce sport depuis pas mal d'années. Certains corréleront sans doute cette attitude avec "l'assombrissement" de l'équipe de France. Grand bien leur fasse. Quant à moi je n'ai pas encore fait la corrélation entre cet assombrissement et les comportements douteux, c'est un euphémisme, de certains membres de cette équipe.
 
Mais cette histoire est surtout intéressante parce qu'on y trouve un condensé de beaucoup des problèmes de notre société.
 
Je passerai très vite sur un sport national qui dès qu'il sera homologué en tant que sport olympique nous rapportera au moins les trois médailles d'un seul coup. Je veux parler de l'antiracisme qui devient, hélas, de plus en plus pesant au point d'ailleurs que se développe à vitesse exponentielle la catégorie des anti-antiracistes. Pour les mal comprenant, anti-antiraciste ne signifie pas raciste. Il est de fait qu'il ne se passe pas une semaine sans que soient dénoncés les dérapages, terme très à la mode mais hautement significatif puisqu'il suggère l'existence d'un axe très bien balisé, de l'un ou de l'autre de nos divers responsables politiques ou autres. Au point que certains termes devront maintenant être évités, comme croisade par exemple, ou même interdits, comme assimilation remplacé avantageusement par intégration sans que pour autant on donne à ce dernier terme un autre sens que celui d'immersion, au mieux. Multiculturalisme est encore assez mal vu comme terme dans la mesure où reste encore quelque peu vivace ce vieux fond idéologique qui voulait que très vite on ne puisse pas distinguer les Français récents des plus anciens ; on lui préfère donc celui de diversité qui fait plus chic, plus ouvert au monde, plus porteur de potentialités, même si c'est la même chose que le multiculturalisme bien évidemment. Donc actuellement, quoique vous disiez, en public, en privé ou dans votre sommeil, sera décortiqué par la police de l'antiracisme largement subventionnée par vos impôts, même guère que par cela d'ailleurs, pour y déceler, ou plutôt dans l'espoir d'y déceler la moindre expression, le moindre mot indiquant que vous avez quitté le sentier de la bienpensance et de l'amour inconditionnel de l'autre surtout s'il est plus sombre que vous.
 
Le problème, pas tant de l'ascenseur social, que de la conception des moyens possibles de sortir de sa condition, apparait également dans cette polémique. Chez Calvi dont je peux regarder l'émission sur internet, j'écoutais l'autre jour un démographe qui disait que ce qu'on reprochait aux encore pour l'instant imaginaires quotas dans le foot, c'était d'empêcher les immigrés ou leur progéniture, forcément dans la précarité, de pouvoir profiter d'un des rares moyens de s'élever dans la société. Et de "rappeler" que de tout temps les immigrés n'avaient eu que peu de moyens de s'élever, qu'avant la guerre déjà, outre le syndicalisme, le sport était un de ces moyens. Au passage les mânes de Marie Curie, de Ionesco, ou plus près de nous Georges Charpak pourront apprécier. Sans parler bien entendu des nombreux autres qui non seulement se sont élevé dans leur société d'accueil et ont apporté quelque chose d'utile à ce monde. Mais sans doute que ce démographe confondait ascension sociale et pompe à fric.
Cependant au travers des propos de cet individu qui, par ailleurs, semblait très censé, on peut noter quelques petites choses. La plus évidente est que désormais, la réussite sociale se mesure à l'épaisseur du portefeuille. Triste conception que je ne partage pas. Loin de moi, malgré la modicité de mes revenus, et si j'en avais la possibilité, l'idée d'échanger le cerveau et le portefeuille d'un Ribery contre les miens. Pourtant si l'on suit les propos de l'individu, et qui doivent refléter l'opinion de pas mal de monde, notamment chez les jeunes, c'est ce genre d'individu qui serait un modèle de réussite. Beurk ! Par ailleurs il est désespérant de constater qu'une fraction notable de la jeunesse qui vit en France ne puisse concevoir d'autres moyens que certains sports pour s'élever dans la société. L'école est définitivement hors jeu. Alors certes elle l'est depuis les ravages du pédagogisme qui rejette l'apprentissage mais cette tendance est accentuée par le fait qu'on refuse de croire en elle. Cet ensemble fait que toute une partie d'une génération déjà est dans la plus complète impasse.
 
