On trouvera dans le Point un
excellent article, comme souvent, de François Kersaudy intitulé "L'impuissance
sous l'omnipotence" qui décrit de façon magistrale comment après avoir
été pervertie la Constitution de la Vème République, léguée parle Général de
Gaulle, permet actuellement aux plus nuls, mais peut-être le singulier
suffirait-il si on s'attache à ce qui se passe au présent, de ne pas exercer le
pouvoir tout en en ayant les attributs.
L'article étant assez long, j'en
résumerai les points essentiels, avant de tenter de le compléter par une
réflexion déprimante pour l'avenir.
Donc de Gaulle, ayant foi dans la
grandeur de la France, mais se méfiant de l'inconsistance des Français, a doté
notre pays d'outils constitutionnels permettant un exercice du pouvoir faisant
abstraction de cet inconvénient. Mais les modifications apportées à la
Constitution par ses successeurs, et notamment la quinquennat suivi des
législatives, associées à une frénésie électorale, ont permis aux corporatismes
de reprendre le dessus, obligeant les plus faibles, les plus mauvais en
définitive eu égard à ce qu'on attend d'un président, plus soucieux de leur
réélection que du destin de leur pays, à se transformer en suivistes - "je
suis leur chef, il faut bien que je les suive" selon l'expression employée
par Kersaudy- les forçant à un exercice
de contorsionnistes dès lors que ses influences contradictoires et importantes
s'opposent. Là encore je ne vois pas pourquoi j'emploie le pluriel tandis que
ces caractéristiques concernent principalement celui qui occupe actuellement
l'Elysée quand il ne joue pas les ados enamourés sur son scooter italien.
Il faut dire aussi que nos
présidents, depuis une trentaine d'année, se sont dessaisis allégrement de
leurs prérogatives, en fait d'une partie notable de leur pouvoir au profit
d'une Europe omnipotente dans les questions économiques mais pas seulement. On
citera simplement la renonciation initiée par Maastricht à la politique
monétaire, un des leviers essentiels pour mener une politique économique. Mais
dans un autre domaine, touchant à la sécurité et l'immigration, on pourra aussi
citer l'abandon du contrôle des frontières à cette même Europe.
Comme évoqué plus haut ces
abandons de pouvoir qui ont singulièrement réduit les pouvoirs réels de nos
présidents peuvent être amplifiés par, selon les individus en charge et là on a
un exemple assez extraordinaire, un idéal-type, un prototype, par la lâcheté. Une
lâcheté qui ne permet plus d'avoir une politique énergétique cohérente à cause
de quelques Verts excités. Une lâcheté qui parce que celui qui détient le
pouvoir ne peut arbitrer entre une politique (affichage peut-être) volontariste
de lutte contre la délinquance et une politique judiciaire compassionnelle
envers les truands que certains juges politisés amplifient à souhait, ne permet
pas d'avoir une politique de sécurité digne de ce nom. Une lâcheté qui parce ce
que certains lobbies défenseurs des pratiques sexuelles marginales ont noyauté
les ministères qui leurs convenaient pour mener leur lutte militante, ne permet
plus de savoir quelle est la vocation de l'école : instruire les enfants ou
sous prétexte d'éducation, modifier les fondements de la société. Une lâcheté
qui face à la juste colère des Français attachés à leur pays, à son passé, sa culture,
son mode de vie tandis qu'on leur dévoile des rapports honteux sur
l'intégration, fait accoucher d'une souris quelques semaines plus tard quand il
s'agit de définir la politique d'intégration de la France. On pourrait parler
de l'abandon de la loi sur la famille mais qu'on va néanmoins tenter de faire
passer par petits bouts, de l'affaire Léonarda où un président tiraillé entre
un ministre de l'intérieur intransigeant et les collégiens en colère et sa
compagne de l'époque, s'invite à la table des Français par le biais de la télévision
pour jouer les Salomon, accepter la fille mais pas la famille.
Bon, on se rend bien compte qu'on
n'est pas gouverné, que le pouvoir est vacant même si, hélas, quelqu'un est
assis dans le fauteuil et compte bien se servir de sa lâcheté, de son art de la
contorsion pour ne pas fâcher trop d'électeurs afin d'avoir une petite chance de
faire 5 ans de rab.
Et c'est là qu'on peut voir le
gouffre qui s'est creusé entre deux formes de présidence, entre deux types de
président. Quel rapport entre un de Gaulle qui par deux fois démissionna alors
qu'il sentait qu'il ne pouvait pas œuvrer pour le bien de la France et un
Hollande qui ne peut guère et ne veut surtout pas gouverner mais veut par
contre s'accrocher tel le mollusque à son rocher à son fauteuil présidentiel?
