L'Europe est-elle submergée? Mais
non, vous répondra-t-on! 1 millions d'immigrés pour 514 millions d'habitants
dans la seule UE, c'est peanuts!
En fait c'est peut-être 1 mais
aussi 2, moins éventuellement, mais beaucoup plus dans un avenir proche puisque
les causes produisant les effets migratoires n'ont pas été éradiquées, ne le
seront pas demain et vont même sans doute s'étendre. Il en est évidement de
même des causes faisant de l'Europe cet aimant vers lequel sont attirés tous
ces malheureux et les autres. Par ailleurs ce million et le reste ne prennent
pas en compte ceux qui sont déjà arrivés, et même les enfants ou petits-enfants
de ceux arrivés depuis longtemps et dont on a l'impression en les voyant, en
voyant leur manière de se vêtir, en considérant leurs mœurs, leur langage, leur
façon de considérer ceux qui ne sont pas comme eux, c'est-à-dire nous, qu'ils
viennent de débarquer la semaine dernière et que le temps leur a évidemment manqué pour s'intégrer à leur
nouveau milieu. Ce point est évidemment important, même essentiel, et j'y
reviendrai.
Mais avant de parler accueil, ou
rejet, en tout cas prise en compte, traitement d'une immigration massive,
arrêtons-nous un instant sur les causes, celles qui font que l'Europe ou
l'Union, non on ne rit pas, se retrouve confrontée à une crise majeure
susceptible de la faire imploser. Vous me direz "on a déjà dit ça à propos
de la crise grecque et on s'en est sorti, oiseau de malheur!". Sauf que
cette crise n'a pas été résolue bien évidemment. Mais ce n'est pas le sujet.
Les causes évidemment on les
connait : la guerre, la peur, la misère, l'espoir d'une vie meilleure ailleurs...
Mais que fait l'Europe ou que peut-elle faire pour combattre ces causes? En
fait pas grand-chose, et même quasiment rien.
Elle est incapable de peser
efficacement sur les conflits, faute de posséder des forces qui lui sont
propres et parce que les pays qui la composent disposent de moyens militaires
réduits. Une stratégie de défense fondée sur la dissuasion nucléaire comme en
France à laquelle s'ajoute une armée devenue croupion au fil des années, il
fallait bien engranger les dividendes de la paix, dixit un ancien premier ministre
devenu depuis ministre des affaires étrangères et qui à l'occasion de cette
sortie a montré sa clairvoyance et donc son aptitude à diriger notre diplomatie,
une telle stratégie n'est plus adaptée aux défis de notre époque, et c'est pour
cela qu'on la conserve. Et comme donc l'Europe et ses membres sont impuissants,
ils sont évidemment à la remorque s'engageant dans des coalitions de façon
symbolique ce que ne saurait cacher une communication tonitruante dès par
exemple qu'un rafale lâche de façon très épisodique une bombe sur un camp
d'entrainement des méchants islamistes, enfin des islamistes méchants car il
paraitrait qu'il y en a de fréquentables. Ceux fréquentables sont évidemment
ceux que soutiennent nos alliés du coin soutenus eux-mêmes par les Etats-Unis
et qui nous dictent notre conduite. Alors on assiste médusés à une diplomatie à
la godille où ce qui était valable hier ne l'est plus aujourd'hui. Prenons un
exemple : le 24 septembre, la chancelière allemande déclarait : "Il faut parler avec de nombreux acteurs, et
cela implique (Bachar al) Assad, mais il y en a d'autres." Le 27 octobre son ministre des affaires
étrangères déclare : "A ce que je
vois, il y a beaucoup d'acteurs et de puissances régionales, dont la Turquie,
l'Arabie saoudite et d'autres pays du Golfe, pour lesquels c'est impensable et
nous ne pouvons imaginer non plus qu'Assad fasse partie d'un gouvernement de
transition ayant tous les pouvoirs." Tout est dit, Turquie, Arabie
Saoudite et autres pays du Golfe. Ce sont eux qui font la loi. Surtout la
Turquie où l'épaisse chancelière a rencontré il y a peu le très respectable,
amoureux de la laïcité, et fiable Erdogan pour qu'il conserve chez lui un
maximum de réfugiés. Pour cela ce ne seront pas uniquement des millions d'euros
qui seront nécessaires, mais bien d'autres choses, comme, et le changement
d'attitude est significatif, un alignement de la politique étrangère européenne
sur celle de la Turquie en ce qui concerne le problème syrien. Mais pas
seulement puisque on veut reparler de l'adhésion de la Turquie à cette UE qui
part en vrille. On nous dira sans doute que c'est pour mieux la contrôler,
d'autres envisageront les conséquences inverses.
S'agissant des causes
économiques, là aussi l'Europe est en dessous de tout. Non seulement elle ne
donne pas suffisamment, bien moins que ce que dictent les critères onusiens sur
l'aide publique au développement, mais en plus elle ne contrôle pas ou très peu
la destination de ce qu'elle donne, à la grande joie des banques suisses et
luxembourgeoises, et pas seulement (les banques!).
