"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

lundi 18 juin 2012

Réflexions postélectorales



Nous voilà enfin débarrassés des élections qui auront plongé la France, qui d'ailleurs ne demandait que ça, un peu plus dans le déni de réalité et l'auront soustrait à un gouvernement depuis environ trois mois, mais dans les faits sans doute bien davantage, ce qui au passage pourrait nous suggérer que nous pourrions aisément nous passer de toute cette clique d'hommes et de femmes politiques qui apparemment ne sert pas à grand-chose. La Belgique qui ne fut pas gouvernée pendant très longtemps nous l'avait déjà prouvé; on aurait pu croire naïvement que c'est parce que c'est un petit pays, mais la France vient de prouver le contraire. Ce qui, je tiens tout de même à éviter certains malentendus, ne signifie pas que les politiques ne servent à rien, mais que ceux que nous avons, du moins ceux qui sont en situation de pouvoir, ont renoncé à faire de la politique et à vraiment gouverner. L'emploi de plus en plus fréquent du terme "gouvernance" au lieu de "gouvernement" et qu'on pourrait traduire par "gestion" en est un des symptômes les plus visibles.
Quant au déni de réalité que j'évoquais, qui se divise en une volonté de ne pas vouloir prendre conscience de la gravité de notre situation particulière, et aussi dans ce refus conscient ou inconscient de devoir se serrer la ceinture, et pas seulement les riches, le second terme impliquant certainement le premier d'ailleurs, il est particulièrement observé par nos partenaires européens et même mondiaux qui commencent à penser que les Français s'imaginent vivre sur une autre planète ou sont victimes d'une hallucination collective avant même que soit dépénalisée la consommation de cannabis. Les premières mesures du gouvernement Ayrault, dites de justice, mais sans doute davantage électoralistes, n'ont pas manqué de surprendre des partenaires européens quelque peu éberlués. On pourra d'ailleurs se féliciter de la proximité dans le temps entre les présidentielles et les législatives car imaginez ce que ça aurait été si les législatives s'étaient déroulées en fin d'année par exemple. Ce fameux déni de réalité aura coûté cher à Bayrou à la présidentielle, la déculottée qu'il s'est prise aux législatives devant être située sur un autre plan, puisque c'est à peu près le seul qui a eu le courage de poser un vrai diagnostic de notre situation.

Donc maintenant c'est fini. Les socialistes ont tous les pouvoirs, exécutif, législatif, judiciaire, médiatique, et donc désormais forts de cette puissance monopolistique ils vont peut-être, eh oui peut-être seulement, descendre de leur nuage et enfin parler un langage de vérité, donc décevoir leur électorat. Certes, ils ne manqueront pas de dire que la situation est bien pire que ce qu'ils pouvaient imaginer, tentant grâce à la complicité des médias de nous faire oublier qu'avec un socialiste à la tête de la Cour des Comptes et un autre à la présidence de la commission des finances des l'Assemblée Nationale ils devaient pourtant être bien renseignés, et que donc ils devront différer certaines de leurs promesses qu'ils ne manqueront pas de tenir quand la situation se sera redressée, c'est-à-dire jamais ou quelques mois avant les prochaines échéances électorales nationales. Que les homosexuels se rassurent, la légalisation de leur mariage ne coûtant rien mais pouvant être électoralement payante si l'on en croit Terra Nova, ils seront satisfaits. Reste que nos nouveaux dirigeants devront ou devraient nous faire avaler quelques pilules bien amères, sauf à vouloir rester dans ce déni de réalité qui a caractérisé leurs campagnes électorales, mais ils ne sont pas les seuls, loin de là, jusqu'à ce qu'un beau matin nous nous réveillons non pas en sortant d'un cauchemar, mais en y entrant. Auront-ils le courage de le faire? Là est toute la question. Donc ne les accablons pas a priori, sauf sur les quelques mesures déjà prises, et attendons un peu avant de leur taper sur la tête.

 
Comme on a déjà beaucoup parlé des présidentielles, comme on a déjà beaucoup tenté d'expliquer pourquoi un personnage considéré par même ses amis politiques comme falot avait pu accéder à la tête de l'Etat, je ne reviendrai pas sur cette élection sauf pour dire qu'elle augurait évidemment, vu le calendrier, des résultats des législatives qui viennent de s'achever et sur lesquelles je souhaiterais davantage m'étendre.

On remarquera tout d'abord le très fort taux d'abstention, le plus élevé, je crois, à des élections de ce type sous la 5ème République. Certes le calendrier y est sans doute pour quelque chose, de même qu'un mois de juin peut-être ensoleillé, j'avoue que pour la France je ne me suis pas renseigné, et encourageant peut-être donc davantage au barbecue entre amis et à la campagne qu'à faire la queue au bureau de vote. Mais peut-être aussi peut-on imaginer que mon constat initial portant dur l'apparente inutilité de notre classe politique y est pour quelque chose. Un président comme bouc-émissaire, ça suffit! Ainsi que ses ministres.
Du coup subsistera la tentation de mettre en doute la légitimité des députés qui se traduira dans les esprits par une marginalisation, par la représentation d'un groupe d'individus qui sont davantage là pour eux que pour la France ou le peuple et dont les avantages scandaleux conforteront cette opinion. Ça n'est jamais très bon pour la démocratie. A ce propos que penser des 11 députés représentant les Français de l'Etranger dont le mieux élu a obtenu en voix 13,49% des inscrits et le plus mal élu, si j'ose employer ce terme, 6,93%? Pourtant ceux-là vous coûter très cher à la collectivité.