Et puis bien évidemment nous avons ce problème lié à l'idée-même de quotas. J'imagine que les dirigeants de la FFF n'ont pas vraiment dû penser transgresser des interdits en pensant à des quotas, puisque la société française depuis quelques années est traversée par cette notion. Ça se fait parfois de manière institutionnalisée, mais sans doute le plus souvent sous le coup d'une certaine pression que faute de mieux nous qualifieront de morale. De fait chaque organisation se sent obligée désormais, même quand ce n'est pas par la loi, de faire une place à toutes ces catégories qu'on a pensé discriminées, et notamment les femmes et les ce qu'on appelle les minorités visibles. Ceux qui utilisent ce terme de minorités d'ailleurs, soit n'en connaissent pas le sens sociologique qui n'est pas celui du moindre nombre, soient transforment de manière honteuse une donnée quantitative en qualitative. Nous ne sommes pas en effet en pays d'apartheid et en France tous les citoyens sont égaux devant la loi. Donc désormais plus question de recruter sans prendre au moins en compte quelques critères que nous nommerons morphologiques, de manière à peut-être pallier de supposées discriminations, mais surtout pour montrer qu'on va dans "le sens de l'histoire". C'est d'ailleurs pour cela, à titre d'exemple, qu'une récente enquête sur le CV anonyme (voir un précédent billet) montrait qu'à incompétence égale, les recruteurs préféraient les membres de minorités visibles que le CV classique leur permettait encore d'identifier.
En 2006, le futur président nous avançait le concept de discrimination positive qui s'il n'a pas trouvé à véritablement parler de traduction dans la loi dans la mesure où il est inconstitutionnel, est devenu au mois une ébauche de réalité. Egalement, même si la promotion de la diversité n'a pas trouvé sa place dans la constitution, grâce en soit rendue à la commission présidée par Simone Veil, force est de constater que cette notion nous pourrit la vie et permet de faire vivre quelques charlatans comme le sieur Lozès, président du CRAN et accessoirement candidat déclaré à la prochaine présidentielle. Au passage qui peut être assez idiot pour vouloir dégager une majorité en voulant soutenir les minorités ?
De fait, à cause de ces différentes notions promues par ceux-là même qui devraient être les garants de l'unité nationale, on ne peut que constater que l'identité française part en quenouille, remplacée par l'appartenance à divers groupes : on est d'abord noir, arabe, musulman, juif, femme, homosexuel,…, avant d'être français. Vous noterez qu'à dessein je n'ai pas dit ni blanc, ni homme, ni chrétien, car, selon Lauvergeon et les bienpensants, tout cela représente éminemment l'identité française qui sent le moisi. Se réclamer d'une identité française vous assimile en effet très vite à une espèce sans doute fascisante, en tout cas à quelque chose dont la vocation à terme est de disparaitre au profit d'une merveilleuse diversité.
Au nom de tout cela, Laurent Blanc, le bien nommé, se doit de démissionner après avoir fait son mea culpa bien évidemment. Et si les joueurs de l'équipe de France continuent à ne pas chanter la Marseillaise ou à se gratter les couilles pendant qu'on en joue l'air, ce sera signe d'un grand progrès vers un monde meilleur.

 

 

mercredi 4 mai 2011

De Ben Ali à Ben Laden, l'information défile... dans le vide




Les premiers mois de cette année n'auront pas été avares en événements divers et variés dont aucun n'est à l'heure actuelle encore abouti mais qui pourtant ont tendance à s'effacer dès qu'un autre surgit. Usbek exprime ça de façon remarquable sur son blog.
Résumons, et peut-être même pas dans l'ordre chronologique car ça commence à s'embouteiller au portillon de ma mémoire : nous avons eu la révolution tunisienne, puis l'égyptienne. Ensuite ce furent les événements libyens, avec en simultané, je crois me rappeler, le tsunami japonais et les problèmes de la centrale nucléaire de Fukushima eux-mêmes quelques peu effacés par l'intervention d'une coalition puis de l'Otan ne Libye. Et puis il y a eu les émeutes en Syrie et leur répression violente. De ça on parlait encore il y a quelques jours à peine, même si la mort d'un des fils de Khadafi a quelque peu effacé l'événement. Et pour finir, le dernier événement, celui qui nous fait oublier le sort de la ville de Misrata et les bombardements de Deraa, la mort d'Oussama Ben Laden. Bon ça fait quand même du monde tout ça et on en arriverait presque à comprendre que nos journalistes aient du mal à suivre et donc négligent de suivre les dossiers, de nous éclairer sur les suites de ses divers événements, et même de nous parler de choses peut-être plus importantes, comme, au hasard, le rapprochement récent du Hamas et de l'autorité palestinienne.

Donc je voudrais profiter d'un petit moment de calme (pour moi) pour faire un bilan.

La Tunisie tout d'abord. A vrai dire on ne sait pas trop ce qui s'y passe désormais que le dictateur Ben Ali et le clan Trabelsi ont mis les voiles. Heureusement que les migrants tunisiens, sans doute incapables de supporter tant de bonheur d'un seul coup, qui arrivent en nombre en Italie avant de gagner la France d'où on essaie de les refouler, sont là pour nous rappeler ce qui s'est passé en Tunisie. Ceci dit il faut quand même se méfier. Car si les médias ne nous rappellent pas opportunément qu'il y a eu une révolution là-bas visant, à ce qu'on nous a dit, à établir une démocratie, on finira par croire que le nombre de migrants est dû à une situation inverse.
 