Ne pouvant donc influer
réellement sur les causes, l'Europe doit gérer ou tenter de gérer les
conséquences, et donc les flux de migrants générés par les malheurs sur
lesquels elle n'a aucune influence et ne peut que commenter en fonction des
éléments de langage fournis par d'autres.
Sur l'accueil des migrants, on
peut distinguer trois grandes écoles, mais dont deux d'entre elles peuvent
finalement aboutir à des positions communes.
Je distinguerai la position libertaire, la position libérale et la
position civilisationnelle (en d'autres temps j'aurais dit identitaire, mais ce
terme ayant été tellement galvaudé que je l'éviterai).
La position libertaire, c'est
celle de tous ceux qui ont toujours le cœur sur la main tant que ce sont les
autres qui paient. Pour résumer leur position, il faut accueillir sans
restriction tous les gens qui souffrent et même les autres, les frontières
n'ont aucun sens et surtout aucune légitimité, chacun va où il veut, et de
toute façon on est assez riches pour accueillir tout le monde. Ce n'est guère
élaboré comme pensée, mais ceux qui en sont porteurs sont forcément des gens
biens car généreux, même si c'est l'Etat qu'ils méprisent qui doit se
débrouiller. Et il aura intérêt à le faire car ils assurent le suivi, signant
toutes les pétitions possibles et imaginables surtout s'ils ont un statut
d'artiste, forcément progressiste. Même s'ils peuvent paraitre risibles, ou
naïfs, ou encore étant dans une simple posture, ils ont cette force de pouvoir
mobiliser les médias de toute obédience, ceux de gauche leur étant
naturellement ouverts tandis que l'accès de ceux de droite leur sera facilité
par les libéraux, et de jouer sur la fibre émotionnelle. On se rappelle de
cette photo (recadrée pour les besoins) du petit garçon syrien.
Ils ont pour alliés objectifs,
d'où cet accès facilité aux médias, les libéraux. Ceux-là non plus n'aiment
guère les frontières et encore moins les nations. Ce sont ceux qui suivent les
orientations, j'ai failli écrire les ordres, de la commission trilatérale
(Amérique du Nord, Europe occidentale, Asie du pacifique) ou du groupe de Bilderberg,
tous ces mondialistes qui inspirent la commission européenne depuis des lustres
et adoubent nos dirigeants. Lagarde fut admise au Bilderberg avant de devenir
présidente du FMI, et Juppé fut adoubé l'été dernier ce qui laisse supposer
qu'il a de fortes chances de devenir notre prochain président (van Rompuy avait
été entendu par ce groupe avant de pouvoir devenir président du conseil européen).
Je voudrais juste relever une déclaration d'un des éminents membres de la
trilatérale pour vous montrer ce que sont ces gens et quels sont leurs buts. Il
s'agit en l'occurrence d'un dénommé Peter
Sutherland, conseiller spécial pour les migrations auprès du secrétaire général
de l'ONU dont on comprend désormais qu'elle encourage une migration de
remplacement pour l'Europe, lequel déclara en 2012 devant la Chambre des Lords
que "l'Union européenne doit faire
de son mieux pour détruire l'homogénéité interne des nations européennes".
Un discours qu'aurait pu tenir évidemment un libertaire gourmand de diversité
ou de métissage. Et donc quoi de mieux pour "détruire l'homogénéité des
nations européennes" que des migrants de culture différente et arrivant en
masse pour s'y installer durablement. Par ailleurs ces mêmes migrants
conforteront l'analyse marxiste sur laquelle ces libéraux ne crachent pas selon
laquelle ils constitueront "l'armée
de réserve du capitalisme". C'était bien le sens de l'invitation faite
par Merkel à ces migrants qui la fit passer, grâce notamment aux gentils
libertaires, de l'image de la mégère bismarckienne torturant les Grecs à celle
d'une mère Térésa dont la compassion à l'égard de tous ces malheureux jetés sur
mers et routes pour trouver paix, repos et prospérité aurait dû lui valoir le
prix Nobel de la paix. Si, si, ils y ont cru! Remarquez, puisqu'Obama l'a eu il
'y a pas de raison qu'elle ne l'ait pas non plus!
Et enfin il y a la position de
ceux qui veulent défendre l'identité de l'Europe, la position des pas gentils
du tout, des pas beaux, des ringards, de ceux qui n'ont rien compris à la
marche de l'histoire, des nauséabonds, de l'Europe rance (comme dirait notre
premier ministre bien qu'il préfère appliquer cette épithète à la France), bref
des fachos. C'est aussi ma position, que la honte soit sur moi! La figure de
proue des tenants de cette position est bien sûr le premier ministre hongrois
Viktor Orban, pas tant à cause de ce qu'il pense et dit, puisque c'est la
pensée qui domine dans ce qu'on appelle les PECO, mais parce qu'il concrétise
ses mots par des actions. Ce qui peut paraitre insolite et même déplacé sous
nos cieux!