Les résultats, vu dans leur globalité, n'ont rien de surprenant. La gauche l'emporte largement, de la même manière que la droite l'avait emporté en 2007. A quelques sièges près, il y a une parfaite inversion.
Par contre si on entre dans les détails, on peut faire quelques constats.

Le premier est évidemment la représentation des partis à l'Assemblée qui est complètement décorrélée des résultats obtenus en voix au premier tour. C'est certes le principe voulu par le fondateur de la 5ème République qui voulait sortir de ces magouilles partisanes à la Chambre qui généraient une forte instabilité gouvernementale. Le but est évidemment atteint. Maintenant, les "amoureux" de la démocratie, contrairement aux pragmatiques, n'y retrouveront pas leur compte. C'est aussi d'ailleurs une possible raison de l'abstention : pourquoi se déplacer alors qu'on est sûr que le parti pour lequel on a envie de voter ne sera pas représenté? Pour ma part, étant donné le nombre de partis, étant donné ce goût français pour la chicane, étant donné que les intérêts particuliers et l'opportunisme semblent bien souvent dépasser l'intérêt général, étant donné que dans une coalition le minoritaire et même l'ultra-minoritaire, en fonction des circonstances, peut imposer sa loi, je suis tenté de trouver le système actuel satisfaisant. Le corriger par une dose de proportionnelle me parait absurde car le risque est grand tout en ayant toujours ce défaut, même atténué, de représentativité qui caractérise le système actuel d'avoir les inconvénients d'un système purement proportionnel dès lors qu'un seul parti n'emporte pas la majorité. Donc je pense qu'on doit, soit conserver le système actuel, soit passer à une proportionnelle intégrale. Reste que le 3ème parti de France, le FN, n'a que 2 représentants, tandis que les verts arrivés très loin derrière, en ont 17 et obtiennent donc un groupe parlementaire et voient s'éloigner le risque très élevé qui les attendait de faillite financière, l'idéologique étant consommée depuis longtemps. Et ça peut, sinon choquer, au moins étonner.

Ce qui m'amène à un second constat. On peut remarquer à l'aune du double résultat des verts, en vois et en sièges, que les institutions de la République sont à l'occasion contournées par les partis. De Gaulle voulait limiter des basses tractations à la Chambre. Eh bien soit! On les fera avant. Je ne dis pas que c'est une nouveauté, mais dans le cas cité ici, on peut dire que l'illustration de ce genre de pratique est exemplaire. Voilà un parti qui aurait pu compter en gros sur 3 députés et qui en obtient 17. On pourra d'ailleurs ici souligner les talents de négociateur de Placé qui pourtant restera, sauf surprise, au Sénat, tandis que Duflot, bien incapable d'obtenir de telles conditions, pourra parader sous les ors de la République. Mais peut-être peut-on voir dans ce choix plutôt que l'autre la patte d'un Hollande qui n'était pas une chaud partisan d'un accord dont il a déjà dénoncé quelques points programmatiques, sans réaction des verts d'ailleurs dont on peut mesurer au passage les convictions, donc la patte d'un Hollande qui en choisissant Duflot pourra sans doute discréditer les verts pour un bout de temps.

Le troisième constat est relatif à l'effet Mélenchon. Cet homme, tout en augmentant significativement à la présidentielle, et un peu aux législatives, en voix l'audience de la mouvance communiste, parvient à faire élire environ deux fois moins de députés que sous l'ancienne législature. Certes, il n'y a pas eu d'accord avec les socialistes, sauf de désistement, mais cela ne peut pas tout expliquer. On peut y voir, car ce sont effectivement des bastions communistes qui sont tombés, notamment en Seine-Saint-Denis, l'inadaptation du discours mélenchoniste à l'électorat plutôt populaire de ces bastions. Je pense notamment que le discours pro-immigrés n'a pas eu l'heur de plaire aux classes populaires. Donc Mélenchon gagne des voix au niveau national, en générant un autre électorat, mais effraie l'électorat traditionnel du parti communiste. A méditer. Pour les communistes, bien sûr.

Un dernier constat, et je m'arrêterai là dans l'immédiat, est que l'effet "star" et peut-être surtout "guest star" ne fonctionne plus et donne peut-être même des résultats opposés à ceux escomptés.
Lang, Guéant, MAM et surtout Royal symbolisent cette désaffection pour les pointures, du moins celles et ceux qui se considèrent comme telles ou que leur parti présente comme telles, comme des individus dont ne saurait se passer la France. Certes localement et notamment pour Royal on trouvera des explications plausibles expliquant une défaite et même dans ce cas particulier une déroute. Mais reste que le phénomène mérite sans doute qu'on y prête attention. Est-ce un effet collatéral de l'élection de Normal 1er? Ou bien l'élection de ce dernier entre-elle dans cette même et nouvelle dynamique? Cela reste à éclaircir.

 

 

1 commentaire:

  1. bonjour Expat

    L'appareil PS a tout bien rangé, chapeau l'artiste, tout est verrouillé à Bourbon, qu'inventera le groupe vert? pas grand chose
    Par contre la rue est incertaine, le FN continuera à infuser, Mélenchon à agiter
    du rose fluo avec en face un bleu flou flanqué de deux députés assis par hasard
    le changement c'est maintenant, is now or never, avant que ça se ré agite et on ne sait toujours pas comment le gouvernement va procéder pour nous dire ce que l'on sait

    on se croirait dans une classe où le prof a obtenu le silence des potaches

    on a le stylo en l'air

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