"En ces temps difficiles, il convient d'accorder notre mépris avec parcimonie, tant nombreux sont les nécessiteux." Chateaubriand

mercredi 21 octobre 2015

La France apaisée





Ça fait partie de ces expressions qui vous campent l'homme qui les prononce. Un brave type impuissant auquel il ne reste plus qu'à invoquer des slogans vides de sens pour faire semblant d'exister. A moins que ce ne soit un type oublieux de ce qu'il a déjà dit et qu'il n'a pas réussi à obtenir ou qui pense que ceux auxquels il s'adresse ont oublié une promesse déjà émise par le passé et pas tenue. Mais peut-être est-ce simplement quelqu'un qui n'a rien à dire et qui doit meubler le temps d'un entretien radiophonique ou d'une quelconque intervention.
Mais, même si je ne m'attarderai pas là-dessus, c'est tellement lamentable et caractéristique de ce pouvoir qu'il vaut mieux s'en abstenir sauf à vouloir se faire du mal en comptant le temps minimum qu'il nous reste à subir ça, comment oser parler de France apaisée quand on détient le monopole de la violence légitime et qu'on refuse de s'en servir laissant celle illégitime s'imposer sur des parties entières du territoire? Comment quand on est président de la République oser parler de France apaisée, dès lors que des gens provoquent la fermeture d'une gare pendant plus de deux semaines du fait de leurs incivilités, tandis qu'une autre gare est quasiment incendiée au moment où il prononce ces paroles? Chaque jour nous apporte les preuves de la démission de ce pouvoir incapable d'assurer la sécurité des Français et leur libre circulation, mais cela n'empêche cependant pas le grand responsable de ce chaos de venir au micro d'une grande radio à une grande heure d'écoute nous tenir un baratin sur la France apaisée. Faut oser! Et aussi compter sur la passivité de ceux qu'on qui sont de l'autre côté du micro.

Mais revenons à cette expression si mal placée dans la bouche d'un incapable.
Alors, bien sûr je confirme. Les Français préfèrent, du moins j'imagine, vivre dans une France apaisée que dans une France où c'est le bordel, où la loi n'est plus respectée, sauf celle du plus fort, où sortir dans la rue constitue un risque inattendu dans une société dite civilisée, où on n'a pas envie d'être la victime de la haine ou du ressentiment de gens qu'on ne connait pas forcément mais qui estiment avoir les raisons de ne pas vous aimer parce que vous êtes de telle couleur, croyez que tel prophète est le bon et les autres des charlots, avez telle profession, telles opinions, etc.
Mais finalement peut-être que je me trompe, car tout ça finalement, c'est de leur ressort aux Français et aux gens qui vivent sur le territoire français. Peut-être que finalement les habitants de la France imaginent une France apaisée mais qui corresponde à leur conception de cette France, individuelle, ou collective, ce dernier adjectif ne concernant pas les Français dans leur ensemble mais des groupes d'individus plus ou moins vastes ayant une vision assez homogène de la chose.
De fait, et en se référant à l'histoire même ancienne, l'expression France apaisée me semble être un oxymore presque parfait. De la guerre de 100 ans en passant par les guerres de religion, les jacqueries, la Fronde, la révocation de l'Edit de Nantes, la Révolution, les révolutions qui lui succédèrent, l'affaire Dreyfus, la loi de 1905, l'entre-deux guerres, la collaboration et la résistance, l'épuration, les guerres de décolonisation, mai 58, mai 68, la querelle autour de l'enseignement libre, l'intégration des étrangers, les émeutes des banlieues, le mariage pour tous, et j'en ai oublié, jusqu'à la conférence sociale qui vient de se tenir, il me semble que la France a toujours été en conflit avec elle-même, ne connaissant que quelques courts instants de répit quand elle fut parfois gouvernée ou d'une poigne de fer, ou habitée par un objectif commun dépassant intérêts individuels et de groupe. Peut-être, et je n'en suis pas vraiment sûr la France a-t-elle été apaisée sous Louis XIV avant qu'il n'ait eu cette mauvaise idée de révoquer l'Edit de Nantes, sous Bonaparte premier Consul et peut-être sous Napoléon, sous de Gaulle entre 62 et 68, raison peut-être pour laquelle ces trois hommes restent les figures tutélaires de cette France qui semble attendre un successeur à ces trois véritables chefs d'Etat, mais en vain. En vain parce que la mode est maintenant pour les prétendants à la gouvernance de la France d'aimer les Français et les gens en général davantage que d'aimer la France. Or je crois que la France, et sans doute n'importe quel pays, celui des bisounours n'existant pas sauf dans les rêves socialistes d'où seraient bien sûr exclus tous ceux qui ne seraient pas des bisounours, gagne ainsi que sa population à être gouvernée par des dirigeants plus soucieux de leur pays que des gens qui y vivent. C'est exactement pour cela que quand j'entends des gens dire, ultime artifice pour lui trouver une qualité d'homme d'Etat sans doute, que Hollande aime les gens, je souris car ils ne se rendent pas compte à quel point ils expriment le fait que c'est un très mauvais chef d'Etat et même quelqu'un qui ne mérite pas de diriger la France. Car si, donc, il suffisait d'aimer les gens, ce qu'au demeurant je ne crois pas que ce soit une caractéristique nos derniers dirigeants qui, à mon avis, n'ont aimé et n'aiment ni vraiment la France, ni vraiment les gens, mais surtout eux-mêmes, c'est dans les monastères et les couvents qu'on aurait la chance de trouver les personnes les plus aptes à nous diriger. Mais la bonté est incompatible avec le pouvoir qui ne peut que se concevoir que dans le cadre  d'une vision pour le pays sur lequel il s'exerce et de la défense des intérêts de ce dernier. Les gens bons ont un rôle certain à tenir pour alerter le pouvoir et infléchir sa politique, mais feraient de bien piètres gouvernants sans aucun doute.