Pour résumer cette position,
l'Europe a une civilisation qui lui est propre, d'inspiration chrétienne dans
ses valeurs, qu'une arrivée massive de migrants issus d'une autre civilisation,
musulmane pour ne pas la citer, finirait par détruire. Les tenants de cette
position n'ont pas oublié ce qu'est "la frontière". A leur décharge,
si on parle des Hongrois, on peut dire que ces derniers parlent d'expérience. Par
ailleurs, ils sont confortés dans leur vision des choses par l'observation
qu'ils peuvent faire depuis plus de 20 ans de ce qui se passe en Europe
occidentale, là où l'échec de l'intégration est patent, là où les identités
nationales partent en vrille quand elles ne sont pas objet de dérision pour
ceux dont on pourrait penser, parce qu'ils gouvernent, qu'ils ont la charge de
les défendre. La réforme du contenu des programmes scolaire, en histoire
notamment, en France est à cet égard exemplaire de cette attitude, de cette volonté de
destruction de nos racines. Cette position de défiance vis-à-vis d'une
immigration de masse, si elle est défendue par un certain nombre de dirigeants,
notamment ceux du groupe de Višegrad (Hongrie, Pologne, Tchéquie et Slovaquie),
a aussi des adeptes et dans des proportions que je pense notables dans les
autres pays de l'Union Européenne dont les dirigeants oscillent entre la
position libertaire et celle libérale pour justifier leurs choix ou pour être
plus exact s'appuient sur la position libertaire pour que l'emporte la position
libérale.
Et voilà donc au milieu de tout
ça l'Europe. Ses dirigeants, président du conseil, commissaires, et surtout
hauts fonctionnaires tous acquis à la mondialisation heureuse et œuvrant pour leurs
maitres discrets, secondés dans leur action dans beaucoup de pays d'Europe
occidentale et du Nord par des dirigeants acquis à la même idéologie
post-nationale et libérale, doivent donc se parer des oripeaux
humanitaro-libertaires pour faire atteindre leurs objectifs tout en se heurtant
d'une part à des dirigeants, situés surtout à l'Est de l'Europe, qui ont encore
le souci de leur nation, et d'autre part aux opinions contraires émises par les
peuples d'Europe, ces maudits peuples vis-à-vis desquels tout a été fait pour
que leurs volontés soient étouffées, pour que la démocratie qu'on leur propose soit
réduite à un simple simulacre, mais dont il faut tout de même se méfier des
fois qu'ils se réveilleraient, des fois qu'ils trouveraient qu'on pousse le
bouchon un peu trop loin, des fois qu'ils réaliseraient que le destin qu'on
leur concocte ne va pas dans leurs intérêts. Je crois que les peuples
rechignent à être dissous, à devoir déposer leur identité au fond d'une urne
funéraire déguisée en urne électorale pour devenir un agrégat d'individus dont
le seul point commun serait l'envie de consommer. Je crois que Sutherland a surestimé
le pouvoir de l'union européenne dans sa capacité à dissoudre les identités des
nations européennes. Le mur existe.
Et donc devant cette situation,
l'UE doit composer. Composer avec les décisions d'Orban et rediriger les flux. Composer
pour les réguler. La Serbie est priée de mettre en place des camps pour réguler
les flux. C'est sans doute le prix à payer pour elle pour intégrer l'Union. Mais
comme ça ne suffit pas il faut aussi composer avec la Turquie, ainsi qu'on l'a
vu plus haut et payer très cher, et pas seulement en euros. Il faudra être
aussi un peu sympa avec les Grecs puisque la majorité des migrants passe par
chez eux. Eux-aussi devront fixer les fixer dans des camps. Ça devient un jeu
de piste, avec des camps semés au long du chemin. Quand on est prêt à les
recevoir là où on veut les recevoir, on ouvre les vannes et on devrait donc
assister à une translation de camp en camp des flux de migrants. Bien sûr tout
ça est théorique et suppose que tous jouent le jeu, que la Turquie ne laisse
pas partir trop de réfugiés d'un coup, que les Grecs les reçoivent dans de
bonnes conditions, et que les camps qui se succèdent au long du chemin
remplissent certaines conditions et donnent envie d'y rester un certain temps.
Il faut aussi que les migrants se plient à ces règles qui ne sont pas tant
faites pour eux que pour qu'on puisse organiser la logistique et surtout pour
que l'impression d'envahissement soit atténuée, donc pour que la pilule passe
mieux auprès des peuples. Les scènes d'enthousiasme du début et qui
concernaient surtout les Allemands, enfin ceux qui en étaient les acteurs, les
autres étant interdits d'antenne, destinées à nous indiquer la conduite à
tenir, la "bonne" conduite, semblent en effet appartenir aujourd'hui
au passé. On entend davantage parler de Pegida que de la liesse des foules à la
gare de Munich, vous savez cette gare qu'on a réorganisée à l'occasion de
l'Oktoberfest pour que les réfugiés musulmans n'aient pas à croiser les fêtards.
Ça donne tout de suite le ton de ce qui va suivre, de notre avenir même.
Dans tous les cas il y a tromperie, mais
n'est-ce pas là la marque de fabrique de l'Union européenne?