"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

vendredi 16 décembre 2011

Statut pénal du président de la république : faut-il le modifier?


Quand pourra-t-on lire cette agence de l'AFP : "L'absence du président de la république française a été remarquée lors du dernier sommet européen pourtant appelé sommet de la dernière chance avant la sécession des britanniques et le retour de l'Allemagne au Deutschemark. Lui-même et son premier ministre se faisaient signifier alors que débutait ce sommet leurs mises en examen respectives pour abus de biens sociaux suivies pour tous les deux d'une mise en détention provisoire. Le Président du Sénat, troisième personnage de l'Etat, tenta bien de les remplacer, mais inconnu des huissiers ces derniers le refoulèrent sans ménagement."?
Ou celle-ci de Reuters : "Le président de la république française aurait été interpelé sur le balcon de l'Elysée alors qu'il raccompagnait le chancelier allemand. C'est menotté qu'il a rejoint les locaux de la brigade financière où il a été placé en garde à vue"?
Bientôt sans doute si on en croit la profession de foi de certains candidats à la présidentielle et la volonté exprimée par certains hommes politiques.
 
Effectivement suite au procès des emplois fictifs de la ville de Paris qui s'achève sur une condamnation sévère de l'ancien maire de cette ville, accessoirement ancien président de la république, on peut légitimement s'interroger sur le statut pénal de ce dernier. La justice aura mis en effet 12 ans pour en finir avec cette affaire dont 8 pendant lesquels Chirac était le premier personnage de l'Etat et, selon une interprétation du conseil constitutionnel ou du conseil d''Etat, je ne me souviens plus, non justiciable pour des faits commis avant la prise de ses fonctions tant que celles-ci étaient effectives.
Donc pour résumer le chef de l'Etat en exercice ne peut être inquiété par la justice en aucune manière pour des actes commis avant son élection, mais peut être rattrapé par la justice ensuite la prescription étant interrompue pendant son mandat. Il ne peut en aucun cas être inquiété par la justice pour des faits commis pendant son mandat sauf cas de haute trahison ou en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de son mandat. Dans ces cas-là ce n'est pas d'ailleurs la justice ordinaire qui s'occupe de son cas. Pour tenter de synthétiser une fois encore, l'élection à la présidence de l'Etat ne vaut pas amnistie ou prescription des faits antérieurs, tandis que pendant son mandat le président peut faire pas mal de choses au moins moralement condamnables sans être véritablement inquiété.
C'est donc ce statut exprimé dans le titre XI de la constitution que certains voudraient changer pour faire du président de la république un justiciable comme les autres mais, si j'ai bien compris, uniquement pour des actes commis avant son élection. Mais peut-être après tout certains ont-ils envisagé qu'il soit un justiciable comme les autres tout le temps.
 
Pourquoi pas après tout? On a bien un candidat normal qui devrait donc faire, s'il était élu, un président normal, normal devant être pris au sens de banal, de citoyen banal. On a déjà eu à la tête de l'Etat un roi citoyen, donc pourquoi pas un président normal. D'ailleurs tout ce qui dépasse commence à être très mal vu dans ce pays. Tout ce qui émerge de la masse des gens normaux, quel que soit le domaine considéré d'ailleurs, est éminemment suspect. On voudrait des nuits du 4-août tous les jours, mais avec une extension infinie du concept de privilège, l'objectif final étant sans doute de mettre tout le monde au niveau du plus abruti, du plus pauvre, du plus malade, du plus faible. L'école d'ailleurs s'y emploie avec succès depuis une trentaine d'années dans le domaine qui est le sien. Car il est tellement difficile de définir la normalité qu'en prenant le plus petit dénominateur commun il y a des chances qu'on puisse se mettre enfin d'accord.
Selon cette logique, avant que le président de la république ne soit tiré au sort au sein de la masse des gens normaux, et donc pendant une période transitoire, essayons au moins d'en faire un citoyen comme les autres, avec un vague statut de fonctionnaire. Faisons de l'Elysée une administration normale avec son chef de service pointant aux 35 heures, pourquoi pas, rentrant chez lui le soir dans sa banlieue ou son petit appartement parisien pour apprécier sa vie de famille comme les gens normaux, se rouler sous la couette avant de prendre son RER du matin, s'il n'est pas en grève, pour rejoindre son boulot. En cas de grève il pourra toujours téléphoner pour s'excuser. Tout cela relève finalement d'un objectif louable. Mais pour y parvenir, il faut procéder pas à pas tant l'édifice institutionnel et constitutionnel est difficile à démonter. Le cas Chirac permet donc de s'attaquer à une des briques de ce mur immense en torpillant le statut pénal du président de la République.
 