Voilà donc résumés les propos de
Kersaudy auxquels j'adhère complètement. Mais hélas ces propos n'augurent rien
de bon pour notre pays, car si évidemment la personnalité de notre président
n'est guère adaptée, enfin pas du tout, à l'exercice du pouvoir suprême en France,
il est à craindre, parce que les institutions sont ce qu'elles sont devenues,
parce qu'il est fort improbable que soient contestées avec succès (quoique!)
les prérogatives abandonnées à l'Europe, parce que les lobbies continuent à
prospérer grassement grâce à nos impôts et à contaminer les lieux de pouvoir ,
il est donc à craindre que d'autres nullités prendront la suite. Je vais tenter
d'expliquer pourquoi.
Tout d'abord, je pense que le
personnel politique devient de plus en plus médiocre. Ceci est sans doute la
conséquence de la perte de consistance du pouvoir qui incite les meilleurs à se
détourner de ce qui est devenu un métier sans grande consistance davantage
qu'une vocation pour changer les choses, ceci quelle que soit la perspective dans
laquelle on s'inscrit. Gauche ou droite n'a aucune pertinence dans cette
analyse. D'autant plus d'ailleurs qu'on a de plus en plus de mal, et c'est un
signe, à distinguer ce qui les sépare fondamentalement tant leurs politiques effectives
ont de points communs. La soumission à Bruxelles en est sans doute
l'explication ainsi que cette attention à se conformer aux sondages exprimant
l'état de l'opinion publique sur certains sujets (réélection oblige).
Les conséquences de cette
médiocratisation de la classe politique qui devient de plus en plus visible sont
le rejet exprimé de la classe politique, les forts taux d'abstention aux
élections, et des choix électoraux qui se font davantage par rejet que par
adhésion.
Je pense ensuite que dans leur
fonctionnement les partis encouragent l'émergence des plus médiocres, des plus
nuls, pour occuper le poste de président avec l'usage qui semble devenir la
norme des primaires élargies aux sympathisants (supposés). Les socialistes nous
l'ont montré avec le choix de Hollande pour les représenter. Ce choix-là aura
une conséquence terrible : celle de laisser croire à n'importe qui qu'il peut y
arriver. Pourquoi pas Désir en 2022? Après tout il est le premier secrétaire du
PS. Et peut-être pas plus mauvais que Hollande. Ça sera notre Obama. Chouette!
Les primaires induisent
immanquablement une lutte au sein des partis politiques qui pendant ce temps-là
ne font pas leur travail qui est de dégager un programme cohérent, de
producteurs d'idées, laissant la place à la mise en exergue des différences
d'idées, à des luttes intestines, à des luttes de clans, à des calculs d'intérêts
particuliers pour occuper ensuite les meilleurs postes. Bref de la magouille politicienne
de bas-étage, sans intérêt pour la marche du pays. Le meilleur n'est plus celui
qui a les idées les plus tranchées, un vrai programme, une vision pour la France,
mais le plus consensuel, celui chez lequel tout le monde pourra trouver son
compte, et peut-être aussi celui qu'on aura le moins de mal à influencer. Ce
n'est donc plus celui qui s'imposait par sa personnalité, son audace, parfois
son esprit retors, mais l'opposé. C'est pour cela qu'au PS on est passé d'un Mitterrand
qui même si on ne l'aimait pas en imposait par sa personnalité, au falot qui
nous gouverne aujourd'hui. Et puis, et ce n'est pas le moindre des
inconvénients, nous en sommes témoins aujourd'hui, les primaires avec un second
tour, donc des ralliements pas exempts de calculs obligent d'une part le
vainqueur, d'où ce gouvernement pléthorique, et laissent entrer d'autre part dans
le sein du pouvoir tous les courants d'idées même inconciliables. D'où cette cacophonie
permanente au sein du gouvernement, d'où cette contorsion permanente d'un chef
de l'Etat tiraillé entre toutes ces contradictions. Voilà où mène ce genre de
pratique démocratique et citoyenne (comme on dit) des primaires alors que les
partis n'ont pas à fonctionner selon un mode démocratique, au moins si on veut
voir émerger un vrai leader en leur sein, c'est-à-dire ce lui qui s'impose et
qui impose.
La dégradation des institutions,
les abandons successifs de souveraineté à l'Europe ont donc très largement vidé
de sa substance le pouvoir présidentiel. L'affaiblissement du niveau de la
classe politique qui leur est corrélée, des pratiques politiciennes qui
auraient tendance à exclure les meilleurs au profit des plus consensuels, donc des plus mous, des plus influençables permettant
ainsi à toutes les influences de s'exercer au sein d'un pouvoir pusillanime,
nous ont conduits à une situation lamentable. Certes la personnalité de notre
président est un paramètre majeur dans ce constat, mais les conditions seront
exactement les mêmes à l'avenir sauf à changer radicalement de pratiques, pour
que les mêmes causes aient les mêmes effets.
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