C'est évidemment ici mon côté bonapartiste qui s'exprime en insistant sur la nécessaire qualité des gens qui dirigent la France pour que celle-ci soit apaisée, comme dit l'autre qui ne possède pas cette qualité. Et je conçois que c'est évidemment insuffisant en termes de conditions pour que la France soit apaisée, même si par ailleurs un chef d'Etat digne de ce nom veille à ce que les autres conditions, du moins celles que je considère comme essentielles, soient respectées.  
Il y a en effet quelques fondamentaux à respecter si on veut espérer une France apaisée. Ou pour être plus clair des responsabilités qui incombent à l'Etat et qui si elles ne sont pas prises amènent forcément des troubles.

Pensons tout d'abord à l'ordre. Je sais que ce simple mot écorche souvent les oreilles des âmes sensibles d'une gauche humaniste et de progrès plus portée à laisser chacun faire ce qui lui plait. Je sais aussi que l'ordre demande du courage de la part de ceux qui sont censés le faire respecter. Je ne parle pas de ceux qui tiennent la matraque, mais de ceux qui sont responsables. Or force est de constater que l'ordre, la loi ne s'appliquent plus guère qu'à ceux qui veulent bien les subir ou aux plus faibles, que par exemple dépasser une limitation de vitesse de 2 km/h ou payer ses impôts avec 24 heures de retard est souvent plus préjudiciable que d'incendier des voitures, bloquer des axes routiers ou ferroviaires, faire son petit business dans le hall des immeubles de certaines cités... Force est de constater que des membres d'une minorité qui se regroupent pour défier les règles, que des gens opposés à une loi, pensons aux bonnets rouge par exemple, utilisant la violence et pratiquant la destruction de biens publics s'en tirent généralement bien et obtiennent même gain de cause sur leurs revendications, quitte à annuler des décisions judiciaires ou encore mieux une loi votée pourtant à l'unanimité. Si donc le recours à la violence est légitimé parce qu'au plus haut niveau de l'Etat on renonce à faire respecter l'ordre, inutile ensuite d'en appeler à une France apaisée alors qu'on a contribué et même encouragé à la plonger dans le tourment, alors qu'on a rompu le principe d'égalité devant la loi qui est un des fondements de la République.

De l'égalité (devant la loi), je glisse vers l'équité. Quand des gens estiment, et ils ont des raisons pour cela, je vais y venir, que leur situation n'est pas équitable, quand donc ils éprouvent colère et rancœur, tandis qu'ils ne peuvent exprimer ces sentiments que par des mots qu'on n'entend pas ou un vote qu'on méprise, on ne peut se poser quand on est responsable comme le promoteur d'une France apaisée. Quand par exemple des Français ayant travaillé et cotisé toute leur vie se voient contraints par manque de revenus à renoncer à des soins tandis que d'autres parce qu'ils sont hors la loi, je pense aux clandestins, peuvent bénéficier de soins, même dits de confort, complètement gratuits, la colère ne peut que monter. Quand les mêmes ont une pension faible, je pense notamment aux paysans retraités ou davantage à leurs veuves qui n'ont pas cotisé par mesure d'économie souvent nécessaire, voient des gens qui n'ont jamais travaillé en France ou cotisé avoir des revenus supérieurs aux leurs et en plus bénéficier de prestations qui leurs sont refusées, la colère ne peut que monter. Quand des gens aux faibles revenus trainent pendant des années sur des listes d'attente pour l'obtention d'un logement social qu'ils n'auront peut-être jamais parce qu'entre temps leur situation familiale aura évolué voient des amis  ou des membres du pouvoir politique local (cas fréquent à Paris) bénéficier de ces logements tandis que leurs revenus devraient leur en interdire l'accès, ou quand des immigrés par mesure humanitaire passent devant eux, la colère ne peut que monter.