Donc, selon les modifications envisagées par certains, on ne devrait pas manquer de voir des présidents en fonction dans les tribunaux. Prenons un cas complètement imaginé mais néanmoins plausible, quoique… Imaginons, hypothèse aussi improbable qu'apocalyptique, que le président Hollande, fraichement élu, fasse modifier la constitution très rapidement pour faire du chef de l'Etat un justiciable lambda. Imaginons que dans le même temps, un juge complètement impartial, pas de gauche, chose fort improbable au demeurant, instruise l'affaire des fédérations socialistes des Bouches-du-Rhône ou du Pas-de-Calais, et qu'un des protagonistes déclare que le premier secrétaire Hollande était lui-même bien au courant de ces choses quand il dirigeait le parti, chose très plausible, nous pouvons en convenir. Et voilà donc notre président tout neuf mis en examen, peut-être en garde à vue, ce qui serait logique pour un homme normal. Imaginons l'impact sur les plans national et international. Une opposition de droite et de gauche, car celle-là se réveillera, soyez en sûrs, pour hurler à la démission avec des chances probables d'y parvenir car la pression sera forte et l'homme n'est pas un roc. Donc nouvelles élections avec Marine Le Pen assurément au second tour, peut-être pas battue par Juppé auquel on rappellera ses démêlés avec la justice quand Chirac lui fit porter le chapeau. Donc crise institutionnelle à partit d'un ragot peut-être. Vous croyez que j'exagère mais réfléchissez-y bien. Car la clé de voute de la 5ème république reste définitivement le président, et s'il est fragilisé institutionnellement c'est le système qui est condamné à s'écrouler. C'est peut-être ce que certains souhaitent en rêvant à une 6ème république qui ne pourrait guère être mieux qu'une copie de la 4ème et qui depuis le début de la crise aurait sans doute déjà connu une douzaine de premiers ministres (ou présidents du conseil) et gouvernements.
Non, je ne pense pas, surtout dans une société ou le moindre ragot peut conduire à un procès et où un mise en examen correspond, malgré l'hypocrisie langagière utilisée, à une culpabilité probable, que le président de la république puisse être un justiciable normal. Ce n'est pas l'homme qui doit être protégé, mais la fonction. L'homme d'ailleurs ne l'est pas, Chirac en est une preuve, et si même on peut trouver la peine un peu dure eu égards à son âge et son état de santé, ce verdict montre bien que nul ne peu échapper à la loi de par ses fonctions. Et c'est une bonne chose. Donc si le cas devait se reproduire et il se reproduira, pour d'autres motifs peut-être, à partir de faits prouvés ou d'allégations mensongères, soyons patients pendant 5 ans ou 10 ans maximum. Au nom de l'intérêt supérieur de l'Etat.
 
Je suis par contre favorable à une modification du statut pénal du chef de l'Etat, à un autre niveau. Je pense que les actions délictueuses voire pire commises pendant son mandat devraient être soumises à la justice ordinaire. Car ce qui est assez incroyable dans notre système c'est que ce type d'actions peuvent être punies mais uniquement par la sanction des lampistes ou des exécutants.
Penons un autre exemple. Imaginons un président de la république qui aurait une vie de famille pas normale, selon l'entendement général. Pour être plus précis dans mon exemple un président qui aurait deux familles composées chacune d'une femme, l'une officielle, l'autre non, et d'enfants, certains officiels, d'autres cachés. Pure hypothèse d'école mais vous savez l'abaissement des mœurs peut conduire à certaines choses qu'on n'ose pas avouer parce qu'on les pense inavouables sans doute et que l'on dévoile quand elles ne portent plus à conséquence. Imaginons donc que ce président pour protéger son secret utilise les moyens que lui offre sa fonction et par exemple, décide de mettre sur écoute le tout Paris. Imaginons également que pour protéger sa famille il la fasse vivre dans une des résidences de la république et utilise des membres du GIGN pour la protéger. Tout cela, vous en conviendrez n'est pas très légal et est même répréhensible dans le cas d'un citoyen ordinaire. Mais que pourrait-il se passer pour ce président pendant et après son mandat. Rien. Cet exemple sorti de mon imagination, donc sans doute peu réaliste, montre donc qu'effectivement il y aurait quelque chose à faire pour que le président puisse être un justiciable ordinaire, ou du moins le redevenir une fois son mandat achevé.

En fait je crois que vous m'aurez compris. Je souhaite évidemment que le président de la république devienne un justiciable ordinaire, mais avec effet retard. Pour les fautes commises avant et pendant son mandat. Ça protégerait les institutions et ça n'exonérerait pas l'homme de ses fautes.

2 commentaires:

  1. quel qu'un a parlé devant un journaliste, probablement un expert
    il semblait vouloir dire qu'un Président pourrait suivre illico le cursus normal judiciaire lorsque l'infraction, délit concerne le privé et non la haute fonction
    exemple donné: non paiement de la pension alimentaire
    comme vous l'expliquez on veut du normal pour Président
    un célibataire sans enfants élevé à la DDASS, puceau probablement, sans passé
    peut être le Christ ferait l'affaire mais là encore le sociétal d'icelui lui a inventé pas mal de pans biographiques
    parce que le normal attire tout les délires, un peu comme une vacuité prêtant le flan

    bidouiller la constitution pour une possible comparution immédiate, voilà qui va être intéressant

    nous allons avoir un triple A de la c....

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  2. Une passion conjointe du normal et de la morale risque fort de nous mener vers de médiocres horizons, effectivement.

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