Depuis quelques jours la France
vit un drame. Un vrai drame qui nous indique les défis auxquels nous allons
devoir faire face dans le cadre de la conservation de notre glorieuse
civilisation.
Ce drame ce n’est pas le
terrorisme islamiste. On s’y habitue tellement que la mort par décapitation de
ce chef d’entreprise par son employé est déjà oubliée. Il y aura peut-être une
mention dans les médias après l’inhumation du malheureux. Mais force est de
constater que si la France, du moins une partie de la France a été Charlie,
cette dernière ne semble pas disposée en cet été caniculaire à être Hervé
Cornara. Il fait dire que de brillants esprits, des Plénel ou des Askolovitch,
ont semé le doute dans le cerveau des Français en émettant l’hypothèse,
probable pour eux, que cette décapitation n’est en fait que l’issue malheureuse
d’un dialogue social mal mené entre un patron et son employé. Certes le
procureur soutient la thèse terroriste, mais le doute est permis. Non ?
Donc en attendant les suites de l’enquête, et pour ne pas conforter les thèses
de Todd, il convient d’être réservé et d’éviter les grandes manifestations,
peut-être d’ailleurs réservées aux seuls hommes qui « représentent le
meilleur de la France, la France de l’audace, du courage, de la générosité, de
la liberté, la France que (Pelloux)vous voulez servir », à savoir les
journalistes de Charlie Hebdo, selon notre grand président (délaration faite
lors de la remise de la légion d’honneur à son ami Pelloux). C’est vrai qu’un
chef d’entreprise, ça fait pâle figure à côté de ces gens-là. Donc pas de
manifestation pour protester contre le meurtre ignoble de cet homme par un
musulman fondamentaliste ! Circulez, y a rien à voir ! Et puis après
tout c’est les vacances, non ?
Ce drame que vit la France, ce
n’est pas non plus l’augmentation exponentielle de sa dette au cours du premier
trimestre. Juste 51,6 milliards de plus, ce qui mène la dette à 97,5% du PIB à
la fin mars alors que les prévisions pour la fin de l’année étaient de 96,3%.
Mais c’est juste un détail. D’ailleurs le président a dit que le moment était
venu de la redistribution, sans doute des bénéfices engrangés par sa magnifique
gestion. C’est donc l’heure des cadeaux… à la clientèle, du moins celle ciblée
car la clientèle fidèle se fait de plus en plus rare. Donc il n’y a pas de
drame, c’est même le contraire pour ceux qui vont s’en mettre un peu ou plein
les fouilles. Car là c’est aussi très inégal. Si on compare les 20 € offerts
aux retraités impécunieux et, selon Le Point (donc à vérifier), les 1,4
millions d’euros donnés en compensation (de quoi ?) à l’ami (du président)
Pelloux , le socialisme a encore une marge de progrès devant lui.
Alors c’est peut-être la crise
grecque, donc celle de l’euro, et celle de l’UE. ? Ben non, encore
raté ! Certes, dans tous les cas de figure, car quelle que soit l’issue la
Grèce ne remboursera évidemment jamais, sauf avec l’argent qu’on lui prêtera
pour le faire, le contribuable français s’en prendra pour 42 milliards. Un
détail ! Mais après tout pas de quoi s’émouvoir. N’est-ce pas l’Etat qui
paie ? Certains pays vivent de la rente pétrolière et/ou gazière, la rente
de la France c’est sa dette. Il faut donc en profiter !
Donc ce n’est pas le terrorisme,
ce n’est pas la dette, ce n’est pas la crise grecque ! Alors peut-être les
problèmes liés à l’afflux de migrants ? Ou la canicule qui donne
soif ? Ou le chômage, mais dont la courbe va bientôt s’inverser, parole de
socialiste au pouvoir ? Les sans-abris ? Les mal-logés ? Les
gens dans la précarité ? Les agriculteurs en colère ? Etc.
Et bien non, rien de tout
ça ! Car de tout ça, on s’en remettra évidemment ! Un second mandat
de notre glorieux président si efficace et tous ces petits inconvénients seront
juste de mauvais souvenirs.
Non, le drame, le seul vrai drame
que vit la France, c’est la possible disparition des Guignols. La majuscule
s’impose pour marquer la différence avec les autres guignols qui eux ne
risquent pas de disparaitre. C’est la grande préoccupation de nos dirigeants politiques
ou de ceux qui aspirent à le devenir en ce jour où Hervé Cornara est porté en
terre.
Au secours, ce salaud de Bolloré
veut supprimer les Guignols ! Alors tous s’expriment, tous doivent
s’exprimer. Le président à partir de l’Afrique, là où il ne craint pas huées et
sifflets, est obligé d’intervenir pour nous rappeler que les Guignols font
partie de notre patrimoine télévisuel (et sans doute bientôt culturel). Le
premier ministre ne cache pas son émotion. Le candidat Juppé troque sa photo sur
son compte twitter pour sa caricature des Guignols (depuis il se trouve plus beau). Ayrault
sort de son placard pour protester. Mélenchon touite sa colère. Et plein
d’autres, notamment ceux qui voudraient voir apparaitre leur caricature dans
cette émission pour être rassurés sur leur existence, comme Bartolone par
exemple. Y a que ces cons du FN pour ne pas protester. Faut dire qu’ils n’y sont
pas gâtés. Mais les autres non plus. En fait c’est le bal des hypocrites. Ils
haïssent tous leur marionnette à ce qu’il parait. Mais chut ! Faut faire
semblant d’aimer d’être pris pour une tanche, pour un abruti, pour un voleur…
si c’est ça qui plait aux Français. C’est l’esprit Charlie, quoi !
J’ai bien aimé les Guignols. Mais
désormais, ça ne me fait plus rire. Donc je ne regarde plus. Et il semble que ce
qui pourrait être considéré comme une dégradation de la perception de cette
émission est assez répandu. Donc si l’émission disparait, je m’en fous. Et si
elle est maintenue, eh bien je m’en fous aussi.
Cela dit le phénomène, je parle
de la réaction de tous ces gens, ne manque pas d’intérêt. Il en dit long sur
notre époque, sur notre civilisation comme dirait l’autre. Si c’est cela que
nous devons défendre, il faut comprendre que nous avons déjà perdu, et que le
pire ennemi de notre civilisation, celle qui effectivement mérite d’être
défendue, c’est nous-mêmes.
Bonne nouvelle ! Il parait
que Bolloré fait machine arrière ! Ouf, on n’est pas passé loin de la
catastrophe.
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