Alors vous me direz, dans tout ça il y a une forme d'apologie de la préférence nationale et ça c'est vraiment pas bien. Libre à vous de le penser, je pense exactement le contraire. S'il n'y a pas de préférence nationale c'est qu'il n'y a plus de nation et s'il n'y a plus de nation il n'y a plus vraiment d'étrangers. Or c'est bien un des maux de notre pays et de l'Europe en général, du moins cette partie de l'Europe qui ne résiste pas à ce diktat davantage libéral qu'humaniste au passage, que de voir ses habitants contraints, moralement et de plus en plus par la loi, de cesser de considérer l'étranger comme un autre, la réciproque étant que l'étranger peut désormais cesser de se considérer comme un invité, donc devant obéir aux règles de ses hôtes et éventuellement de les faire siennes s'il souhaite sortir de sa condition d'étranger. Cette idée qui s'accoutre des haillons pouilleux qu'on nomme diversité ou métissage, même si ces notions sont antagonistes, est certainement en vogue chez beaucoup de nos progressistes, trouve évidemment ses promoteurs (en fait ce serait surtout promotrices) dans l'actuel gouvernement, mais, hélas pour eux, et tant mieux pour la France, ne semble pas rencontrer beaucoup les faveurs des Français, du moins dans leur majorité. Et ces gens, ces horribles réacs, ces maudits réfractaires au progrès, même s'ils n'ont pas encore vraiment trouvé qui pourrait les représenter de façon crédible, après avoir courbé l'échine, après avoir voté "mal" par dépit, ou ne pas avoir voté du tout, commencent de plus en plus à relever la tête et à refuser ce qu'on veut leur imposer, cessant en même temps de considérer comme de justes manifestations d'une identité, la même chose qu'on leur refuse à eux si elle se réfère à leur nation, son histoire, sa culture, ses valeurs, quitte à en produire d'autres et ce dès l'école, les agissements de ceux qui depuis longtemps ont cessé de se considérer comme de simples invités pour se croire des parties prenantes de ce pays et pourquoi pas son avenir. A la décharge des derniers cela fait longtemps que leur attitude n'est pas réprouvée par les pouvoirs publics qui même ont tendance à l'encourager. Je ne reviendrai pas sur cette notion d'inclusion que trouvait merveilleuse le précédent premier ministre. Et il n'était pas le seul.
Il existe donc un véritable conflit et qui est identitaire. Ce sera l'enjeu principal des prochaines années et ce sera une source de grands troubles. Ce gouvernement et ceux qui l'ont précédé depuis 1974, souvenons-nous du regroupement familial, en sont les responsables.

Dans le même ordre d'idée, je pourrais parler du désamour pour son pays qui est devenu institutionnalisé par des lois et qui est une des clés de voute de l'enseignement de l'histoire à l'école. Si on ne s'aime pas, si on considère son pays comme criminel devant l'histoire, comment espérer que ceux qui y viennent l'aiment surtout si en même temps on explique à ces derniers qu'il a une dette imprescriptible, valant droit de tirage définitif et éternel, vis-à-vis d'eux.

Je pourrais aussi parler du mensonge ou tout du moins du manque de sincérité qui est devenu une règle chez nos dirigeants qui tentent vainement de compenser ou leur impuissance, ou leur complicité, en tout cas leur manque d'action par le verbe. On a un premier ministre spécialiste qui parle de toujours sanctionner les fauteurs de trouble sans qu'on en voie les résultats d'autant plus que ce n'est pas de son ressort. La référence à une France apaisée fait partie de cette insincérité, de cette hypocrisie. Et ça ne trompe que ceux qui veulent être trompés.


Je pourrais enfin parler du rôle des intellectuels, surtout pseudos ceux-là, ou des journalistes, également pseudos malgré leurs cartes et les avantages notamment fiscaux qu'ils en tirent (toujours l'équité!) qui n'ayant plus rien à dire ne peuvent exister que par la dénonciation calomnieuse de ceux qui ne sont pas dans un schéma "correct" de pensée, et en particulier les autres intellectuels qui ne sont pas restés bloqués sur un paradigme qui ne fonctionne pas.



Non la France n'est pas apaisée et n'est pas près de l'être. Pour qu'elle le soit ou pour que les choses aillent un peu mieux, la première condition serait qu'elle soit gouvernée. Or elle ne l'est pas, en tout cas pas à partir de Paris et pas par les représentants que le peuple se donne. Il faudrait aussi se souvenir qu'on ne gouverne pas contre le peuple, surtout en démocratie, et que le peuple ce n'est pas une entité abstraite, une somme d'individus déconnectés et qui auraient jeté aux orties les choses fondamentales qui en ont justement fait un peuple, forcément différent des autres peuples.

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