L'Egypte maintenant. Le dictateur est parti. Mais ceux qui dirigeaient le pays avec lui sont restés et continuent à le diriger en attendant des élections qui devront consacrer la démocratie. Les problèmes cardiaques de Moubarak nous ont privé d'un procès commencé mais dont on ne sait pas ce qu'il devient, et peut-être, qui sait ?, d'une pendaison sur la fameuse place Tarir du dictateur déchu, ce qui aurait eu, reconnaissez le quand même, de la gueule et de quoi alimenter la une des journaux pendant au moins une semaine. Ce qui ne veut pas dire qu'il ne se passe rien en Egypte pendant cette période de transition. Et ce qui se passe n'est pas très rassurant. L'ouverture du terminal de Rafah, donc l'ouverture de la frontière sud de Gaza, et surtout l'accord sous l'égide de l'Egypte entre le Hamas et le Fatah, ne laissent rien présager de bon pour la stabilité de la région et interdisent toutes négociations de paix entre Israël et les Palestiniens.
 
Passons maintenant au Japon. Si on se réfère à l'absence d'informations en ce qui concerne la centrale nucléaire de Fukushima, on est en droit de penser que la situation est réglée. Ce qui serait tout de même assez étonnant alors que le niveau de l'incident a été porté au même niveau que celui de Tchernobyl. Pourtant, et alors que les conséquences d'un accident dont je ne pense pas qu'on ait encore résolu techniquement les causes, auront sans aucun doute un impact important au point de vue santé au moins dans les prochaines années, c'est le silence qui règne. Normal, les radiations agissent lentement, et donc rien de spectaculaire à nous montrer.
 
La Libye. Là, c'est quand même plus passionnant, parce qu'il y a des bombes, des morts, des attaques, des contre-attaques, des villes assiégées, prises et reprises. On a quand même du mal à savoir ce qui se passe réellement là-bas. Pourquoi un dictateur tellement détesté a encore tellement de soutiens. Qui sont ces gens du CNT dont certains dirigeants étaient de fidèles serviteurs du guide avant de changer de camp. Ce que cherchent les pays qui participent à l'opération. Enfin plein de questions auxquelles les médias ne semblent pas trouver réellement de réponses. Ce qui nous permet au moins de conjecturer. Mais on peut quand même être rassuré. Malgré un tassement passager du à de nouveaux événements plus spectaculaires, on reviendra sur la Libye qui reste à terrain propice aux émotions ou à l'odeur du sang quand on n'est pas assez près pour le renifler, au choix.
 
La Syrie. Il se passe des choses, des massacres bien organisés et donc de l'hémoglobine qui coule à souhait, mais là un problème majeur quand même. Pas de journalistes sur place car interdits et donc pas de photos choc à nous présenter. C'est sans doute, avec l'Egypte, le pays sur lequel on devrait concentrer toute notre attention car de l'issue des événements dépend largement l'avenir de la région étant donné au moins les imbrications qu'à ce pays avec les mouvements terroristes et l'Iran qui les soutient matériellement. Mais ça on verra plus tard... quand on aura les photos.
 
Tiens j'allais oublier ce micro-événement qui aurait plu nous tenir en haleine quelques jours : l'attentat de Marrakech, vite oublié comme les autres au profit du scoop du mois qui sera la liquidation de Ben Laden, après une traque de presque 10 ans.
A vrai dire, je ne considère pas cet événement d'une importance capitale dans la mesure où je ne pense pas qu'il aura un impact positif très important dans la lutte contre le terrorisme. Je lui reconnais néanmoins une valeur symbolique forte et ne m'étonne pas des mouvements de liesse aux Etats-Unis qui ont suivi l'annonce de la disparition de cette ordure.
Reste que alors que les crabes et les poissons n'ont peut-être pas encore réussi à entamer la housse qui contient le corps de l'individu, que les questions essentielles, celles qui semblent être en mesure de retenir l'attention des consommateurs de fausse information, ou d'information d'importance secondaire, celles qu'on préfère, semblent être les suivantes : le rite musulman-il été respecté ? A-t-on espoir de voir la photo de la troche explosée du maitre es terrorisme, d'autant plus qu'il parait qu'elle est bien dégueulasse? Questions essentielles, vous en conviendrez.
 
Avant d'en finir et afin de vous montrer mon vrai visage d'impie blasphémateur, je m'arrête une seconde sur l'inhumation de Ben Laden. On est d'accord pour admettre que cette inhumation n'est pas très orthodoxe (musulmane orthodoxe s'entend). Mais qu'est-ce que ça peut faire ? Après tout on n'en demandait pas tant aux Américains. On ne leur demandait pas de certifier hallal l'effacement physique de Ben Laden. Ça a peut-être de l'importance pour quelques salauds de son espèce, mais pour moi et d'autres j'espère, c'est vraiment un détail. Et même je dirais, si cette manière de faire disparaitre le corps laisse à penser à la corporation des terroristes que l'entrée du paradis d'Allah avec sa brochette (future) de vierges est interdite à Ben Laden, tant mieux. De mon côté, j'aurais été partisan d'une inhumation filmée, un bel enterrement dans un endroit nécessairement secret, et les zones désertiques ne manquent pas, de l'individu avec par exemple une tête de cochon entre les jambes, juste histoire de montrer à ceux qui ne craignent pas de mourir que le reste de l'éternité risque quand même d'être pénible quand on choisit d'être terroriste.